Rejet de la Requête D’Anges Kevin Nzigou : le Quiproquo

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Rejet de la Requête D’Anges Kevin Nzigou : le Quiproquo
Rejet de la Requête D’Anges Kevin Nzigou : le Quiproquo

Africa-Press – Gabon. S’appuyant sur la forme, la Cour constitutionnelle de la Transition a rejeté le recours en annulation du décret portant remaniement du gouvernement. Cette décision a instillé une fâcheuse impression de surplace voire de retour à des heures de triste mémoire.

Le rejet du recours en annulation du décret portant remaniement du gouvernement va-t-il contribuer à la restauration de la crédibilité de la Cour constitutionnelle ? On peut en douter. Déjà, des commentaires peu élogieux fusent de partout. Sur les réseaux sociaux, comme dans les chaumières, chacun y va de sa sentence. «C’est la démonstration d’un énième échec de la Cour constitutionnelle de la Transition qui est juge de la constitutionnalité des lois et est devenu juge des émotions du CTRI. Tout à fait normal lorsqu’on a son parent à la tête de cette institution», a-t-on notamment pu lire sur un forum de discussion. De toute évidence, cette décision a instillé une fâcheuse impression de surplace voire de retour à des heures de triste mémoire, donnant du grain à moudre aux sceptiques.

La procédure, uniquement la procédure

Pourtant, la juridiction constitutionnelle n’a pas dit si l’article 35 de la Charte de la Transition a été violé au pas. Elle n’a pas non plus donné tort à Anges Kevin Nzigou. Elle a simplement affirmé «que la requête introductive d’instance (n’était) nullement accompagnée du décret incriminé, que le document (…) listant les membres du gouvernement (…) ne saurait constituer un décret de nomination». En raisonnant ainsi, elle ne s’est nullement prononcée sur le fond. Elle s’est contentée d’analyser la forme. Autrement dit, elle est restée sur la procédure et uniquement la procédure. Au nom d’une complémentarité ou d’une influence croisée entre droit processuel et droit substantiel, Dieudonné Aba’a Owono et ses pairs ont cru bon de ne pas connaître de l’affaire, proclamant l’irrecevabilité de la saisine. Même s’ils ont a agi à bon droit, ils ont quand même botté en touche.

Plusieurs questions sont désormais en suspens. L’équipe Ndong Sima 2 est-elle conforme aux textes en vigueur ? Les ministres en charge de la Défense nationale et de l’Intérieur peuvent-ils demeurer ministres de plein exercice ? Y compris pour la forme, pour la bonne administration de la chose publique ou pour attester d’un sens de l’écoute, ne vaut-il pas mieux procéder à un réajustement, en les ramenant au rang de ministres délégués ? Le président de la Transition a-t-il renoncé à ses casquettes de «ministre de la Défense et de la Sécurité» ? Par quel mécanisme ? La Charte de la Transition a-t-elle été modifiée ? Quand et par quel moyen ? Une ordonnance ? Est-ce envisageable, la Charte de la Transition ayant valeur de texte constitutionnel ?

Méfiance d’une partie de l’opinion

Toutes ces questions ouvrent sur deux autres, non moins importantes: la capacité du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) à se soumettre à la règle de droit et, le maintien du couvre-feu. Dans sa première déclaration publique, le CTRI avait dénoncé «une gouvernance irresponsable, imprévisible», se posant en «garant de la protection des institutions». Il ne peut l’avoir proclamé et se satisfaire d’entorses manifestes à la loi et surtout pas à une charte édictée par ses soins. Cela reviendrait à alimenter les critiques voire à nourrir la méfiance d’une partie de l’opinion à son égard et à l’endroit des organes de la Transition. De même, en attribuant au président de la Transition les portefeuilles de la Défense nationale et de la Sécurité, il indiquait combien le climat sécuritaire était délicat. Implicitement, il justifiait sa décision de restreindre la liberté de circuler. De ce point de vue, il ne peut l’en délester sans ordonner la levée du couvre-feu. Ce serait dire une chose et son contraire.

Comme les autres forces sociales, le CTRI a pris acte de la décision de la Cour constitutionnelle de la Transition. A juste titre, il s’en est certainement frotté les mains. Un examen au fond l’aurait sans doute contraint à remanier le gouvernement. N’empêche, tout ceci crée un quiproquo, l’affaire n’ayant pas été jugée au fond. Nombres d’observateurs n’étant pas au fait des procédures ni des interactions entre elle et le droit à proprement parler, le rejet de la requête d’Anges Kevin Nzigou pourrait être mal compris, interprété comme une entourloupe de la juridiction constitutionnelle, toujours affublée du pseudonyme «Tour de Pise». Après tout, les Gabonais restent encore sous le choc des manipulations juridiques opérées sous le règne de Marie-Madeleine Mborantsuo. S’ils veulent établir un lien de confiance avec la population, Dieudonne Aba’a Owono et ses pairs doivent le méditer…

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