Africa-Press – Djibouti. L’architecture des nids d’abeilles et de guêpes est très similaire. Elle implique notamment l’utilisation de cellules hexagonales. Pourtant, aucun de leurs ancêtres communs n’est un constructeur d’hexagones ! Une équipe de chercheurs internationale s’est intéressée à ce phénomène et en particulier à la façon dont abeilles et guêpes adaptent la construction de ces cellules à l’envergure des individus. Les résultats de leur étude ont été publiés dans la revue Plos Biology.
Les avantages de l’hexagone
Malgré 179 millions d’années d’évolution indépendante, les abeilles et les guêpes ont convergé vers la même solution géométrique pour répondre au défi architectural de la construction des nids : l’hexagone. Si on observe attentivement la nature, on se rend compte que cette forme y est d’ailleurs très répandue. Qu’il s’agisse des ruches, des flocons de neiges, des orgues de basaltes, ou des yeux composés des insectes, l’hexagone y a une place privilégiée.
« C’est une forme géométrique étonnante. Elle maximise la résistance et la surface de stockage tout en minimisant les matériaux de construction », explique Michael L. Smith, auteur de l’étude, pour Sciences et Avenir. En effet, on conçoit aisément l’espace qui serait gaspillé dans les interstices en rassemblant non pas des hexagones, mais des cercles par exemple. L’hexagone est la forme géométrique la plus stable pour paver une surface.
Bien que les abeilles et les guêpes bâtissent leur nid avec des matériaux différents (les abeilles construisent avec de la cire et les guêpes avec du papier), elles subissent les mêmes pressions évolutives pour optimiser l’architecture de leurs constructions. Elles doivent maximiser le volume de stockage, et assurer la solidité des rayons, tout en réduisant leurs déchets. Et sans surprise, c’est l’hexagone qui répond le mieux à ces besoins.
L’architecture du nid
« Le nid est extrêmement important pour ces insectes sociaux. C’est là qu’ils élèvent leurs petits, échangent des informations et stockent leur nourriture », indique le chercheur. C’est à la surface de celui-ci, par exemple, que les abeilles mellifères indiquent à leurs congénères la localisation des sources de nourritures alentour grâce à une chorégraphie millimétrée. L’essentiel des activités de ces insectes se déroule dans le nid, qu’elles façonnent pour y entreposer leur nourriture et préparer la naissance des nouveaux individus.
Si les cellules de naissance ne sont pas assignées à un individu spécifique, elles sont en revanche affectées à l’élevage d’un type d’individus, en fonction de son rang (ouvrière, faux-bourdon ou reine). Or chez certaines espèces, les ouvrières et les reproducteurs sont de tailles différentes. Ces géniteurs, souvent des faux-bourdons ou des reines, sont plus grands que les autres individus, et nécessitent des cellules hexagonales plus larges. « Cela pose un problème architectural fondamental : comment agencer des hexagones de tailles différentes au sein d’un même treillis ? » questionne Michael L. Smith.
S’adapter aux grands comme aux petits
Pour répondre à cette interrogation, les chercheurs ont photographié les nids de cinq espèces d’abeilles différentes et autant d’espèces de guêpes, soit un total de 22.745 cellules hexagonales ! Ensuite, un logiciel de traitement d’image semi-automatisé a extrait les dimensions des cellules à partir des clichés qu’ils avaient recueillis sur des nids du monde entier. Nombre et longueur des parois, angles… chaque cellule est méticuleusement examinée.
Plus le rapport entre ouvriers et reproducteurs est grand, plus il est difficile d’incorporer ces cellules au nid, et ce différentiel varie selon l’espèce. Il est nul chez la guêpe Metapolybia mesoamerica, en revanche dans les nids de l’abeille domestique Apis andreniformis, les cellules des reproducteurs sont 2,7 fois plus grandes que celles des ouvrières.
Alors comment les abeilles et les guêpes procèdent-elles ? Si la différence de taille est mineure, elles construisent des cellules hexagonales de taille intermédiaire entre les lots de cellules ouvrières et ceux des reproducteurs. Dans le cas contraire, abeilles et guêpes ajoutent de petites cellules (à 5 ou 7 cotés) à la jointure des plus gros hexagones. Cette technique a même été validée par un modèle mathématique : elle est en effet basée sur des règles géométriques fondamentales.
« Malgré des origines évolutives et des matériaux de construction différents, les abeilles et les guêpes sociales résolvent les problèmes de construction avec les mêmes solutions architecturales. C’est vraiment génial ! », s’enthousiasme Michael L. Smith. Reste maintenant à élucider l’utilité de ces cellules intermédiaires : sont-elles laissées vacantes ou bien employées pour stocker un contenu particulier ? Et si elles l’utilisent, abeilles et guêpes en tirent-elles parti de la même façon ? « Nous devrons leur poser la question ! », conclut-il en souriant.
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