Comment retrace-t-on l’histoire tectonique grâce aux sédiments ?

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Comment retrace-t-on l’histoire tectonique grâce aux sédiments ?
Comment retrace-t-on l’histoire tectonique grâce aux sédiments ?

Africa-PressCongo Kinshasa. Les reliefs que nous observons tout autour de nous témoignent de l’histoire tectonique de la Terre : de la fragmentation des continents avec l’ouverture des océans, jusqu’aux collisions continentales et la création de chaînes de montagnes, la Terre a ainsi connu plusieurs grands cycles tectoniques. Mais comment observe-t-on le passé ? Comment démêler des événements s’étalant sur des millions d’années et se superposant les uns aux autres ? Pour reconstruire l’évolution tectonique d’une région, les sédiments apparaissent comme des marqueurs essentiels.

Un processus majeur a lieu en continu sur Terre, depuis des milliards d’années. Il s’agit du processus de sédimentation. Le dépôt de sédiments se forme par accumulation de particules sédimentaires de taille et de nature extrêmement variables, issues généralement de l’érosion des roches ou de l’évaporation. Il a lieu partout, en tout point du globe : au fond des océans, dans les lits des rivières, sur les plages… Dès lors que des grains se déposent et s’accumulent, il y a sédimentation, qu’ils soient transportés par l’action de l’eau ou du vent, qu’il s’agisse de grains de sable, de galets ou de coquillages.

Les sédiments, archives du passé

Le processus de dépôt sédimentaire est simple : les particules s’accumulent dans des bassins (des bas topographiques), de façon plane et horizontale, formant des couches successives. On parle de strates sédimentaires. Les différentes strates sont marquées par des changements dans les conditions de dépôt : modification de l’environnement (profondeur, température…), modification de la source des sédiments, modification de la granulométrie… Progressivement, les strates vont se compacter et si rien ne vient perturber le système de dépôt, le processus continue, à une vitesse extrêmement variable, jusqu’à remplissage total du bassin sédimentaire. On peut ainsi aller jusqu’à des accumulations de plusieurs kilomètres de sédiments. Plusieurs millions d’années peuvent séparer les strates situées à la base du bassin des sédiments les plus superficiels. Le processus de sédimentation représente ainsi une formidable archive de l’histoire de la Terre. De ce fait, ils sont susceptibles d’enregistrer un grand nombre d’événements qui viendraient perturber leur organisation linéaire ou l’environnement de dépôt.

Comment sont enregistrés les événements tectoniques dans les sédiments ?

Les événements tectoniques, en particulier, sont capables d’altérer l’organisation des dépôts sédimentaires, modifiant ainsi leur architecture. Les mouvements tectoniques peuvent être de plusieurs natures : compressifs ou extensifs, soulèvement ou subsidence. Ces mouvements engendrent des modifications de contraintes dans les roches, et spécifiquement dans les sédiments préalablement déposés, induisant des déformations dans les strates. C’est ainsi que l’on peut observer des plissements ou des décalages associés au développement de failles.

Comment observer un événement tectonique dans des sédiments ?

Pour observer des déformations dans les sédiments, encore faut-il y avoir accès. L’enregistrement sédimentaire peut être accessible suivant deux méthodes, principalement : l’étude géologique directe d’un affleurement et l’observation de coupes sismiques (méthode indirecte).

Pour pouvoir être étudiés directement, les sédiments précédemment enfouis ont dû subir un processus d’exhumation et de mise à l’affleurement par les forces tectoniques ou les processus érosifs. C’est ce qu’il se passe par exemple dans le cas de la collision de masses continentales et la formation de chaînes de montagnes, où des sédiments précédemment déposés au fond de l’océan ou dans des bassins d’avant-pays peuvent se retrouver charriés sur des centaines de kilomètres pour finalement être observés de nos jours sur des sommets montagneux.

L’avantage de l’observation directe est qu’elle donne accès à la vraie géométrie des sédiments, à l’épaisseur des strates et à leur composition.

L’étude peut être très fine et détaillée. Le désavantage est que lors de leur mise à l’affleurement, les roches sédimentaires peuvent subir de nouvelles déformations tectoniques et modifications lithologiques comme le métamorphisme, qui vont graduellement se sur-imprimer les unes aux autres. Si l’étude porte sur un événement tectonique antérieur à la collision continentale par exemple, il sera difficile (mais pas impossible) de démêler les divers épisodes tectoniques ayant déformé les sédiments par la suite. L’étude de coupes sismiques permet quant à elle l’accès à l’architecture sédimentaire in situ. Cette technique permet d’imager les strates sédimentaires encore enfouies et en place et donc d’avoir potentiellement accès à la déformation primaire. Le désavantage est qu’il s’agit d’une méthode indirecte et que les informations obtenues dépendent fortement des paramètres d’acquisition. Elle ne permet notamment pas la connaissance de la composition des roches.

Comment dater des événements tectoniques ?

Une fois les observations réalisées et les déformations d’origine tectoniques identifiées, il est possible de dater les différents événements ayant eu lieu. Cette datation peut se faire de manière absolue, par datation des strates au carbone 14, datation uranium/thorium… ou grâce à la présence de fossiles. Elle peut également se faire de manière relative : dans ce cas, on observe l’enchaînement des événements tectoniques en regardant avec précision l’architecture et la géométrie des strates les unes par rapport aux autres.

Par exemple, pour chaque faille, il est possible de définir quels sont les sédiments pré-tectoniques (déposés avant le développement de la faille), les sédiments syn-tectoniques (qui se déposent durant le développement de la faille) et les sédiments post-tectoniques (qui se déposent après le développement de la faille). Les sédiments pré-tectoniques sont ainsi clairement recoupés par la faille, les sédiments syn-tectoniques montrent des architectures complexes comme des formes en éventail et les sédiments post-tectoniques scellent la faille, ils ne sont donc pas déformés.

L’observation des différents événements tectoniques imprimés dans les sédiments ainsi que leur nature permet ainsi de retracer finement l’histoire tectonique d’une région.

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