À Djibouti, des législatives sans surprise ?

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À Djibouti, des législatives sans surprise ?
À Djibouti, des législatives sans surprise ?

Africa-Press – Djibouti. Les Djiboutiens votent ce 24 février pour renouveler les 65 députés qui siègeront, pour les cinq années à venir, sur les bancs de l’Assemblée nationale. La coalition regroupée sous la bannière verte de l’Union pour la majorité présidentielle (UMP) entend faire au moins aussi bien que les 57 sièges raflés en 2018, dans la foulée de la victoire du chef de l’État Ismaïl Omar Guelleh (IOG), réélu pour un cinquième mandat en avril 2021.

Face au camp présidentiel, l’opposition reste divisée, entre ceux qui se présentent, ceux qui ne sont pas autorisés à le faire et ceux qui appellent au boycott. Difficile dans ces conditions d’imaginer les adversaires d’IOG obtenir davantage que les 8 députés élus lors des précédentes législatives. La campagne électorale, qui a débuté le 10 février n’a pas changé la donne, au regard surtout de la très forte différence de moyens entre l’UMP et ses concurents.

Forte de ses capacités humaines et financières, la coalition présidentielle regroupe, outre le parti du président, le Rassemblement populaire pour le progrès (RPP), le Front pour la restauration de l’unité et de la démocratie (Frud), le Parti populaire social-démocrate (PSD) et l’Union des partisans de la réforme (UPR). C’est aussi la seule formation politique à présenter un candidat pour chacun des 65 sièges (Djibouti-ville : 35 députés ; Dikhil : 11 députés ; Tadjourah : 6 députés ; Ali-Sabieh : 6 députés ; Arta : 3 députés ; Obock : 4 députés).

Ses candidats ne feront face à aucun opposant en dehors des circonscriptions de la capitale et d’Arta, engrangeant donc 27 sièges avant même la tenue du vote, soit 41 % de la composition de la future Assemblée. Constituée en 2003 autour de la personnalité d’IOG, l’UMP a remporté toutes les élections organisées dans le pays depuis cette date, détenant même l’ensemble des sièges jusqu’en 2013.

L’opposition divisée et clairsemée

Cette année-là, l’opposition avait réussi l’exploit – jamais renouvelé depuis – de se rassembler au sein de l’Union pour le salut national (USN) lors les élections législatives. Elle n’avait remporté que 10 sièges, mais ses candidats avaient rassemblé 36 % des votes exprimés, ce qui avait été suffisant pour pousser la coalition au pouvoir à engager des négociations aboutissant, l’année suivante, à la définition d’un accord-cadre, jamais vraiment suivi d’effet.

Cela avait provoqué la déception au sein de l’opposition, puis de nouvelles tensions entre ses différents courants qui refusent depuis toute nouvelle union sacrée. « L’opposition se désolidarise », résume Ilaya Hared, leader de l’Union pour la démocratie et la justice (UDJ), seul parti à présenter cette année des candidats face à l’UMP, dans l’ensemble des circonscriptions de la capitale, ainsi que dans son fief d’Arta.

Présent en 2018, le Centre démocrate unifié (CDU) a bien tenté de concourir à Ali-Sabieh, mais il s’est fait recaler par le ministère de l’Intérieur. Tout comme l’Alliance républicaine pour le développement (ARD) et le Parti djiboutien pour le développement (PDD), également présents il y a cinq ans et qui s’étaient alliés cette année avec le Parti national démocratique (PND) au sein de l’Alliance des mouvements pour l’alternance démocratique (Amad). Il semblerait que les deux camps ont été dans l’impossibilité de débourser les 500 000 francs djiboutiens (plus de 2 600 euros) nécessaires à l’inscription de chaque candidat. Certains d’entre eux n’auraient également pas été autorisés à participer au scrutin du fait de leur double nationalité.

Difficile dans ce contexte d’imaginer autre chose qu’un nouveau raz-de-marée de l’UMP. Ilaya Hared espère voir l’UJD conserver ses 7 sièges dans la capitale et réussir le grand chelem sur Arta. L’essentiel, pour la fille d’Ismaël Guedi Hared, ex vice-président de l’USN décédé en 2015, semble avant tout de conserver le statut officiel de cheffe de l’opposition qu’elle détient depuis 2018, ainsi que la deuxième place pour son parti dans l’hémicycle.

La coalition au pouvoir bien présente

Les grands absents de ce scrutin sont à chercher chez les principaux opposants. Faute de moyens financiers, Omar Elmi Khaireh, président du CDU et candidat de l’USN à la présidentielle de 2016, ainsi que Cassim Ali Dini, président de l’ARD et fils de Ahmed Dini Ahmed, premier Premier ministre de Djibouti indépendant, n’ont pu se présenter.

Autre absent de marque : Daher Ahmed Farah, rentré au pays en décembre 2022, après plus de cinq années passées en Belgique. Celui que tout le monde appelle « DAF » n’est toujours pas autorisé à participer à ces élections à cause justement de sa double nationalité. L’ancien porte-parole de l’USN et patron du Mouvement pour le renouveau démocratique (MRD) passe donc une nouvelle fois son tour, avec déjà un œil sur la présidentielle de 2026.

Enfin, Abdourahman Mohamed Guelleh, dit « TX », a lui appelé au boycott. Ancien secrétaire général de l’USN et président depuis 2016 du Rassemblement pour l’action, la démocratie et le développement écologique (Radde), il préfère pour l’instant sillonner les quartiers pour renforcer la base militante qui lui avait permis de remporter la mairie de Djibouti-ville en 2012.

Côté UMP, seule l’absence de l’actuel président de l’Assemblée nationale, Ali Mohamed Houmed, interroge. Outre le chef de file de la majorité présidentielle, le Premier ministre Abdoulkader Kamil Mohamed, lui-même candidat à Djibouti-Ville, deux autres membres du gouvernement vont tenter de conserver leur mandat : le ministre de l’Économie, Ilyas Moussa Dawaleh. Son collègue des Affaires étrangères, Mahamoud Ali Youssouf, qui concourt pour la première fois, aurait, selon les observateurs, la primature en ligne de mire.

Les principaux responsables des partis alliés au RPP sont également en lice, comme Ali Mohamed Daoud, le président du Frud, et Abdourahman Mohamed Allaleh, leader du PND. À leurs côtés se trouve aussi l’ex-Premier ministre, de 2001 à 2013, Dileita Mohamed Dileita, accompagné de son ancien ministre et porte-parole, Ali Abdi Farah. À noter la présence de Safia Elmi Djibril, doyenne des députées, élue depuis 2008 dans l’un des quartiers populaires de la capitale, et que certains verraient bien un jour être la première djiboutienne à occuper le perchoir.

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