Africa-Press – Gabon. Alors que la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2025 au Maroc approche, un bras de fer médiatique oppose les chaînes de télévision publique francophones d’Afrique subsaharienne au nouveau détenteur des droits de diffusion des compétitions de la CAF, le groupe togolais New World TV. En effet, alors que le coup d’envoi est prévu le 21 décembre 2025 avec les équipes du Maroc vs Comores, les télévisions nationales expriment leur vive frustration, car la New World TV n’a accordé l’accès qu’à 32 des 52 matchs de la compétition en diffusion gratuite.
Un collectif de chaînes francophones, incluant notamment celles du Gabon, du Sénégal, du Cameroun et de la Côte d’Ivoire, réclame l’accès à l’intégralité des 52 rencontres. Selon lui, «la compétition est financée en partie par les États africains et donc par le contribuable africain et devrait revenir intégralement aux populations». Ces chaînes dénoncent également un modèle de commercialisation jugé «économiquement inéquitable» et calqué sur les standards européens (FIFA, UEFA), sans tenir compte des réalités budgétaires et des mécanismes de financement très différents sur le continent. Ce système, selon elles, force les téléspectateurs à souscrire à des chaînes privées ou étrangères pour suivre une compétition qu’ils ont déjà indirectement financée.
New World TV, nouveau maître des Droits
Le différend trouve son origine dans la récente acquisition des droits de la CAF. Après que l’Union africaine de radiodiffusion (UAR) a géré le dossier en 2019, c’est New World TV qui a décroché, en novembre 2023, les droits exclusifs de diffusion pour l’ensemble des compétitions de la CAF sur trois ans (incluant la CAN 2025). Le groupe togolais se retrouve désormais à commercialiser les rencontres auprès de 46 pays d’Afrique subsaharienne, comme le rapporte Press Afrik. L’opérateur privé se défend en soulignant une progression du nombre de matchs: Pour la CAN 2023, la CAF n’avait autorisé que 28 matchs or s’agissant de la CAN 2025, New World TV affirme avoir négocié une hausse significative, portant ce nombre à 32. Son avocat, Louis Biyao, rappelle que les chaînes publiques «doivent payer plus pour obtenir davantage de matchs» et que les limites imposées découlent du contrat initial passé avec la CAF. New World TV n’aurait donc pas la latitude d’augmenter unilatéralement ce volume.
Un débat tardif
Le timing de cette contestation est jugé surprenant. Les négociations pour les sous-licences ont eu lieu bien en amont. Pour rappel, en juillet 2025, la chaîne ivoirienne NCI avait déjà annoncé un partenariat avec New World TV pour diffuser en clair les rencontres autorisées. Même le géant Canal+ a dû passer par un accord avec le groupe togolais pour proposer l’intégralité du tournoi dans ses bouquets payants. Ces accords publics montrent que les contours de la diffusion, y compris le nombre de matchs en clair, étaient connus des diffuseurs depuis plusieurs mois.
Ce bras de fer met donc en lumière le dilemme récurrent pour les télévisions publiques: comment concilier des budgets limités avec une demande massive du public pour les grandes compétitions sportives?
Pour l’heure, et à quelques semaines du coup d’envoi, l’issue favorable à une augmentation des matchs en clair pour cette édition 2025 paraît peu probable. La question demeure: la CAF reverra-t-elle, à l’avenir, la proportion de matchs en clair autorisés, ou les chaînes publiques parviendront-elles à renforcer leurs capacités financières pour répondre à l’attente de leurs populations? Une chose est sûre, le débat sur l’accès équitable aux grandes compétitions africaines ne fait que commencer.
Thécia Nyomba (Stagiaire)
