Africa-Press – Congo Brazzaville. Coopération bilatérale, appui financier, suspension des visas aux ressortissants congolais, aides au développement et possible fermeture ou relocalisation de la représentation diplomatique américaine, l’ambassadeur des Etats-Unis en République du Congo, Eugene S. Young, salue dans une interview exclusive d’adieu, les relations pleines de nouvelles opportunités passionnantes qui existent entre Brazzaville et Washington.
Les Dépêches de Brazzaville (LDB): Monsieur l’Ambassadeur, vous êtes arrivé au terme de votre mandat de près de 3 ans et demi. Quels sentiments éprouvez-vous en quittant la République du Congo?
Eugene S. Young (ESY): Alors que je termine mon mandat d’ambassadeur des États-Unis en République du Congo, en tant que représentant du président Donald Trump, je suis rempli d’un profond sentiment de gratitude et de fierté. Ce fut mon plus grand honneur de servir les États-Unis et le peuple américain en République du Congo au cours des trois dernières années et demie. Les autorités et le peuple congolais ont fait preuve d’une chaleur et d’une amitié incroyables à mon égard et à l’égard de ma famille depuis notre arrivée à Brazzaville en mars 2022.
La République du Congo est le pays unique que je connaisse – unique par ses richesses naturelles et unique par son hospitalité légendaire. Le potentiel de développement de la République du Congo est exceptionnel. La population est jeune et déterminée à soutenir le développement de ce magnifique pays. Vous disposez de forêts, de rivières et d’une faune étonnante qui peuvent soutenir un écotourisme florissant, qui continuera à attirer les touristes des États-Unis et du monde entier, ainsi que de minéraux et de vastes terres arables pour l’agriculture.
Au cours des trois dernières années et demie, j’ai été témoin de la résilience et de la détermination du peuple congolais, et je pars avec une profonde admiration pour ses aspirations et son engagement en faveur du progrès, mais aussi pour la culture congolaise. Bien qu’il soit toujours difficile de faire ses adieux à un pays qui est devenu une seconde patrie, je suis optimiste quant à l’avenir des relations entre les États-Unis et la République du Congo et je suis convaincu que les fondations que nous avons construites continueront à produire des résultats positifs.
J’ai beaucoup de souvenirs merveilleux du Congo que j’emporterai avec moi, il y en a un en particulier qui restera gravé dans ma mémoire: Je vis dans un quartier tranquille qui donne sur un petit ravin. De l’autre côté de ce ravin, chaque dimanche, je peux entendre de magnifiques chœurs de chorales en parfaite harmonie, comme si des anges étaient descendus à Brazzaville. C’est d’une beauté envoûtante et c’est quelque chose que je n’ai jamais connu ailleurs. Il n’y a qu’ici, au Congo.
LDB: Comment évaluez-vous la coopération bilatérale entre nos deux pays?
ESY: Le partenariat entre les États-Unis et la République du Congo est bon. Au cours des trois dernières années, j’ai été témoin du développement et du renforcement de l’amitié et de la coopération entre nos deux pays dans de nombreux domaines, notamment la sécurité, l’éducation, la protection de l’environnement, la santé et le commerce.
Aujourd’hui, les relations entre les États-Unis et le Congo sont pleines de nouvelles opportunités passionnantes en ce que les États-Unis, sous le leadership du président Donald Trump, se focalisent sur la promotion de la paix, la construction de nouveaux partenariats et mettent en avant une prospérité partagée avec l’Afrique et le monde entier.
L’entraide dans les situations d’urgence est au cœur de nos relations. Le Congo a soutenu les États-Unis dans les situations d’urgence depuis avant même son indépendance en 1960, lorsque nous avons dû évacuer l’ambassade des États-Unis à Kinshasa pour la première fois. Malheureusement, cela a de nouveau été nécessaire au début de cette année. Grâce à la coopération exceptionnelle du gouvernement congolais, nous avons pu évacuer en toute sécurité plus de 250 de nos compatriotes diplomates de Kinshasa à Brazzaville, puis vers les États-Unis et ailleurs. Nous ne remercierons jamais assez le Congo pour son soutien.
De même, depuis l’indépendance de la République du Congo, les États-Unis, en sus de notre aide bilatérale, ont fourni de loin la plus grande part du budget de pratiquement toutes les agences des Nations Unies, de toutes les banques de développement et de la plupart des autres organisations internationales. En d’autres termes, chaque fois que le Programme alimentaire mondial, le Fonds mondial de lutte contre la tuberculose et le VIH/SIDA, l’Organisation mondiale de la santé, l’UNICEF, le HCR, le FMI, la Banque mondiale ou la Banque africaine de développement ont soutenu un projet ou un programme au Congo, c’est la générosité des contribuables américains qui a rendu possible une grande partie de ces efforts tout au long de l’histoire de la République du Congo. Aucun pays dans l’histoire du monde n’a autant mis la main dans ses trésoreries nationales pour soutenir les autres partout dans le monde que les États-Unis d’Amérique.
Grâce au président Trump et au secrétaire d’État Marco Rubio, nos programmes d’assistance ont été révisés et mieux ciblés. Tout ce que nous faisons désormais bénéficie aux États-Unis et à nos amis dans le monde entier.
Un Congo en paix et en sécurité est synonyme d’une région plus stable, et les États-Unis sont fiers de se tenir aux côtés de leurs partenaires congolais pour faire avancer cette vision. Nous avons renforcé la capacité du Congo à protéger ses eaux territoriales, un domaine prioritaire pour les États-Unis et tous nos partenaires régionaux en matière de sécurité. Les commandos d’élite congolais, les forces de maintien de la paix et les forces maritimes ont perfectionné leurs compétences dans le cadre des programmes dirigés par les États-Unis, qu’il s’agisse des exercices antiterroristes Flintlock, de Obangame Express ou des formations animées par les garde-côtes américains à Pointe-Noire.
Le programme « Cantines Scolaires », mis en œuvre avec le PAM-Congo et le gouvernement congolais, fournit des repas nutritifs quotidiens à plus de 150 000 enfants, augmentant la fréquentation scolaire de 40 % dans les régions ciblées.
Au début de cette année, après trois décennies de collaboration, nous avons achevé notre travail dans le cadre du Programme régional pour l’environnement en Afrique centrale (CARPE). Depuis 1995, les États-Unis ont investi près de 800 millions de dollars en Afrique centrale pour protéger le du Bassin Congo et sa magnifique faune.
Rien qu’en 2024, nous avons fait don d’équipements médicaux d’une valeur de preseque14 millions de CFA au Service de santé des Forces armées congolaises pour renforcer la lutte contre le VIH/SIDA. La même année, nous avons engagé près de 2,5 millions de dollars pour endiguer la variole.
Comme l’a répété le secrétaire d’État Rubio, l’engagement des États-Unis en faveur de l’aide humanitaire se poursuit. Dans les moments difficiles, les États-Unis sont restés aux côtés du Congo. Pour la seule année 2024, les États-Unis ont alloué plus de 6 milliards de francs CFA d’aide humanitaire pour soutenir la réponse aux inondations, les soins de santé pour les mères, les programmes nationaux de lutte contre la malnutrition pour les enfants, et les distributions de nourriture pour les réfugiés dans les départements des Plateaux et de la Likouala.
LDB: Il y a des spéculations sur une possible fermeture ou relocalisation de l’ambassade des Etats-Unis au Congo. Quelle est la situation exacte?
ESY: Les États-Unis restent attachés à leur présence diplomatique à Brazzaville. Bien qu’il y ait eu des discussions sur l’optimisation de notre empreinte diplomatique dans le monde, il n’y a actuellement aucun projet de fermeture ou de relocalisation de l’ambassade des États-Unis en République du Congo.
Notre ambassade sert de plateforme vitale pour faire progresser les relations bilatérales, les liens commerciaux, soutenir les initiatives humanitaires et renforcer les échanges entre nos citoyens. Les États-Unis apprécient le partenariat avec le Congo et reconnaissent l’importance de maintenir une présence diplomatique forte pour relever les défis et saisir les opportunités communes.
LDB: Récemment, l’administration Trump a annoncé la suspension des visas pour les ressortissants de douze pays, dont ceux de République du Congo. Qu’est-ce qui a motivé cette décision?
ESY: La suspension des visas pour les ressortissants de certains pays, dont la République du Congo, fait partie d’une politique plus large visant à protéger les États-Unis de l’immigration illégale et à assurer le respect des lois sur l’immigration. Il y a une crise de l’immigration illégale aux États-Unis que le président Trump cherche à traiter rapidement et fermement. Comme l’indique clairement la proclamation du président, entre autres problèmes, trop de voyageurs de la République du Congo ont fait le choix de rester aux États-Unis au-delà de la durée autorisée par les autorités de l’immigration américaine. Ces actions sont illégales et contraires aux lois américaines en matière d’immigration. Nous conseillons vivement à tous les citoyens congolais qui se rendent aux États-Unis de respecter scrupuleusement et précisément les exigences des autorités américaines en matière d’immigration.
Il est important de noter que ces mesures visent à encourager la coopération dans la résolution des problèmes d’immigration. Nous continuerons à travailler avec le gouvernement du Congo pour relever les défis évoqués dans la proclamation du président Trump.
LDB: Quel est votre point de vue sur la politique des États-Unis à l’égard de l’Afrique?
ESY: Comme indiqué précédemment, sous l’administration Trump, notre politique étrangère vis-à-vis de l’Afrique met l’accent sur la Paix, le Partenariat et la Prospérité.
Je pense que sous la présidence Trump nous, les États-Unis et la République du Congo, avons la meilleure opportunité, jamais offerte, de développer véritablement nos relations bilatérales de manière qu’elles profitent directement et concrètement aux deux pays. Cependant, pour que ces résultats positifs se produisent, il est important que le Congo soit plus actif, peut-être même plus engagé, dans tous les domaines de collaboration de notre partenariat. C’est le moment ! J’espère que le gouvernement, le secteur privé et le peuple Congolais saisiront cette occasion cruciale de notre histoire commune.
Les priorités du président Trump en Afrique
La paix: l’actualité nous montre à quel point c’est difficile, mais aucun pays ne travaille plus dur que les États-Unis pour instaurer la paix dans le monde. Le récent accord de paix historique entre la RDC et le Rwanda, facilité par le président Trump, le secrétaire d’État Rubio et le conseiller principal pour l’Afrique Massad Boulos, est un exemple de l’engagement de l’administration Trump en faveur de la paix dans cette région, sur le continent et dans le monde entier.
Nouer des partenariats sans donner de leçons : Le président Trump comprend que si les États-Unis et d’autres pays espèrent la réussite du Congo, seul le peuple congolais peut décider de son avenir.
Quelqu’un à Dolisie m’a récemment demandé ce que le Congo devrait faire pour construire son avenir. J’ai répondu que les États-Unis encourageront toujours une société et une économie plus ouvertes, mais que seul le Congo peut et doit déterminer son avenir, pas l’Amérique, pas la Chine, pas la Russie, pas la France ou qui que ce soit d’autre.
Le commerce: Les États-Unis disposent des marchés les plus vastes, les plus innovants et les plus dynamiques du monde en matière de commerce, d’investissement et de capitaux. Aucun pays n’offre autant de possibilités. Mais pour tirer profit de ces possibilités, il est important que la République du Congo travaille avec les États-Unis de manière plus active et plus engagée et qu’elle améliore de manière significative le climat des affaires. Une chose est sure, il n’y a jamais eu de meilleures opportunités que maintenant pour construire un partenariat audacieux entre les États-Unis et la République du Congo. Nous espérons que la République du Congo adoptera une approche plus active dans notre coopération économique afin de saisir ces opportunités.
LDB: Quel message adressez-vous aux autorités et aux citoyens congolais concernant la coopération entre Brazzaville et Washington?
ESY: Aux autorités et aux citoyens congolais, j’exprime ma profonde gratitude pour leur partenariat et leur hospitalité durant mon mandat. Les relations entre Brazzaville et Washington sont fondées sur des intérêts communs. Alors que nous nous tournons vers l’avenir, je crois en une collaboration renforcée dans des domaines tels que le développement économique et la sécurité régionale. Ensemble, nous pouvons relever les défis et saisir les opportunités pour créer un avenir meilleur pour nos deux nations.
J’encourage le gouvernement congolais à poursuivre ses efforts pour promouvoir la paix, la bonne gouvernance et l’état de droit, car ces éléments sont essentiels pour libérer tout le potentiel de notre partenariat. Au peuple congolais, je salue votre résilience et votre détermination, qui nous inspirent à renforcer notre engagement en faveur de notre prospérité et de notre progrès commun.
En quittant Brazzaville, j’emporte avec moi le souvenir de nos réalisations communes et l’espoir d’un partenariat durable qui profite à nos deux nations. Je vous remercie et je me réjouis d’être témoin de la croissance continue des relations entre les États-Unis et la République du Congo.
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