Africa-Press – Gabon. Alors que le top management de la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog) multiplie les bonnes intentions pour trouver un meilleur terrain d’entente avec les employés et ramener l’accalmie au sein de l’entreprise, premier producteur mondial de manganèse à haute teneur, certains syndicats semblent avoir irrémédiablement opté pour la radicalisation. Malgré les nombreuses tentatives de négociations et de recherche des voies et moyens pour un retour à la sérénité, à l’issue d’une assemblée générale, le 2 décembre, à Moanda, une nouvelle grève illimitée a été déclenchée.
La grève illimitée suspendue le 27 septembre à la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog) a été reconduite, le 3 décembre, à l’issue d’une Assemblée générale du collectif des syndicats de l’entreprise minière, à Moanda. Ils relancent la grève «afin de faire respecter l’ensemble de leurs revendications». Une situation qui vient de nouveau plomber les performances de l’entreprise déjà impactées par trois semaines de suspension de la production, eu égard à la fermeture du marché de manganèse à l’échelle mondiale. «Cette grève va à l’encontre du dialogue social que nous nous efforçons de rétablir au sein de notre entreprise», a réagi l’Administrateur directeur général (ADG), Léod Paul Batolo.
À l’encontre du Code du travail
Si les syndicalistes estiment que depuis le 20 août 2024, toutes les démarches qu’ils ont entreprises, jusques y compris à la présidence de la République, n’ont produit aucun résultat et qu’ils se doivent de paralyser l’entreprise, un haut cadre de la Comilog s’indigne et relève qu’«ils n’ont toujours pas compris les enjeux». «Le statut de première entreprise mondiale productrice de manganèse à haute teneur induit un changement de management», a-t-il dit, s’offusquant du fait que «les Gabonais ne soutiennent pas leur compatriote à la tête de la première entreprise du pays et de la Cemac –Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale-, alors qu’ils veulent la réappropriation de leur pays».
Dans sa réaction, Léod Paul Batolo rappelle que ce débrayage intervient alors que «le dossier de médiation est toujours en cours auprès du ministère des Mines», leur tutelle. Il fait en outre savoir qu’il «va à l’encontre du Code du travail qui prévoit, si la médiation n’aboutit pas, un passage en procédure d’arbitrage, et non le recours à la grève ou le changement de médiateur tel que réclamé par nos organisations syndicales». Il s’offusque enfin du fait que cette grève «vient interrompre nos efforts pour trouver une solution apaisée aux revendications sociales, comme en témoigne la réunion de dialogue à laquelle le Comité de direction a convié les organisations syndicales…».
Une défiance à l’endroit du chef de l’État
Du coup, cette grève est désormais perçue comme «une défiance au chef de l’État» qui mène une intense diplomatie à l’international pour consolider la place du Gabon dans le concert des nations. Ce, d’autant plus que les syndicalistes n’exigent dorénavant, comme seule personnalité pouvant décanter la situation, que le chef de l’État.
Avant cette nouvelle grève, le Secrétaire général du Syndicat des travailleurs de l’industrie minière et métallurgique (Strimm), Joscelain Lebama, a publié une lettre ouverte dénonçant «le climat délétère», «les pratiques ségrégationnistes instituées en mode de gouvernance au sein de la Comilog».
À ce niveau, certains invoquent un acharnement sur la personne de l’ADG, Léod Paul Batolo, dont le départ de la direction générale de la Comilog est l’un des points culminants des revendications syndicales. Là aussi, on laisse entendre à l’entreprise minière que cette «radicalisation» n’est autre que la résultante de la «coupure de la subvention aux syndicats». Car, des syndicalistes insistent, persistent et signent notamment quant à leur désir d’évincer l’ADG. Ce que n’autorise pas la loi.
«La coupure de cette subvention est l’une des causes de ce désordre»
«La coupure de cette subvention est l’une des causes de ce désordre», pense un autre cadre de la Comilog, sous anonymat. Une subvention pouvant facilement atteindre les 30 millions de francs CFA, faisaient savoir certains agents, non sans regretter le fait qu’il «n’y avait jamais de bilan de l’utilisation de ces fonds».
Autant le dire, la Comilog, avec son statut d’entreprise leader essaie de s’arrimer aux standards internationaux. Ce qui fait relever qu’«une entreprise mal gérée ne peut pas être première au monde», disait un haut cadre de l’entreprise, ajoutant que «cela ne veut pas dire que tout va bien et qu’il n’y a pas d’aménagements à faire».
Avant qu’on en arrive à ce stade, le top management assure avoir toujours su garder et entretenir le dialogue social en entreprise. Ce qui a permis de totaliser plus de 150 heures de réunions en 2 ans consacrées à ces problèmes sociaux.
«Fermés au dialogue et motivés par la haine ethnique»
À Comilog, des voix discordent autour de cette grève et d’autres insistent, au regard de la tournure des événements, sur le fait que «c‘est un mouvement de manipulation orchestré par des syndicats corrompus, fermés au dialogue et motivés par la haine ethnique». Pour elles, «ils mènent une guerre personnelle contre l’ADG pour des raisons ethniques et financières», tandis que d’autres encore estiment que «les syndicalistes utilisent la grève pour éliminer ceux qui ne sont pas de leur ethnie».
Ce qui est certain, c’est que cette crise paralyse l’entreprise et met un coup à la politique du chef de l’État qui prône le plein emploi et s’active à relever l’économie du pays. En même temps, elle met en difficulté cette entreprise, fleuron de l’économie nationale, qui est premier client de la SEEG, de Total Gabon, de la Société de patrimoine, etc. «Toucher Comilog, c’est paralyser l’économie nationale», s’est désolé un cadre de l’entreprise.
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