Nouvelle loi Ceni : une réformette sans envergure ?

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Nouvelle loi Ceni : une réformette sans envergure ?
Nouvelle loi Ceni : une réformette sans envergure ?

Africa-PressCongo Kinshasa. Vendredi 11 juin 2021, la chambre haute du parlement a voté à la quasi-unanimité dans les mêmes termes que la chambre basse six jours plus tôt, la loi portant organisation et fonctionnement de la CENI. Le texte proposé par le député national Christophe Lutundula Apala, devenu vice-premier ministre en charge des Affaires Etrangères, n’attend plus que sa promulgation par le président de la République. Au grand dam de certains acteurs politiques et de la société civile qui ont clamé leur désappointement en estimant qu’on avait simplement « déshabillé St Pierre pour habiller St Paul », comme pour soutenir que sur cette question, la nouvelle majorité au pouvoir n’aura pas fait mieux que la précédente.

Les critiques les plus acerbes contre la nouvelle loi organique sur la centrale électorale portent sur la dépolitisation de l’institution d’appui à la démocratie qu’est la CENI ainsi que sur les mécanismes de contrôle de son fonctionnement, qui l’exposeraient à l’influence des politiques.

Dépolitisation

La loi adoptée au parlement consacre une espèce d’équilibre entre les composantes de la plénière en portant de 10 à 15 le nombre des membres de l’assemblée plénière de la CENI, à raison de 5 membres pour chacune des trois composantes (majorité, opposition et société civile).

Pour le reste, elle renforce l’indépendance, la neutralité et l’impartialité de la centrale électorale en soumettant sa gestion à un contrôle interne et externe en interdisant à ses membres certains types d’acquisitions suspectes; en protégeant ses membres de pressions des tiers, notamment de ceux qui les ont désignés ; en instituant la sanction collective ou individuelle de déchéance des membres du bureau en cas de violation des dispositions légales relatives aux élections ; en prévoyant la démission des membres dudit bureau en cas de non-dépôt du rapport de gestion dans le délai de 45 jours ouvrables après l’ouverture de la session de mars ou la fin du processus électoral.

Demi-mesures

Selon le G13, groupe informel de 10 députés, l’Assemblée nationale et le Sénat n’auront réussi qu’à faire avaliser une «réformette sans envergure et sans prétention de changer la gouvernance électorale».

La loi portant organisation et fonctionnement de la CENI aurait dû, pour ce groupe, être une indication majeure de la réelle volonté de répondre aux causes qui plombent l’organisation des élections crédibles en RDC depuis 2006, selon ces élus, peu suspects d’hostilité au pouvoir en place.

Réagissant à ces critiques, le député national André Mbata, président de la Commission PAJ de la chambre basse du parlement, et après lui Christophe Mboso, président de l’Assemblée nationale en personne ont donné de la voix.

Le premier pour indiquer que la dépolitisation de la CENI serait anticonstitutionnelle parce que cette institution d’appui à la démocratie est d’essence politique. Le second pour inviter les protagonistes à ne pas mettre de l’huile sur le feu car le pays traverse une situation déjà difficile à gérer.

Les pourfendeurs de la loi estiment qu’en précipitant dans la catégorie «politisation anticonstitutionnelle» toute réelle amélioration de l’indépendance des membres de la CENI et des mécanismes de contrôle et de fonctionnement de la centrale électorale, le président de la PAJ de l’Assemblée nationale a tort. Car les hommes politiques qui seront désignés s’activeront comme par le passé à subordonner la mission de la centrale électorale à celle de leurs partis politiques. Ils sont d’avis que les composantes politiques conserveront un droit d’ingérence dans la désignation des membres de la société civile, sans oublier le caractère hasardeux de la mobilisation des financements qui risque de conduire à des malversations dans la passation des marchés de la CENI, le bureau restant juge et partie et échappant à tout contrôle sérieux faute de redevabilité et de transparence dans la gestion opérationnelle et financière.

Les cléricaux aussi

La polémique sur la loi organique portant fonctionnement de la CENI avait pris un tour particulier avec la publication, le 9 juin 2021, d’un communiqué conjoint Eglise du Christ au Congo (ECC)-Eglise Catholique. Les représentants des deux plus grandes confessions religieuses de la RDC rappellent que les consultations initiées par le président de la République en novembre 2020 ont conduit à une orientation claire sur la nécessaire dépolitisation de la CENI. Elles déplorent par conséquent la disproportion entre les composantes politiques représentées par 10 membres et la société civile (5 membres); la faible représentativité de la société civile au sein du bureau (1/7 membre); l’élagage des dispositifs visant le renforcement de l’indépendance ainsi que le contrôle technique et administratif de la CENI contenus dans la proposition de loi Lutundula.

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