Start-Up Africaines Réinventent la Formation Professionnelle

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Start-Up Africaines Réinventent la Formation Professionnelle
Start-Up Africaines Réinventent la Formation Professionnelle

Africa-Press – Djibouti. Alors que les systèmes éducatifs africains ont du mal à répondre à une demande croissante de formation professionnelle, un nouveau réseau d’acteurs privés s’impose. Start-up EdTech, bootcamps intensifs et incubateurs forment une alternative agile, connectée aux besoins des jeunes et des entreprises.

L’Afrique subsaharienne accueille l’une des populations les plus jeunes au monde. Selon l’UNESCO (Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture), plus de 11 millions de jeunes Africains arrivent chaque année sur le marché du travail. Or, le système éducatif formel ne parvient pas à leur offrir une formation adéquate. En 2022, l’organisation estimait que moins de 10 % des jeunes accèdent à l’enseignement supérieur dans la région. Pire, même les diplômés peinent à trouver un emploi, tant la formation est déconnectée des besoins économiques actuels.

La multiplication des EdTech africaines

Face à ce déficit, de nombreuses start-up EdTech (éducation + technologie) locales ont émergé. Elles sont souvent portées par des entrepreneurs formés à l’étranger ou dans des incubateurs africains.

Au Nigeria, la start-up uLesson propose des cours interactifs alignés sur les programmes nationaux via une application mobile. En 2023, elle comptait plus de 3 millions d’utilisateurs, selon TechCrunch.

En République démocratique du Congo, Schoolap distribue des contenus pédagogiques numériques adaptés au système congolais, avec une pénétration dans plus de 1000 écoles partenaires.

En Côte d’Ivoire, la plateforme Etudesk mise sur des parcours courts et certifiants, orientés vers des métiers tels que la logistique, le marketing digital ou le développement web. Toutes ces initiatives poursuivent le même objectif: combler rapidement les lacunes techniques sans imposer un cursus universitaire long.

Bootcamps: la formation intensive pour l’emploi

Inspirés de modèles nord-américains, les bootcamps africains forment en quelques mois aux métiers tech les plus recherchés. La Moringa School, fondée en 2014 au Kenya, prépare depuis plus de 10 ans des diplômés du secondaire et de l’université aux métiers d’ingénieur logiciel et de data scientist. Selon le rapport d’impact de 2023, elle a formé plus de 4000 étudiants, avec un taux d’insertion professionnelle supérieur à 85 % six mois après la fin des programmes, ce qui en fait un acteur majeur du secteur.

En Afrique de l’Ouest, des initiatives locales émergent avec la même ambition. Au Bénin par exemple, la start-up BloLab organise des bootcamps intensifs en programmation, cybersécurité et électronique embarquée, tout en favorisant l’inclusion des jeunes défavorisés. Elle forme également à l’entrepreneuriat numérique à travers ses espaces d’innovation à Cotonou et Parakou.

Au Sénégal, Sonatel Academy, initiative portée par l’opérateur télécom Orange, propose des parcours gratuits en développement web et mobile, avec une pédagogie basée sur les projets, le travail en groupe et l’acquisition de soft skills.

Ces bootcamps misent sur la pédagogie active, les projets concrets et les compétences transversales, en rupture avec l’enseignement magistral traditionnel.

Au-delà des compétences techniques, plusieurs incubateurs africains intègrent une dimension formation à leurs programmes d’accompagnement. Au Niger, le CIPMEN (Centre incubateur des petites et moyennes entreprises au Niger), pionnier dans le Sahel, propose aux jeunes entrepreneurs des modules de gestion, stratégie ou marketing digital, en partenariat avec l’Agence française de développement (AFD) et la Banque africaine de développement. À Abidjan, Impact Hub anime des formations thématiques sur le business model ou le pitch investisseur, en collaboration avec des ONG et des institutions locales.

Ces structures participent à la montée en compétence d’un vivier de jeunes créateurs d’entreprise, tout en promouvant une culture de l’autonomie économique.

Une réponse plus agile au marché du travail

Malgré sa fragmentation à l’échelle du continent, ce nouvel écosystème éducatif se distingue par son agilité. Les programmes sont souvent révisés en fonction des évolutions du marché et impliquent des entreprises dès la conception des contenus. En outre, ces formations sont généralement plus abordables que l’université, voire gratuites grâce à des bourses ou des financements externes.

« Les formations numériques sont un levier puissant pour surmonter les obstacles à l’emploi, en offrant des parcours adaptés aux besoins du marché et accessibles à un large public », rappelait Julie Owono, experte en innovation éducative, dans une interview accordée à l’Observatoire ouvert des interférences réseau (OONI) en 2021.

Vers une complémentarité avec le système public

Loin d’un affrontement entre privé et public, certaines passerelles émergent. Depuis quelques années, Simplon Afrique collabore avec des universités publiques pour intégrer des modules pratiques dans les cursus classiques. Des gouvernements, comme celui du Rwanda, soutiennent l’intégration des EdTech dans les programmes nationaux, via des politiques d’incubation ou des appels à projets.

Cette convergence progressive laisse entrevoir un nouveau modèle éducatif hybride, combinant la stabilité du cadre académique et la réactivité des acteurs innovants. Cependant, pour que cette complémentarité soit durable, il est essentiel de renforcer les partenariats publics-privés autour de la co-conception des programmes et de la reconnaissance officielle des certifications délivrées par les start-up EdTech. Par ailleurs, le développement d’infrastructures numériques accessibles et d’un cadre réglementaire clair favorisera l’extension de ces initiatives à grande échelle, garantissant ainsi une meilleure inclusion des jeunes sur le marché du travail.

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