Africa-Press – Gabon. La Société gabonaise de transport (Sogatra) traverse une nouvelle zone de turbulences. Le 19 novembre dernier, ses agents ont déclenché une grève générale illimitée au siège de l’entreprise, dénonçant une accumulation de dettes sociales et financières. Ce énième débrayage intervient alors que l’entreprise publique est appelée à disparaître bientôt à la faveur d’une fusion avec Trans’Urb.
Sur une banderole accrochée au portail principal du siège de la société, ils réclament notamment le paiement de 22 mois de primes Covid-19, le règlement des arriérés de salaires, ainsi que le versement des soldes de tout compte pour les retraités et démissionnaires. Les syndicats de la Sogatra ont récemment lancé une énième grève à Libreville. Ils exigent également la régularisation des dettes envers la CNSS et la CNAMGS, deux institutions sociales dont les créances menacent la couverture des agents.
Au-delà des revendications salariales, les employés pointent du doigt l’état du parc automobile de la société, composé de véhicules vieillissants et souvent immobilisés faute d’entretien. Cette situation illustre les difficultés structurelles d’une entreprise publique déjà fragilisée par la gratuité des transports instaurée en 2020 durant la pandémie, une mesure qui n’a jamais été compensée par l’État.
Une fusion en préparation
Face à cette crise, le gouvernement a annoncé une réforme majeure: la fusion entre la Sogatra et Trans’Urb. Actée lors du Conseil des ministres du 8 septembre dernier, cette restructuration vise à créer une entité unique, dotée d’une nouvelle dénomination, d’un organigramme modernisé et d’une grille salariale harmonisée. Alors ministre des Transports, Ulrich Manfoumbi Manfoumbi avait présenté cette réforme comme un tournant stratégique pour relancer le transport urbain, avec l’arrivée annoncée de 130 bus Tata Motors, la mise en place de tickets à usage unique et d’abonnements sociaux, ainsi que l’installation d’abribus intelligents équipés d’horaires en temps réel.
En attendant cette réforme sans doute salvatrice pour la société, il convient de rappeler que la Sogatra n’en est pas à sa première crise. La plus récente date de 2023. Deux ans plus tôt, en effet, elle avait sollicité une enveloppe de 6 milliards de FCFA pour tenter de se relancer. Mais les audits successifs ont révélé une gestion déficiente et une dette abyssale estimée à 22 milliards de FCFA en 2025. Les syndicats alertent désormais sur un risque de rupture opérationnelle, mettant en péril la continuité du service public.
La grève illimitée des agents de la Sogatra met ainsi en lumière l’urgence d’une réforme profonde. La fusion avec Trans’Urb apparaît comme une tentative de refondation du transport public gabonais, mais son succès reste suspendu à la résolution des crises sociales et financières qui minent l’entreprise depuis des années.
La réforme annoncée par l’État s’articule autour d’un équilibre délicat: garantir une tarification équitable pour les usagers tout en assurant la viabilité économique du transport public. L’introduction de cartes d’abonnement modulées selon la situation sociale des passagers devrait permettre de concilier accessibilité et rentabilité. Mais la réussite de cette fusion dépendra aussi de la capacité du gouvernement à apurer les dettes sociales et à restaurer la confiance des agents.





