Gabon : face à Ali Bongo, qui prendra la succession de Jean Ping ?

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Gabon : face à Ali Bongo, qui prendra la succession de Jean Ping ?
Gabon : face à Ali Bongo, qui prendra la succession de Jean Ping ?

Africa-Press – Gabon. Qui pour succéder à Jean Ping comme chef de file de l’opposition gabonaise en 2023 ? C’est la question qui taraude bien des esprits dans le microcosme politique gabonais, aussi tumultueux que le cours du fleuve Ogooué, alors que le scrutin approche à grands pas.

À bientôt 80 ans, Ping, ancien pilier du régime d’Omar Bongo Ondimba (OBO), ne semble plus en mesure de rééditer son exploit de 2016. Lors de ce scrutin, le 27 août, il avait réussi à construire l’union de son camp, ne s’inclinant au final que d’une courte marge – 48,2 %, soit 5 594 voix d’écart – face au président actuel, résultat qu’il conteste encore aujourd’hui. Sans doute l’apogée de sa longue carrière politique.

Hors-jeu

Six ans plus tard, le leader de la Coalition pour la nouvelle République (CNR), qui passe le plus clair de son temps reclus avec son dernier carré de fidèles dans sa résidence du quartier Charbonnages,

Critiqué pour sa stratégie de boycott des élections législatives, Ping a vu ses principaux lieutenants lui tourner le dos un à un. Après Frédéric Massavala, l’ex-porte-parole de la CNR, ce fut au tour de René Ndemezo’o Obiang, nommé président du Conseil économique, social et environnemental, de Féfé Onanga, le « taulier de l’Ogooué-Maritime » ou encore de l’ex-Premier ministre Jean Eyeghé Ndong. Nommé haut-commissaire à la République, ce dernier a même déclaré publiquement qu’il soutiendrait Ali Bongo Ondimba (ABO) lors de la présidentielle de 2023.

La carte Barro Chambrier

Jean Ping a priori hors-jeu, et la nature ayant horreur du vide, on se bouscule aujourd’hui au portillon. Parmi les principaux prétendants, Alexandre Barro Chambrier, qui tente de prendre de vitesse les autres challengers. Celui qui fut ministre du Pétrole durant le premier mandat d’Ali Bongo Ondimba multiplie les déplacements en province.

À son crédit, « une image de sérieux et de compétence, notamment à l’international », comme le reconnaît un ministre qui l’a côtoyé du temps, pas si lointain, où il était l’un des barons du Parti démocratique gabonais (PDG). Mais pour espérer s’imposer à la tête de l’opposition, Barro Chambrier devra surmonter un certain nombre d’obstacles.

Son parti, le Rassemblement pour la modernité (RPM, ex-RHM), ne dispose pas encore d’un niveau de structuration important à l’échelle du pays. En outre, il ne dispose pas d’un capital sympathie très élevé chez les autres opposants. « C’est un rallié de la 25e heure », raille un vice-président de l’Union nationale (UN), allusion au fait que l’intéressé n’a rejoint que relativement tard les rangs des adversaires d’ABO.

Enfin, Barro Chambrier devra tenter de faire oublier son échec au second tour des élections législatives de 2018, dans le 4e arrondissement de Libreville. Dans son propre fief familial, il avait été battu par le jeune candidat du PDG, Severin Pierre Ndong Ekomie, dont c’était la première campagne. « Comment peut-on prétendre se faire élire chef de l’État quand on est incapable de se faire élire député dans sa circonscription ? » persifle le même vice-président de l’UN.

La légitimité de Guy Nzouba-Ndama

Pour de nombreux opposants, le plus légitime serait plutôt Guy Nzouba-Ndama. Le patron des Démocrates, qui a fait la sourde oreille lors des appels au boycott des élections de 2018, peut se targuer d’être à la tête du groupe de députés de l’opposition le plus nombreux.

À 76 ans, celui qui fut dix-neuf ans durant (de 1997 à 2016) président de l’Assemblée nationale jouit d’un certain crédit pour avoir mis en place une stratégie constructive et constante, contrairement à Jean Ping, plus radical, voire belliqueux, et qui n’a obtenu d’autre résultat que son isolement.

Néanmoins, il est lui aussi confronté à nombre de difficultés. Ces derniers mois, plusieurs figures du parti, et non des moindres, l’ont quitté pour rejoindre la majorité présidentielle. C’est le cas de Jean-Norbert Diramba et de Jean-Pierre Doukaga Kassa, qui ont intégré le gouvernement de la Première ministre, Rose Christiane Ossouka Raponda, en mars dernier. Ou de Maxime Ondimba, nommé haut-commissaire à la République. Selon plusieurs sources, Séraphin Akure Davain, le président du groupe Les Démocrates à l’Assemblée, pourrait leur emboîter le pas.

Paulette Missambo, un recours ?

Quid, enfin, de Paulette Missambo ? Élue en novembre dernier à la tête de l’Union nationale, le parti fondé par Zacharie Myboto et feu André Mba Obame, elle pourrait créer la surprise. « L’opposition gagnerait beaucoup à être représentée par une femme », estime l’un de ses soutiens. Sur le papier, l’hypothèse semble séduisante, d’autant que le Gabon est reconnu en Afrique comme l’un des pays les plus volontaristes en matière de parité. Mais, après des débuts prometteurs, le vent a fini par tourner pour celle qui fut ministre de l’Éducation et de la Santé sous Omar Bongo Ondimba.

Son élection au forceps à la tête de l’UN face à Paul-Marie Gondjout, le gendre de Zacharie Myboto, n’a toujours pas été digérée par une bonne partie des cadres et des militants. Début juillet, certains d’entre eux lui ont adressé une missive dénonçant sa gestion « autocratique et clanique », en menaçant de quitter le parti. Quelques jours plus tard, le 23 juillet, Paul Marie-Gondjout enfonçait le clou en créant, avec la bénédiction du patriarche Myboto, l’Union nationale initiale, formation qui a vocation à porter sa candidature lors de la présidentielle de 2023, entérinant ainsi la scission de l’UN.

Le péril interne

Face à cette opposition en désordre de bataille, Ali Bongo Ondimba, dont personne ne doute sérieusement, sauf imprévu, qu’il sera candidat en 2023, sait qu’il se trouve en position de force. »L’opposition gabonaise est éparpillée à la façon d’un puzzle. Le président détient pour l’instant toutes les cartes », reconnaît l’un de ses adversaires.

Le chef de l’État, dont la politique de main tendue à l’opposition s’est avérée efficace, comme en témoigne le ralliement récent de l’ex-ministre des Finances Charles M’Ba, devra toutefois veiller à ce que son camp ne reproduise pas les mêmes erreurs qu’en 2016, notamment en prenant la bataille présidentielle à la légère. Ici plus qu’ailleurs, le danger vient souvent de l’intérieur…

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