Africa-Press – Congo Brazzaville. Chaque année, la revue indépendante Prescrire scrute le marché du médicament pour en pointer les dérives, les traitements inutiles ou trop risqués qui continuent pourtant d’être proposés aux patients. L’édition 2026 de ce bilan annuel n’échappe pas à la règle: la liste noire s’allonge encore, confirmant que des produits bien ancrés dans les habitudes françaises, parfois vendus depuis des décennies, présentent une balance bénéfice-risque défavorable ou une efficacité à peine supérieure à celle d’un placebo.
Ainsi, d’après Prescrire, 108 médicaments sont à écarter en 2026, dont 89 encore commercialisés en France. La revue rappelle que figurer sur cette liste ne signifie pas un retrait du marché, mais constitue un signal de vigilance pour les patients comme pour les soignants.
Ces médicaments présentent souvent une balance bénéfice-risque défavorable, c’est-à-dire que les patients encourent des risques beaucoup trop élevés en les utilisant plutôt que d’autres traitements, ou qu’ils exposent à des effets indésirables disproportionnés par rapport à leur efficacité. D’autres encore ne font pas mieux qu’un placebo, rendant leur usage inutile.
Le Spasfon, un médicament en vente libre aux effets indésirables potentiellement graves
Parmi les traitements pointés figure le phloroglucinol, plus connu sous le nom de Spasfon, en vente libre partout en France. Ses effets indésirables possibles — réactions allergiques, très rares syndromes de Lyell (un syndrome dermatologique potentiellement mortel pour le patient) — sont bien documentés, tandis que son efficacité reste incertaine pour les douleurs intestinales ou gynécologiques.
Ce médicament n’est d’ailleurs commercialisé qu’en France et en Italie, la Belgique ayant arrêté sa mise sur le marché dès 2010. Pourtant, il demeure l’un des produits les plus consommés du pays. En 2023, en France, ce sont près de 26,5 millions de boîtes qui ont été remboursées par l’Assurance maladie.
Ces médicaments contre le rhume et la toux à éviter
Au-delà du phloroglucinol, d’autres traitements très répandus présentent une balance bénéfice-risque défavorable. C’est le cas de certaines argiles médicamenteuses, telles que la diosmectite (Smecta) ou l’hydrotalcite (Rennieliquo), susceptibles de contenir naturellement du plomb, une substance neurotoxique. Lorsque l’usage d’un médicament est réellement nécessaire, Prescrire recommande de privilégier des alternatives sans argile, comme Gaviscon, composé de bicarbonate et d’alginate de sodium.
Avec l’hiver, les toux bénignes se multiplient, et les sirops antitussifs retrouvent les étagères des foyers. Pourtant, nombre d’entre eux exposent à des effets indésirables importants sans réelle efficacité démontrée. C’est le cas de l’oxomémazine (Toplexil), responsable de somnolence et d’autres effets indésirables. L’ambroxol (Muxol), quant à lui, expose à des réactions anaphylactiques ou cutanées parfois sévères, sans faire mieux qu’un placebo.
NOUVEAUTÉ 2026. En 2026, Prescrire ajoute également à sa liste le géfapixant (Lyfnua), un médicament récent contre la toux chronique. Son efficacité est jugée modeste, tandis que les effets indésirables — en particulier des troubles importants du goût, mais aussi des infections respiratoires ou des calculs urinaires — sont fréquents.
Ainsi, en cas de toux, si l’on souhaite vraiment prendre un médicament, il est préférable, selon Prescrire, de se tourner vers le dextrométhorphane, contenu par exemple dans le sirop Tussidane, bien qu’il comporte lui aussi des limites.
Maux de gorge: des pastilles pas si utiles
Face aux maux de gorge, les pastilles semblent une solution évidente. Pourtant, l’alpha-amylase (Maxilase) ne montre aucune efficacité clinique solide et expose à des réactions allergiques parfois graves. L’avis de Prescrire reste inchangé: pour les désagréments de l’hiver, mieux valent le miel, l’eau sucrée, les confiseries à sucer ou du paracétamol en cas de douleur intense.
Douleurs articulaires: des risques qui persistent
La très grande majorité des Français déclare avoir déjà souffert de douleurs articulaires. Pour y remédier, beaucoup se tournent vers les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), qui possèdent tous des effets indésirables communs, notamment digestifs, cardiovasculaires ou rénaux.
Parmi les produits les plus problématiques, l’acéclofénac (Cartrex) et le diclofénac (Voltarène) augmentent le risque de mortalité cardiovasculaire (infarctus du myocarde, insuffisance cardiaque). Les myorelaxants tels que Miorel n’apportent souvent pas plus qu’un placebo, tandis que d’autres, comme le méthocarbamol (Lumirelax), exposent à des troubles digestifs et cutanés.
NOUVEAUTÉ 2026. La chondroïtine (Chondrosulf), largement utilisée dans l’arthrose, rejoint la liste des produits à écarter en 2026. Les données montrent une absence d’efficacité, combinée à des risques allergiques. Elle rejoint ainsi la glucosamine (Voltaflex, Flexea, Chondroflex, etc.) déjà déconseillée.
En cas de douleurs articulaires, Prescrire recommande de privilégier le paracétamol, l’ibuprofène ou le naproxène, utilisés ponctuellement et à la dose minimale efficace.
Antidépresseurs: des effets indésirables parfois graves
Certains antidépresseurs figurent également dans la liste noire. L’agomélatine (Valdoxan) n’a pas fait mieux qu’un placebo dans les études, tout en exposant à des hépatites, pancréatites, risques suicidaires ou réactions cutanées.
Le citalopram (Seropram) et l’escitalopram (Seroplex), deux IRS (des antidépresseurs inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine), comportent un risque accru en cas de surdosage par rapport à d’autres médicaments de la même classe.
Deux autres médicaments ajoutés à la liste noire en 2026
NOUVEAUTÉS 2026. L’andexanet alfa (Ondexxya), utilisé en milieu hospitalier pour contrer certaines hémorragies graves. Prescrire pointe un risque thromboembolique important, conduisant à son inscription sur la liste des produits à éviter, bien qu’il ne soit pas commercialisé en ville. Autre ajout à la longue liste noire: le fézolinétant (Veoza), contre les bouffées de chaleur de la ménopause. Ce tout récent traitement non hormonal peine à démontrer un bénéfice significatif, tandis que la revue signale des atteintes hépatiques, parfois graves.
Pour finir, rappelons que l’automédication comporte des risques, et que l’avis d’un professionnel de santé demeure indispensable pour choisir un traitement réellement utile, efficace et sûr.





