Ces plus vieux eucaryotes planctoniques constituent une découverte majeure dans l’histoire de la vie

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Ces plus vieux eucaryotes planctoniques constituent une découverte majeure dans l'histoire de la vie
Ces plus vieux eucaryotes planctoniques constituent une découverte majeure dans l'histoire de la vie

Africa-Press – Djibouti. Un bond de 1,5 milliard d’années en arrière : en 2010, la revue Nature annonçait la découverte, au Gabon, de fossiles vieux de plus de deux milliards d’années qui feraient remonter beaucoup plus loin qu’on ne le pensait l’apparition de la vie sous une forme complexe. Ces fossiles, de plusieurs formes, étaient en effet trop grands pour appartenir à des organismes unicellulaires et les scientifiques, menés par le géologue Abderrazak El Albani de l’Institut de chimie des milieux et matériaux de l’Université de Poitiers et du CNRS, en concluaient qu’il s’agissait là d’organismes multicellulaires eucaryotes, ce qui signifie que leurs cellules sont dotées d’un noyau contenant un ADN. Auparavant, les plus anciennes traces d’organismes complexes identifiées remontaient à la faune de l’Ediacara, vieille d’environ 570 millions d’années.

Confirmation et nouvelles trouvailles

Une telle annonce a évidemment suscité de nombreuses réactions, dont beaucoup de méfiance. Mais les chercheurs ont continué à fouiller le gisement gabonais de Moulendé, situé dans le bassin de Franceville, qui est une ancienne carrière de grès. Ces campagnes ont abouti à la découverte de centaines de spécimens parfaitement conservés qui ont été examinés sous toutes les coutures. Une publication en 2014 dans la revue PLOS ONE a mis fin au débat : les fossiles du Gabon sont bien les restes de créatures organiques eucaryotes, les “Gaboniontas” qui vivaient en grandes colonies sur les hauts-fonds marins plats, il y a 2,1 milliards d’années.

“Ces premiers articles étaient basés sur l’analyse de fossiles de différentes formes et ils traitaient beaucoup de leur morphologie et un tout petit peu de leur chimie” explique, à Sciences et Avenir, Abderrazak El Albani. Le scientifique annonce ce 2 mai 2023, dans la revue Earth Planetary Sciences Letter, l’identification d’une nouvelle forme de vie ancestrale : des protistes eucaryotes (des organismes unicellulaires) qui vivaient à la même époque mais cette fois dans la colonne d’eau, comme le plancton actuel. Les plus gros mesurent jusqu’à 4,5 cm de diamètre et “pour ceux-là nous avons pu établir de façon très précise leur métabolisme grâce au zinc qui est un micronutriment bio-essentiel, indispensable à la synthèse des protéines des eucaryotes”, souligne le chercheur.

Des lentilles qui coulent

Le zinc se décline en 2 isotopes dont le plus léger domine à l’intérieur des cellules. Grâce à des analyses de micro-fluorescence X menées au synchrotron-Soleil de Paris-Saclay, il a été possible de retracer la répartition, à l’échelle nanoscopique, du zinc à l’intérieur de ces spécimens ainsi que sa concordance avec les structures organiques. “De plus, nous avons pu déterminer que la taille des fossiles augmente en fonction de la concentration de zinc, c’est-à-dire du flux d’eau” précise Abderrazak El Albani.

Enfin, des analyses en micro-tomographie aux rayons X ont permis de déterminer leur forme : des sortes de grosses lentilles avec une compartimentalisation interne, ce qui confirme leur origine biologique. Au cours de leur vie, ces protistes agrégeaient de petites et fines particules d’argile qui les alourdissaient au point que quand leur densité était trop importante ils coulaient et se déposaient sur les fonds marins, ce qui explique qu’on les retrouve sur une grande variété de surfaces.

Comme pour les eucaryotes multicellullaires, les plus anciens protistes unicellulaires planctoniques étaient jusqu’à présent ceux de la faune d’Ediacara, à 570 millions d’années. Une datation qui semblait également correspondre aux estimations faites en se servant de l’horloge moléculaire qui permet de déterminer pour deux espèces données l’époque à laquelle a vécu leur ancêtre commun. “Cette étude fait bouger le curseur mais il faut rappeler que ces calculs ne sont qu’une modélisation et que la réalité, la vie, est beaucoup plus complexe que ça” conclut Abderrazak El Albani.

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