Premières Traces De Zoonoses Dans L’Histoire

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Premières Traces De Zoonoses Dans L'Histoire
Premières Traces De Zoonoses Dans L'Histoire

Africa-Press – Congo Kinshasa. Lors de la révolution néolithique, les chasseurs-cueilleurs ont peu à peu laissé la place à des éleveurs et des agriculteurs. Cette transition a eu des conséquences, notamment sur les maladies mais nous n’en avions pas encore de preuves directes.

Une étude publiée le 9 juillet 2025 dans la revue Nature explore pour la première fois plus de 200 pathogènes (214 précisément !) grâce à l’ADN de 1300 individus ayant vécu en Eurasie au fil des âges, jusqu’à 37.000 ans en arrière. “Nous avons récupéré des preuves directes d’infections microbiennes passées, ce qui a permis la reconstruction de génomes pathogènes anciens complets”, évoquent les chercheurs dans l’étude.

Cette discipline, à la croisée entre la génomique et la paléoarchéologie, porte le nom de paléoépidémiologie: les scientifiques ont étudié les traces des infections laissées sur les ossements pour étudier le génome des pathogènes. Ils n’ont néanmoins pas pu remonter à des pathogènes dont les traces infectieuses sont plus discrètes comme la tuberculose ou n’ont pas tenu l’épreuve du temps comme l’ARN des virus.

Mais ils fournissent la preuve que la cohabitation entre animaux et humains a entraîné la propagation de nouvelles maladies: les zoonoses. C’est le cas du Covid-19, mais aussi de manière plus lointaine, la peste ou bien la lèpre ! Et elles sont loin d’avoir disparu: ces zoonoses représentent plus de 60% des nouvelles maladies infectieuses émergentes.

Taux de détection de maladies zoonotiques et humaines. Les premières épidémies démarrent avec certitude il y a environ 6 500 ans. Crédits: Martin Sikora, Elisabetta Canteri, Antonio Fernández-Guerra et al., Nature, 2025.

Des pasteurs venus de la steppe ont propagé les zoonoses

“Bien que des cas zoonotiques aient probablement existé avant 6500 ans, le risque et l’ampleur de la transmission zoonotique ont probablement augmenté avec l’adoption généralisée des pratiques d’élevage et du pastoralisme”, précisent les auteurs.

A partir de ces trouvailles, les chercheurs ont relié la propagation de ces agents pathogènes aux migrations pastorales depuis la steppe eurasienne, il y a 5000 ans. “Les pasteurs des steppes, par leur exposition continue aux animaux, ont développé une certaine immunité aux zoonoses”, évoque l’article de recherche. Mais en se déplaçant dans d’autres régions, ces pasteurs ont pu transporter ces pathogènes. Résultat: des vagues épidémiques de maladies zoonotiques et un bouleversement génétique en Europe.

Les infections ont ainsi exercé des pressions sélectives sur certains gènes permettant de mieux lutter contre ces pathogènes à partir de l’âge du bronze, il y a 4500 ans, comme le montre une étude parue en 2023 dans la revue Cell Genomics. Mais cela a aussi entraîné d’autres problèmes de santé, comme des maladies auto-immunes, où le système immunitaire s’attaque aux cellules saines du corps.

Le cas de la peste et de la lèpre

Les chercheurs remontent l’histoire de plusieurs pathogènes en croisant preuves archéologiques et récits historiques. Par exemple, la peste est signalée pour la première fois avec trois cas, entre 5700 et 5300 ans, dans l’est de l’Eurasie. Un premier pic est signalé il y a 5000 ans puis la maladie est signalée fréquemment jusqu’à une explosion de cas lors des premières pandémies de peste documentées, probablement celle de Justinien, puis la prochaine qui décima l’Europe au Moyen Age… Yersinia pestis a commencé à évoluer durant l’Antiquité, avec des gènes lui permettant d’améliorer la transmission de la bactérie par les puces en restant plus longtemps dans le système digestif de l’insecte.

Carte spatio-temporelle de quatre agents pathogènes humains, la peste en haut à gauche, la fièvre récurrente en haut à droite, la leptospirose en bas à gauche et la yersiniose en bas à droite. Crédits: Martin Sikora, Elisabetta Canteri, Antonio Fernández-Guerra et al., Nature, 2025.

Pour la lèpre, les premiers cas documentés remontent à la fin de l’âge du fer, il y a environ 1400 ans, en Scandinavie. Une époque où le commerce de la fourrure d’écureuil, animal réservoir de Mycobacterium leprae, était en plein essor. Stigmatisante, la maladie a entraîné des mises à l’écart brutales des malades dans les siècles qui ont suivi.

Ces résultats, au-delà de leur intérêt historique, pourraient aider à concevoir de nouveaux vaccins et à mieux comprendre comment les mutations de certains agents infectieux ont fonctionné autrefois — et comment elles pourraient réapparaître demain.

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