Pourquoi l’inflation alimentaire ne ralentit pas en Afrique

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Pourquoi l’inflation alimentaire ne ralentit pas en Afrique
Pourquoi l’inflation alimentaire ne ralentit pas en Afrique

Africa-Press – Djibouti. C’est une tendance au niveau mondial qui tarde à trouver de l’écho sur le continent. Début mars, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) s’est félicitée de la baisse, pour le onzième mois consécutif, de l’indice de référence des prix internationaux des produits alimentaires. Cette évolution positive, qui s’explique par le fait que la baisse des cours des huiles végétales et des produits laitiers a plus que contrebalancé la hausse des prix du sucre, n’est toutefois pas visible dans toutes les régions du monde, et notamment en Afrique.

« Bien que l’Indice FAO ait quelque peu fléchi ces derniers mois, l’inflation des prix intérieurs des denrées alimentaires a atteint des niveaux prohibitifs dans de nombreux pays », a repris l’institution, citant trois exemples africains. « Les prix des céréales secondaires au Ghana en janvier avaient grimpé de 150 % en un an et les prix des céréales n’avaient jamais été aussi élevés au Malawi et en Zambie », a ainsi pointé la FAO.

Frémissement en Afrique de l’Ouest
Un constat largement partagé sur le continent. Au Maroc, l’envolée des tarifs des fruits et légumes a entretenu l’inflation des produits alimentaires, l’indice des prix ayant augmenté de 1,4 % entre décembre 2022 et janvier 2023 et de 16,8 % sur un an entre janvier 2022 et 2023. En Algérie, alors que l’exécutif vient d’annoncer des mesures anti-inflation avant le début du ramadan, les prix des biens alimentaires ont crû de 2,5 %, bien plus que l’indice général des prix à la consommation (+1,4 %) entre la fin de 2022 et le début de 2023. Dans la plupart des autres économies – de l’Éthiopie à l’Égypte, en passant par le Nigeria ou encore l’Angola –, le même maintien de la poussée inflationniste s’observe.

Et, si un frémissement est observé en Afrique de l’Ouest, il demeure très modeste. Bien que le taux d’inflation dans l’Union ait commencé à baisser – passé de 7 % en décembre 2022 à 6 % en janvier 2023 –, il reste encore à un niveau élevé, a exposé la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) début mars. « La baisse observée a été notamment soutenue par les bons résultats de la campagne agricole 2022-2023, ainsi que par les mesures de politique monétaire prises par la Banque centrale et les efforts des États pour lutter contre la vie chère, a-t-elle souligné. Toutefois, le taux d’inflation est ressorti supérieur à 7 % en janvier 2023 dans plusieurs pays de l’Union. »

LES CRISES ÉCONOMIQUES ET MONÉTAIRES AINSI QUE SÉCURITAIRES JOUENT AUSSI CONTRE LE MOUVEMENT GLOBAL

« L’inflation en Afrique devrait diminuer légèrement pour atteindre 13,5 % en 2023 et tomber à 8,8 % en 2024, en dessous des 9,1 % d’avant la pandémie de Covid-19, en 2019, et de la moyenne de 9,6 % observée entre 2014 et 2018, grâce aux efforts continus pour maîtriser les effets de l’inflation importée », a prédit la Banque africaine de développement (BAD) dans ses perspectives publiées en janvier. « Cependant, l’inflation élevée pourrait perdurer, reflétant la persistance des perturbations des chaînes d’approvisionnement et les hausses associées des prix des matières premières. »

Poids des importations
Les crises économiques et monétaires – comme au Nigeria et au Ghana – ainsi que sécuritaires – comme au Mali ou au Burkina Faso – jouent aussi contre le mouvement global de tassement de l’inflation. « Depuis le début de l’année, la situation sur les marchés est particulièrement inquiétante au Burkina Faso, avec des hausses de prix mensuelles de plus de 100 %, notamment dans les zones confrontées à des problèmes de sécurité », a pointé la FAO dans son dernier bulletin Afrique de l’Ouest et centrale daté de mars. Toujours dans ce pays, les prix des céréales de base ont bondi par rapport à la moyenne des cinq dernières années : sorgho (+71 %), maïs (+65 %), millet (+51 %), riz local (+17 %) et riz importé (+15 %).

Des facteurs plus structurels, tenant aux caractéristiques des économies africaines, entrent également en jeu. La forte dépendance aux importations alimentaires, le poids du poste alimentation dans le budget des ménages du continent, la variation du taux de change des monnaies locales ont un impact considérable sur l’évolution des prix des produits de consommation de base, dans certains cas plus fort que l’effet de la variation mondiale des prix, comme l’a montré une étude réalisée par le Fonds monétaire international (FMI) et publiée en juillet 2022*.

« Même si le choc global est temporaire, le pic d’inflation alimentaire et énergétique peut avoir un impact significatif et durable sur les perspectives de hausse de prix – une variable clé qui est difficile à évaluer dans la plupart des pays africains », a rappelé le FMI dans une note consacrée à la lutte contre l’inflation en Afrique subsaharienne diffusée en octobre 2022, en marge de la publication de ses perspectives économiques pour la zone. Résultat : le continent va devoir être patient alors que les analystes ne s’attendent à un réel ralentissement de l’inflation qu’à partir du second semestre de cette année.

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