Africa-Press – Djibouti. Une nouvelle molécule porteuse d’espoir dans plusieurs maladies – à la fois l’obésité et l’ostéoporose – vient d’être découverte par une équipe australienne. Des résultats publiés dans la revue Science.
Des récepteurs très importants
Parmi la multitude de molécules de notre corps, comment se fait-il qu’une seule d’entre elles puisse espérer guérir plusieurs maladies à la fois ? Parce qu’elle est capable de moduler l’activité de notre cerveau. Plus précisément, elle interagit avec des récepteurs cruciaux dans plusieurs processus du corps, notamment comment les cellules nerveuses dans la peau “sentent” quand quelque chose nous touche. Ce sont les récepteurs PIEZO.
“On sait déjà que les récepteurs PIEZO sont des récepteurs sensoriels qui convertissent la force mécanique éprouvée lors du toucher en signaux électriques. Ils ont été découverts en 2010 et étaient l’objet du Prix Nobel 2021 décerné au Dr Ardem Patapoutian”, explique à Sciences et Avenir le Dr Charles Cox, pharmacologue au Victor Chang Cardiac Research Institute en Australie. “Mis à part le toucher, les récepteurs PIEZO ont aussi un rôle très important dans de nombreuses maladies.”
Une réaction en cascade
Or, la protéine identifiée par son équipe est capable d’influencer les récepteurs PIEZO. Ces derniers, ensuite, modulent les signaux envoyés via les nerfs jusqu’au cerveau. Une réaction en cascade jamais identifiée auparavant. Et qui pourrait, si on la manipule correctement, corriger de nombreuses maladies dans l’organisme, à commencer par l’obésité et l’ostéoporose.
“Les récepteurs PIEZO influencent la densité des os. On peut imaginer qu’en boostant leur activité, on pourrait réguler son activité et augmenter la densité des os chez les personnes qui souffrent d’ostéoporose. Idem, chez les personnes obèses : on pourrait booster les récepteurs PIEZO présents dans l’estomac. Si, en les manipulant, on arrive à faire croire au cerveau que l’estomac est plein alors qu’il ne l’est pas, cela permettrait aux personnes de perdre du poids.”
Mais ce n’est pas tout. Les récepteurs PIEZO jouent aussi un rôle dans plusieurs types de réactions inflammatoires. Si, à l’inverse, on minimise leur activité, on pourrait faire baisser l’inflammation dans certaines maladies comme les rhumatismes, qui touchent les articulations.
Recréer un peptide semblable à la protéine
Que les chaînes PIEZO soient boostées ou au contraire minimisées, tout repose donc sur cette protéine capable de moduler leurs effets. Pour cela, il a fallu comprendre à quoi elle ressemble afin d’en créer une version thérapeutique à base de peptides. Un peu comme on ferait la copie d’une clé pour pouvoir ouvrir une porte.
Pour cela, l’équipe australienne s’est servie de la microscopie cryo-électronique. “C’est une technique de microscopie de haut vol qui permet de déterminer la structure des protéines à une résolution exceptionnellement élevée. Elle a permis de comprendre à un niveau atomique comment ces protéines interagissent avec les récepteurs PIEZO. Un élément crucial pour essayer de mettre au point des médicaments à base de peptide (un assemblage d’acides aminés afin de recréer la molécule en laboratoire, ndlr)”, explique le Dr Cox.
Pour autant, ces médicaments révolutionnaires vont encore demander un peu de temps avant de faire leur apparition sur le marché. “Cette découverte fondamentale nécessite encore beaucoup de progrès avant de pouvoir être utilisée à l’échelle humaine”, confie le pharmacologue. Mais son équipe est déjà passée à l’étape suivante. Elle travaille désormais sur la petite partie de la protéine qui interagit directement avec le récepteur PIEZO afin de l’optimiser. Pour en revenir à la clé, cela revient à perfectionner sa forme afin qu’elle soit la plus proche possible de celle de la serrure. Ensuite seulement, elle sera testée lors d’essais cliniques – sur des animaux d’abord – afin de s’assurer qu’elle n’est pas dangereuse.
Une coquille signalée en commentaires de cet article sur le mot “PIEZO” a été corrigée le 22 août 2023.
Pour plus d’informations et d’analyses sur la Djibouti, suivez Africa-Press