Africa-Press – Congo Kinshasa. Dans une tribune au journal français LE MONDE, 75 prix Nobel appellent à un sursaut international, pour le conflit de la RDC, qui depuis 30 ans, n’a connu aucun répit.
À l’invitation du docteur Denis Mukwege (photo), prix Nobel de la paix en 2018 et auteur de ce texte, ils appellent à ce que les pays du monde « mettent fin à la tragédie congolaise, 3 décennies de conflits armés, de guerres répétées, de catastrophes humanitaires et de violations systématiques des droits humains et du droit international ».
Malgré le le rapport Mapping, publié en 2010 par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, les exactions n’ont pas cessé et aucune action significative, ni au niveau national ni au niveau international, n’a été entreprise pour enfin les endiguer, regrettent les prix Nobel.
« Les crises qui ravagent la RDC depuis plus de 30 ans sont entretenues par une impunité enracinée et un silence mondial persistant, menant au conflit le plus meurtrier depuis la seconde guerre mondiale, que l’on peut estimer à 6 millions de vies perdues ».
Les malheurs de la RDC sont ses ressources, pillées par des groupes armés soutenus par l’étranger et blanchies par l’intermédiaire des réseaux opaques du Rwanda vers les marchés mondiaux, « ce qui alimente la guerre et sape l’intégrité de la chaîne d’approvisionnement internationale ».
Plus de 100 groupes armés, plusieurs armées étrangères sont à l’action, la résurgence du M23, soutenu par le régime de Kigali, 4 000 soldats rwandais sont présents sur le terrain, tout cela a intensifié la crise.
En 2025, plus de 10 millions de Congolais, la population de la Belgique, vivent désormais dans la peur, sous occupation.
Silence mondial
« La réponse diplomatique reste au mieux timide, tandis que la communauté internationale a mobilisé sanctions et suspensions d’aides dans d’autres contextes de conflit, elle continue de tolérer l’agression illégale du Rwanda au Congo, qui constitue une violation manifeste de la Charte des Nations unies. La nature des actions du Rwanda en RDC ne diffère pas fondamentalement de celles de la Russie en Ukraine, ce qui pose de lourdes questions sur les doubles standards mondiaux et sur la valeur accordée à la vie des populations noires ».
Cette communauté internationale ne manque pourtant pas de raisons de s’impliquer:
• Plus de 26 millions de personnes font face à une faim sévère, 7,8 millions sont déplacées à l’intérieur du pays, 1,6 million d’enfants sont privés d’accès à l’éducation en raison de la destruction ou la fermeture des écoles (chiffres ONU).
• Entre janvier et février, les enfants représentent entre 35 % et 45 % des cas signalés de viols et violences sexuelles, environ 10 000 victimes, ou une victime toutes les 30 minutes (UNICEF).
Et la réponse humanitaire de l’ONU de 2025 n’est financée qu’à 8,2 %, des millions de personnes ne bénéficient pas d’une aide vitale, ce qui place la RDC en tête des crises les plus négligées au monde.
« La communauté internationale se doit d’agir, de manière décisive et sans délai, pour mettre fin aux souffrances du peuple congolais, faire respecter la justice internationale et protéger le droit de chaque nation à la souveraineté et à la paix », insistent les 75 Prix Nobel.
« Il faut enfin appliquer la résolution 2773 du Conseil de sécurité des Nations unies », qui comprend un cessez-le-feu immédiat et sans condition, le retrait des forces rwandaises du territoire congolais et la cessation de leur soutien au M23 sans condition préalable, et le démantèlement des administrations parallèles établies dans les zones occupées.
« Nous appelons à l’organisation d’une conférence internationale sur la paix afin de placer ce conflit oublié et négligé au sommet de l’agenda de la communauté internationale, en créant une plateforme de haut niveau pour un dialogue vers une paix globale, juste et durable en RDC ».
Les prix Nobel appellent aussi à ce que la justice soit au cœur de toute paix durable, ce que seul un tribunal international peut apporter en RDC, en s’appuyant notamment sur le rapport Mapping comme fondement.
« Il ne s’agit pas uniquement d’une question congolaise. C’est une question mondiale. Chaque smartphone, ordinateur portable ou véhicule électrique contient probablement des minerais venus de RDC. Nous avons tous un bout du Congo dans nos poches. Donc une responsabilité ».
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