Africa-Press – Congo Kinshasa. La tension verbale entre Kinshasa et Kigali reprend de plus belle, une semaine seulement après la signature de l’accord de paix entre la RDC et le Rwanda à Washington sous médiation américaine. Dans une interview accordée samedi 5 juillet à Radio Okapi, le porte-parole du gouvernement congolais, Patrick Muyaya, est monté au créneau pour répondre à la récente sortie médiatique du président rwandais, Paul Kagame. Ce dernier a, en effet, vivement critiqué le régime de Kinshasa et nié catégoriquement toute présence militaire rwandaise sur le sol congolais, en dépit des nombreuses accusations formulées par la RDC et documentées par des rapports internationaux. Patrick Muyaya a dénoncé des « mensonges répétés » de Paul Kagame et l’a accusé de chercher à détourner l’attention de la population congolaise de la mise en œuvre de l’accord de paix signé le 27 juin. Le porte-parole du gouvernement a estimé qu’il était contradictoire pour Kigali de nier toute implication dans les violences à l’Est de la RDC tout en signant un accord visant à résoudre ce conflit. Ces échanges tendus rappellent la fragilité de l’accord conclu à Washington et la défiance persistante entre les deux pays, alors que la communauté internationale espérait une désescalade durable.
Le président rwandais, dans ses propos relayés par plusieurs médias internationaux en milieu de semaine, a mis en doute la sincérité de Kinshasa dans la mise en œuvre de l’accord signé le 27 juin sous l’égide des États-Unis à Washington. Paul Kagame a notamment rejeté les accusations congolaises sur la présence de troupes rwandaises et a pointé du doigt ce qu’il a qualifié de « contradictions » dans la politique de Félix Tshisekedi. Une position qui a aussitôt suscité la réaction des autorités congolaises.
Face à ces déclarations, Patrick Muyaya a dénoncé une stratégie visant à détourner l’attention des Congolais des véritables enjeux de l’accord. Il a affirmé sur les ondes de Radio Okapi: « Ses mensonges répétés commencent à toucher à leur fin. Comment vous pouvez constamment nier les activités illicites dans l’Est de la RDC, alors que nous avons été à table et nous avons signé l’accord (de paix RDC-Rwanda, le 27 juin à Washington sous l’égide des États-Unis d’Amérique)? On ne peut pas signer l’accord lorsqu’on n’a pas été engagé dans un conflit. »
Pour Kinshasa, la signature de cet accord de paix est la reconnaissance implicite de l’implication rwandaise dans la crise sécuritaire à l’Est de la République démocratique du Congo, marquée par des affrontements avec le M23, soutenu, selon plusieurs rapports de l’ONU, par Kigali. Muyaya insiste sur le fait que Kigali ne peut pas nier son rôle tout en s’engageant à Washington à contribuer à la résolution du conflit.
Le porte-parole du gouvernement congolais a également mis en cause la crédibilité démocratique du président rwandais. Dans un ton ferme, il a déclaré: « Le chef de l’État rwandais n’a aucune leçon de démocratie à donner, tant que son pays ne garantit pas la pluralité politique, ni la liberté médiatique et non plus le respect des droits de l’homme. »
Ces propos illustrent le climat de méfiance persistant entre les deux pays, malgré la médiation américaine et la signature de l’accord censé ouvrir la voie à un apaisement. Du côté congolais, l’opinion publique reste également sceptique quant à la bonne foi de Kigali. De nombreux acteurs politiques et organisations de la société civile dénoncent régulièrement l’agenda occulte du Rwanda dans les conflits à l’Est, où des millions de Congolais ont été déplacés par les violences.
Kinshasa assure cependant que le gouvernement reste attaché à la mise en œuvre de l’accord, tout en restant vigilant quant aux manœuvres de Kigali. « Nous avons signé pour la paix, pas pour les illusions », a conclu un conseiller proche de la présidence.
Le processus engagé à Washington prévoit notamment le retrait des forces étrangères, le désarmement des groupes armés, et le retour progressif des déplacés dans leurs villages d’origine. La communauté internationale, notamment les États-Unis et l’Union africaine, suit de près l’évolution de ce processus.
Dans ce contexte tendu, la réaction de Patrick Muyaya marque une volonté de rappeler à la communauté internationale les « réalités du terrain » et de dénoncer ce que Kinshasa considère comme une campagne de désinformation orchestrée par Kigali. Les prochaines semaines seront décisives pour tester la sincérité des engagements pris à Washington et pour voir si le Rwanda et la RDC parviendront réellement à tourner la page des hostilités.
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