Le « miracle » de Trump pour la paix en RDC

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Le « miracle » de Trump pour la paix en RDC
Le « miracle » de Trump pour la paix en RDC

Africa-Press – Congo Kinshasa. C’était l’événement le plus attendu de cette fin d’année. Après trois décennies de déchirures, de méfiances mutuelles, de guerres par procuration et de rivalités meurtrières qui ont ravagé l’est de la RDC, Kigali et Kinshasa ont décidé enfin de tourner la page. Jeudi 4 décembre, sous les dorures du siège de l’« Institut Donald Trump pour la paix », Félix Tshisekedi et Paul Kagame ont paraphé, devant les caméras du monde entier, les Accords de Washington, un pacte présenté comme le socle d’une paix durable et d’une intégration économique sans précédent entre les deux pays.

Ce moment solennel, scruté par toute la région des Grands Lacs, a été dominé par un homme: Donald Trump. Redevenu maître absolu de la scène, le président américain s’est placé au centre de la dramaturgie, livrant un discours spectaculaire, parfois emphatique, mais empreint de détermination et d’espoir. Devant les deux chefs d’État africains, Trump a martelé qu’un « miracle » était possible, alors même que la méfiance restait perceptible, y compris sur scène, où Kagame et Tshisekedi ne se sont ni salués, ni regardés.

– Trump, l’homme du moment: “Nous réussissons là où tant d’autres ont échoué –

Dès les premières minutes, Donald Trump a donné le ton. Il a décrit sans détour l’ampleur du drame humain qui ravage l’est du Congo. « Depuis plus de 30 ans, l’un des pires conflits au monde fait rage dans l’est du Congo. Des millions et des millions de personnes ont été tragiquement tuées. D’innombrables familles ont été détruites ».

Il a ensuite taclé, avec son style habituel, les administrations américaines qui l’ont précédé déclenchant quelques sourires gênés avant de souligner que Washington a « essayé, mais accompli très peu » pour mettre fin au carnage. Puis, dans un contraste assumé, il a revendiqué son propre succès. « Aujourd’hui, nous réussissons là où tant d’autres ont échoué. C’est devenu la huitième guerre à laquelle nous avons mis fin en moins d’un an ».

Trump a présenté les Accords de Washington comme l’aboutissement d’un processus engagé en juin, grâce notamment au secrétaire d’État Marco Rubio et à l’émissaire Massad Boulos. Il a insisté sur le caractère « historique » du pacte notamment le cessez-le-feu permanent, le désarmement des groupes armés, la justice pour les atrocités, le retour des réfugiés et l’ouverture économique.

Mais surtout, Trump a voulu projeter une vision optimiste, presque messianique. « Il y a une richesse énorme dans cette belle terre, une terre magnifique mais longtemps tachée de sang. Ce que nous faisons aujourd’hui va créer un avenir bien meilleur pour les peuples du Congo et du Rwanda ».

Et puis vint l’un des passages les plus commentés de son allocution, mélange de naïveté assumée et de showmanship trumpien. « Je pense que ces deux dirigeants vont passer beaucoup de temps à se donner des accolades et à se tenir la main. Ils se sont beaucoup aimés, même s’ils ont passé beaucoup de temps à… s’entretuer ». La salle a retenu son souffle. Ni Tshisekedi ni Kagame n’ont souri. Trump, lui, a poursuivi, comme si de rien n’était.

“Un grand miracle”: la promesse américaine

Le mot a fait le tour des médias quelques minutes à peine après le discours. « Ce sera un grand miracle. Vous allez voir les choses évoluer rapidement. Beaucoup pensaient cela impossible ». Cette vision quasi prophétique tranche avec la réalité du terrain: combats sporadiques, groupes armés encore actifs, populations traumatisées. Mais Trump a voulu incarner l’assurance, la garantie américaine, la certitude que la paix est possible et que les États-Unis accompagnent désormais un nouveau cycle historique.

L’homme fort de la Maison blanche a également annoncé la signature parallèle d’accords bilatéraux entre Washington, Kinshasa et Kigali, notamment pour l’accès américain aux minéraux critiques, un enjeu stratégique majeur. « Cela ouvrira de nouvelles opportunités pour les États-Unis, mais aussi des avantages économiques pour tous ».

Kagame: une reconnaissance calculée et un avertissement

Le président rwandais a livré un discours précis, plus technique, ponctué de remerciements, dont un particulièrement appuyé envers… Donald Trump. « Personne ne lui demandait de se saisir de cette tâche. Notre région est loin des gros titres. Mais lorsqu’il a vu l’opportunité de contribuer à la paix, il l’a saisie immédiatement ».

Kagame a présenté les accords comme « la feuille de route la plus claire et la plus précieuse jamais obtenue », insistant sur leur dimension économique et leur potentiel à transformer la région. Mais il a aussi, subtilement, replacé la responsabilité sur les épaules africaines. « Si cet accord échoue, la responsabilité ne reviendra pas au président Trump, mais à nous. Il y aura des hauts et des bas, c’est certain ». Un message adressé à Washington, mais aussi et surtout à Kinshasa.

Tshisekedi: un tournant historique mais une vigilance ferme

Le président congolais, lui, a parlé d’un ton grave. « Les Accords de Washington ne sont pas un document de plus. Ils représentent un tournant ». Il a rappelé les souffrances congolaises, la lassitude d’un peuple pris en otage par les groupes armés, et a insisté sur l’engagement de la RDC. « La RDC mettra en œuvre toutes ses obligations avec sérieux et rigueur. Nous espérons que le Rwanda fera preuve du même sérieux ».

Tshisekedi a été direct: plus question de soutien aux groupes négatifs, plus question de duplicité. Et il a conclu sur une note de responsabilité collective. « Ce jour marque le début d’un nouveau chemin. Un chemin exigeant, difficile, mais porteur de paix ».

Malgré les grands discours, une image a frappé les observateurs. Aucune poignée de main, aucun regard échangé entre Kagame et Tshisekedi. Devant Trump, devant les chefs d’État africains présents (William Ruto, João Lourenço, Évariste Ndayishimiye…), les deux hommes ont gardé une distance studieuse, presque chirurgicale. Cette froideur n’est pas un détail. Elle dit la vérité du moment: les mots ont été prononcés, les engagements signés, mais la confiance n’existe pas.

Le Rwanda et la RDC portent 30 ans de guerre, d’accusations croisées, d’opérations clandestines, de discours hostiles. La paix vient de loin, et ne tient aujourd’hui qu’à un fil ou plutôt, qu’au poids politique de Washington. Trump le sait, et c’est probablement pourquoi il a tant insisté sur l’idée de miracle, de transformation, d’avenir radieux. Comme pour remplir le vide laissé par l’attitude glacée des deux protagonistes africains.

un pari américain, un défi africain

Ce 4 décembre 2025 restera comme une date majeure dans l’histoire de la RDC. Trump a imposé sa marque, son style, son énergie. Kagame a reconnu une opportunité géopolitique. Tshisekedi a assumé un tournant diplomatique majeur. Mais la paix, elle, reste un chantier herculéen. Les mots sont posés. Les engagements sont écrits. La scène mondiale applaudit. Il reste désormais à voir si, derrière les projecteurs de Washington, les armes se tairont vraiment dans les collines du Nord et Sud-Kivu. Donald Trump promet un miracle. L’Afrique, elle, attend la preuve.

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