Africa-Press – Gabon. Alors que les habitants du Grand Libreville subissent des coupures de courant à répétition, la SEEG alerte sur une situation jugée critique: le niveau d’eau du barrage de Tchimbélé est tombé sous le seuil sécuritaire, fragilisant toute la chaîne de production électrique. Entre déficit pluviométrique, retard de raccordement de la centrale flottante et risques de black-out, le système énergétique montre ses limites.
Les populations du Grand Libreville vivent au rythme des coupures de courant depuis plusieurs semaines, une situation qui s’est aggravée ces derniers jours. En cause: un cocktail de facteurs structurels, techniques et climatiques qui mettent à rude épreuve le système électrique local. Le niveau d’eau du barrage de Tchimbélé, une des principale source de production d’électricité du Grand Libreville, est tombé à un seuil historiquement bas, compromettant ainsi la stabilité du réseau. De même, une nouvelle centrale thermique flottante de 150 MW devait être connectée au réseau pour produire 150 mégawatts supplémentaires, mais son raccordement a pris du retard.
Une production hydraulique fortement dégradée
Depuis le début de la saison sèche en effet, les précipitations se font rares dans la vallée de la Mbè, bassin versant stratégique pour la production hydroélectrique. Ce déficit pluviométrique a entraîné une baisse progressive, puis critique, du niveau de la retenue de Tchimbélé, l’un des barrages majeurs du pays, situé à environ 100 km au nord-est de Libreville. Selon les données techniques communiquées par la Société d’Énergie et d’Eau du Gabon (SEEG), la retenue affiche actuellement un niveau de 515,98 mètres, bien en dessous du seuil critique fixé à 517 m, et surtout très loin du niveau optimal d’exploitation établi à 531 m. L’écart de plus de 15 mètres a d’ores et déjà des conséquences directes sur les capacités de production des centrales de Tchimbélé et de Kinguélé. « Nous avons atteint un seuil que nous n’avions pas vu depuis plusieurs années. À ce niveau, la production devient instable et il est techniquement difficile de faire fonctionner les turbines à pleine capacité sans mettre en danger l’intégrité des installations », explique Cyr Roland Abaghe Essone, Directeur Exploitation Electricité.
Tchimbélé et Kinguélé, les deux principales centrales hydroélectriques situées sur la rivière Mbè, fournissent ensemble près de 40 % de l’électricité consommée dans la région du Grand Libreville, où résident environ un million d’habitants. Avec la baisse du niveau d’eau, les turbines tournent au ralenti et les centrales peinent à répondre à la demande croissante, surtout aux heures de pointe. « Cela crée un déséquilibre sur le réseau qui doit être compensé par d’autres sources de production, notamment thermiques », poursuit-t-il.
Des délestages planifiés pour éviter les black-out
Or, la solution de secours tant attendue – une centrale thermique flottante de 150 mégawatts récemment installée – tarde à entrer en service. Les opérations de raccordement au réseau ainsi que les essais techniques accusent plusieurs semaines de retard. «Cette unité de production est indispensable pour soulager le réseau en ce moment, », affirme-t-il.
Face à cette situation exceptionnelle, la SEEG a mis en place un plan de délestage rotatif visant à préserver l’équilibre du réseau. Ce dispositif consiste à couper l’électricité dans certaines zones de façon alternée, selon un calendrier défini, afin d’éviter un effondrement total du système. « Nous sommes dans une logique de prévention. Ce plan de délestage, jugé « transitoire », devrait rester en vigueur jusqu’à la mise en exploitation effective de la nouvelle unité de production de 150 MW, dont l’entrée en exploitation demeure conditionnée par l’achèvement des essais techniques actuellement en cours. Un comité de crise a été mis en place pour suivre l’évolution de la situation en temps réel. « Nous surveillons le niveau du barrage, les flux de consommation et l’avancement des tests de raccordement au réseau SEEG de la nouvelle centrale flottante. L’objectif est de rétablir la stabilité du réseau dans les meilleurs brefs délais », assure-t-il.
Mais au-delà de la crise actuelle, cette situation met en évidence la vulnérabilité du système énergétique actuel. Si la mise en service imminente de la nouvelle centrale thermique de 150 MW, conjuguée au retour des pluies dans la vallée de la Mbè pourrait rétablir la stabilité du réseau électrique, seule une réforme en profondeur du secteur, couplée à des investissements structurants durables, permettra de garantir à long terme une fourniture d’électricité fiable, accessible et résiliente pour tous les Gabonais.
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