Système immunitaire : bien composer son assiette pour résister aux agressions

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Système immunitaire : bien composer son assiette pour résister aux agressions
Système immunitaire : bien composer son assiette pour résister aux agressions

Africa-Press – Djibouti. Kiwis riches en vitamine C pour prévenir les infections virales, thé aux champignons pour renforcer ses défenses anticancéreuses, infusions de gingembre pour stimuler son immunité… Au-delà de ces allégations à but commercial, les laboratoires mettent en lumière plusieurs liens entre alimentation et immunité. « Manquer de certains nutriments ou micronutriments peut en effet rendre plus fragile face aux diverses agressions (virus, bactéries, etc. ) en altérant la production de certaines cellules immunitaires « , pose Adrien Rossary, chercheur dans l’Unité de nutrition humaine (Inrae/université Clermont Auvergne).

Une carence peut aussi favoriser une inflammation de bas grade, laquelle est reconnue comme une voie vers de nombreuses pathologies (affections cardiaques, obésité, diabète). Changer d’alimentation pourrait ainsi modifier le statut immunitaire, comme l’ont constaté aux États-Unis des chercheurs de l’Institut national des allergies et des maladies infectieuses (Niaid), en collaboration avec l’Institut national du diabète et des maladies digestives et rénales (NIDDK).

En proposant à 20 adultes de suivre pendant deux semaines un régime cétogène (riche en lipides et faible en sucres) ou végétalien (sans produit d’origine animale, riche en fibres et pauvre en graisses), les chercheurs américains ont constaté dans leurs travaux, parus en 2024 dans Nature Medicine, que le passage à l’un ou l’autre régime alimentaire était lié à des changements évidents dans le nombre de cellules immunitaires.

Ne pas faire l’impasse sur les protéines

Avec le régime cétogène, les quantités et l’activité des lymphocytes T et B – des globules blancs de l’immunité adaptative – ont augmenté, tandis que les personnes qui suivaient un régime végétalien ont constaté une amélioration des réponses immunitaires innées, non spécifiques. De quoi encourager les chercheurs à poursuivre dans cette voie. Avec, toutefois, une nuance en tête.

« La littérature montre qu’il n’existe pas d’aliments miracles, fait remarquer Adrien Rossary. C’est à travers une alimentation diverse et variée que l’organisme peut puiser les nutriments dont il a besoin pour soutenir le système immunitaire.  » Et la viande rouge ne fait pas exception à cet état de fait. Si elle est une source d’acides gras saturés et d’oméga-6, qui, consommés en excès, sont pro-inflammatoires, une carence en acides aminés (composants des protéines) rend en revanche le système immunitaire moins efficace.

« Pour contrer une infection virale ou bactérienne, l’organisme a besoin de protéines pour fabriquer très rapidement de nouvelles cellules leucocytaires par millions « , précise Adrien Rossary. Veau, bœuf, agneau et foie sont bien dotés en fer, dont un déficit rend plus vulnérable aux infections. La viande rouge, la volaille et les abats sont aussi une bonne source de vitamine B12, utile au bon fonctionnement de certains lymphocytes T, et de zinc, un cofacteur de la synthèse des protéines.

Côté fruits et légumes, leur richesse en fibres prébiotiques nourrit les bactéries intestinales. Ils soutiennent ainsi le microbiote et contribuent à diminuer l’état inflammatoire de bas grade. Ils sont aussi bien pourvus en composés antioxydants (polyphénols, vitamine C, sélénium, zinc), qui luttent contre le stress oxydatif, déclencheur de l’inflammation.

La provitamine A (mangue, carotte, potiron, etc. ) aide même à réguler le nombre et la fonction des cellules « natural killers » (NK), des globules blancs capables d’identifier les cellules infectées ou cancéreuses et de les détruire. Légumes, fruits frais et à coque apportent aussi de la vitamine E (fruits rouges, pommes), laquelle entre dans la composition de la membrane des cellules immunitaires. De son côté, la vitamine C (agrumes, kiwi) soutient notamment la migration des globules blancs vers les sites d’infection et la production d’anticorps.

Autre apport alimentaire incontournable pour une immunité performante: les poissons gras et les fruits de mer. Saumon, maquereau et sardine sont ainsi riches en acides gras poly-insaturés de type oméga-3, connus pour leurs propriétés anti-inflammatoires. Selon des travaux japonais, ils donneraient naissance aux protectines, des molécules pouvant atténuer la réplication du virus de la grippe.

Miser sur les aliments lactofermentés

Les fruits de mer (huîtres, coquille Saint-Jacques, moules, etc.) sont, eux, riches en sélénium et en zinc, deux puissants antioxydants. Le sélénium augmente notamment l’activité des cellules NK, tandis « qu’un manque de zinc diminue le nombre de lymphocytes T et B et augmente le risque d’infections « , note Véronique Liesse, diététicienne-nutritionniste. Utilisé à des fins de prévention, le zinc réduirait de 28 % le risque de contracter un rhume et de 68 % une maladie « pseudo-grippale ».

Les produits de la mer, notamment les poissons gras, apportent aussi de la vitamine D. Également synthétisée par la peau lors de l’exposition au soleil, celle-ci active notamment les lymphocytes T régulateurs qui empêchent le système immunitaire de s’emballer. Selon une étude publiée en 2024 dans la revue Science, menée sur des souris par des biologistes du Francis-Crick Institute à Londres (Royaume-Uni), la vitamine D renforcerait même la réponse immunitaire face au cancer en influençant la composition du microbiote intestinal par l’augmentation des bactéries Bacteroides fragilis. « Il y a un véritable dialogue entre le microbiote et le système immunitaire au niveau de l’intestin, qui favorise la défense de l’organisme. Toutefois, ces travaux doivent se confirmer pour savoir si cet effet bénéfique peut être transposable à l’humain « , note Adrien Rossary, qui travaille sur les liens entre cette vitamine, l’obésité et le cancer.

Dans cette optique du dialogue entre immunité et microbiote, il est ainsi pertinent de miser sur les aliments lactofermentés, riches en probiotiques (lactobacilles, bifidobactéries…). Qu’il s’agisse de fruits et légumes (pickles, choucroute, kimchi coréen, olives noires, etc.), ou de boissons et produits laitiers fermentés (kombucha, lait ribot, yaourt, croûtes de fromage, etc.), ce type d’aliments entretient en effet l’équilibre du microbiote, favorise la sécrétion de cytokines anti-inflammatoires et renforce la barrière intestinale. « Les bactéries intestinales permettent de produire des acides gras à chaîne courte et une couche épaisse de mucus, lequel fabrique des cellules immunitaires (immunoglobulines A), offrant un effet barrière optimal contre les agents infectieux « , précise Véronique Liesse.

À côté de ces alliés objectifs, le système immunitaire fait aussi face à quelques ennemis à surveiller de près: l’alcool, le sel, les sucres ajoutés, les gras saturés et les additifs – dont les émulsifiants, qui altèrent le microbiote. Des ingrédients très présents dans les plats ultratransformés. Raison pour laquelle ces derniers tendent à favoriser une inflammation chronique de bas grade qui affaiblit le système immunitaire en le sursollicitant.

En 2020, des chercheurs de l’hôpital universitaire de Bonn (Allemagne) ont montré qu’une consommation quotidienne excessive de sel pendant une semaine inhibait l’action des granulocytes neutrophiles, des cellules qui attaquent les bactéries. De même, la consommation excessive d’alcool (plus de 10 verres par semaine) réduit la production de cytokines – des molécules qui déclenchent les réactions immunitaires – et affecte le microbiote en favorisant l’inflammation et l’hyperperméabilité intestinales. Idem pour le sucre qui, en excès, entraîne une perte de lymphocyte 17, des cellules de défense contre les pathogènes retrouvées au niveau de la barrière intestinale.

Les effets à long terme du tabagisme

Tabac et immunité ne font décidément pas bon ménage. Ainsi, même chez un ancien fumeur, le système immunitaire présente des signes de perturbations et ce jusqu’à quinze ans après l’arrêt. Tel est l’un des enseignements d’une étude française publiée dans la revue Nature en 2024, qui démontre pour la première fois que fumer affecte durablement le système immunitaire.

Menée par l’Institut Pasteur sur des échantillons sanguins de 1000 volontaires âgés de 20 à 70 ans, elle met en évidence un double effet du tabagisme, l’un à court terme sur les réponses immunitaires dites innées (les mécanismes de défense), et un autre à long terme, sur celles dites adaptatives, élaborées au cours du temps en fonction des contacts avec les microbes. Selon les chercheurs, ces résultats auraient aussi des implications cliniques potentielles sur le risque de développer des infections, des cancers ou des maladies auto-immunes.

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