Crises frontalières en Afrique : Après Mali/Niger nous revenons sur le cas RD Congo/Rwanda

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Crises frontalières en Afrique : Après Mali/Niger nous revenons sur le cas RD Congo/Rwanda
Crises frontalières en Afrique : Après Mali/Niger nous revenons sur le cas RD Congo/Rwanda

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – Congo Kinshasa. La solution fondamentale aux crises frontalières africaines réside dans la promotion de la bonne gouvernance, où la bonne gouvernance facilite les relations et favorise les moyens pacifiques de résoudre les problèmes entre voisins. Ceci est confirmé par le fait que la plupart des pays africains confrontés à des crises frontalières aujourd’hui sont ceux qui obtiennent de mauvais résultats dans le classement de l’indice de démocratie.

Selon l’avis des chercheurs

Dans une nouvelle étude élaborée par certains chercheurs, on découvre qu’il y a près de 100 conflits frontaliers en cours à travers l’Afrique aujourd’hui, et ces conflits sont exacerbés par les conflits d’armes et les opérations illégales qui ont lieu sur bon nombre de ces frontières, dont la plupart des différends frontaliers des deux dernières décennies peuvent être classés entre :

• le différend sur la souveraineté nationale sur une zone frontalière,

• ou le différend sur la dépendance d’une zone frontalière d’un pays particulier en raison des ressources qu’elle contient.

Il y a également des escarmouches militaires, des activités terroristes transfrontalières, des rébellions séparatistes, de la contrebande de marchandises illégales, de la violence ethnique, de la traite des êtres humains et des affrontements violents entre agriculteurs et éleveurs.

Outre la fragilité des frontières africaines et leur délimitation irréaliste par les puissances coloniales, les conflits qui traversent les frontières nationales en Afrique déstabilisent des régions entières.

Dans ce contexte, les exemples ne manquent pas, comme c’est le cas en République démocratique du Congo, située en Afrique centrale, où les combats ont repris depuis près d’une décennie, et plus d’une douzaine de groupes armés, soutenus par divers pays voisins, parrainent d’autres rebelles comme une forme de vengeance contre les pays où ils sont actifs, en raison de positions politiques ou d’intérêts économiques.

Que se passe-t-il donc aux frontières de la RD Congo et du Rwanda ?

En fouillant dans les annales de l’histoire, nous constatons que la frontière congolaise-rwandaise a été établie par les colonialistes belges et allemands au début du XXe siècle et est restée inchangée depuis l’indépendance des deux pays dans les années 1960. L’une de ses caractéristiques est qu’elle s’étend dans une direction nord-sud modèle, en grande partie le long des rivières et du lac Kivu, sur une distance de 222 kilomètres. Cela signifie que la frontière entre les deux pays allait du tri-point nord avec l’Ouganda au tri-point sud avec le Burundi.

A noter qu’en octobre dernier, le conflit de longue date entre la République démocratique du Congo et le Rwanda a repris au milieu d’escarmouches meurtrières le long de leur frontière commune à l’Est de la RDC, sachant que les relations tumultueuses entre les deux parties remontent à l’époque où des Hutus rwandais sont arrivés en République démocratique du Congo, accusés d’avoir tué des Tutsis lors du génocide rwandais en 1994.

La crise s’est aggravée après leur formation, avec d’autres groupes de Réfugiés rwandais au Congo, des milices dans l’Est de la RD du Congo, qu’ils ont appelé « Forces de la démocratie pour la libération du Rwanda » (FDLR), dans le but de s’opposer à l’influence de l’ethnie tutsi et au gouvernement du président rwandais Paul Kagame.

Par ailleurs, lorsqu’en 2019 le président congolais, Félix Tshisekedi, est arrivé au pouvoir, on pensait que la tension entre eux allait être atténuée, mais elle s’est plutôt exacerbée, au mois de juin 2022, lorsque les Forces armées congolaises ont accusé, dans un communiqué, l’Etat rwandais d’avoir envoyé 500 forces spéciales clandestines dans la région de « Chanzu », relevant de la province du « Nord-Kivu » frontalière avec le Rwanda, où est actif également le « mouvement du 23 Mars ».

Conséquences possibles sur l’économie

Avec une économie « robuste », estimée à 6,4 % de croissance entre 2012 et 2021, et « largement tributaire d’importants flux d’investissements étrangers et d’aides financières », le Rwanda aurait, selon Fitch Solutions, tout intérêt à se tenir à l’écart des allégations dont l’accuse la RD Congo pour maintenir de fortes relations avec la communauté internationale et continuer à bénéficier de ses investissements.

Ainsi, avec un marché fortement perturbé, les exportations rwandaises vers la RDC représentant 12,4 % du total des exportations du pays en 2021 et la seule raffinerie d’or du Rwanda reposant en majorité sur les minerais congolais, les deux économies risquent de voir leur croissance ralentir.

Autres défis

Il semble entre-autres qu’un autre défi réside dans le fait que le gouvernement congolais lui-même ne contrôle pas la détérioration des conditions dans la région orientale du Congo, bien qu’il soit sous sa souveraineté légale.

On a relevé que la région a récemment connu une amplification des attaques perpétrées contre des civils congolais par des rebelles congolais et d’autres groupes armés étrangers, notamment les Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR).

Cela signifie donc que ce qui se passe dans l’Est de la République démocratique du Congo est non seulement une menace pour le Congo, mais aussi une menace pour la stabilité des pays qui partagent des frontières avec lui.

Un voisinage perturbé et imprévisible à l’avenir

Il importe de rappeler que les frontières ou les régions frontalières de l’Afrique sont à la fois source d’opportunités et de défis. En témoignent le conflit en Sierra Leone dans les années 90 du siècle dernier, qui s’est étendu au Liberia et à la Côte d’Ivoire, la réponse régionale à la rébellion « Boko Haram » en Afrique de l’Ouest, la coopération entre groupes armés dans la région du Sahel, la tension persistante entre le Rwanda et la République démocratique du Congo dans la crise à l’Est du Congo.

Mais il y a aussi un rôle pour la crise du Darfour dans le conflit soudano-tchadien, et récemment les nouveaux affrontements qui ont éclaté entre le Soudan et l’Éthiopie. Ce qui signifie qu’il existe souvent une structure historique, géospatiale et géopolitique ancrée dans les trajectoires de ces conflits et instabilités.

En suivant la nature de ces frontières, on peut dire que les colonialistes avaient construit la plupart de ces frontières sur la base de structures lâches d’identités et de loyauté et de l’hypothèse d’homogénéité des sociétés africaines, et elles ont continué à être adoptées par les pays africains après l’indépendance. Il en résulta qu’il y eut toujours des compétitions et des conflits entre ces pays et les habitants de leurs zones frontalières, en plus de la difficulté de les gérer, de les contrôler et de s’accorder sur les voies de développement de leurs sociétés.

On peut donc assurer que : Alors que les crises frontalières n’étaient pas un cas spécifique à l’Afrique, comme le notent les crises « sino-taïwanaise » et « russo-ukrainienne », l’accord de la plupart des chercheurs sur les crises frontalières en Afrique était que les ressources naturelles sont la « vraie source » de la plupart des conflits entre les pays du continent concernant leurs frontières, et qu’il existe une possibilité de conflit frontalier entre les pays qui manquent de bonne gouvernance, et que les pays qui opèrent à l’intérieur de la plupart de ces frontières n’ont qu’une souveraineté « juridique », vide de souveraineté expérimentale pratique.

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