Transformer les cellules cancéreuses en cellules saines : une nouvelle voie prometteuse contre le cancer

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Transformer les cellules cancéreuses en cellules saines : une nouvelle voie prometteuse contre le cancer
Transformer les cellules cancéreuses en cellules saines : une nouvelle voie prometteuse contre le cancer

Africa-Press – Gabon. Depuis des décennies, le cancer est une des plus grandes menaces de santé publique dans le monde. Seulement en France, il y aurait plus de 400.000 nouveaux cas chaque année, un chiffre qui a doublé depuis 1990. Pour affronter cette maladie, un grand nombre de méthodes ont été développées, des chimiothérapies et radiothérapies à l’immunothérapie, la photothérapie et les nouveaux vaccins anticancéreux. Toutes ces approches ont en commun de cibler les cellules cancéreuses afin de les détruire, mais elles peuvent causer des effets secondaires en attaquant involontairement des cellules saines. Une nouvelle technique tente l’approche inverse: au lieu de détruire les cellules tumorales, pourquoi pas les “convaincre” de redevenir sages ? Des chercheurs de l’Institut supérieur coréen des sciences et technologies (KAIST), ont présenté une façon de transformer les cellules cancéreuses en cellules saines. Cette méthode, qui pourrait révolutionner le traitement du cancer, a été présentée le 11 décembre 2024 dans le journal Advanced Science.

Redémarrer la programmation cellulaire des cellules cancéreuses

D’une façon très schématique, une cellule cancéreuse est une cellule normale qui a mal tourné. Sa programmation cellulaire est modifiée, et au lieu de faire ce qu’elle est censée faire, elle se met à se multiplier sans contrôle, générant des tumeurs. Puisque c’est un problème de programmation de la cellule, les auteurs se sont demandé s’il serait possible de reprogrammer ces cellules pour qu’elles redeviennent normales. Une sorte de redémarrage cellulaire, comme on pourrait faire pour un ordinateur qui commence à présenter des problèmes. Mais pour cela, il faut d’abord trouver le bouton de redémarrage.

Identifier les boutons de redémarrage cellulaire

Les auteurs se sont focalisés sur les entérocytes, des cellules de l’intestin qui causent des cancers du côlon lorsqu’elles deviennent cancéreuses. Pour identifier ces “boutons” de redémarrage qui pourraient transformer une cellule cancéreuse en cellule saine, ils ont d’abord cherché à déterminer quelles molécules étaient essentielles pour la programmation de ces cellules à l’état normal. Pour cela, ils ont comparé l’expression génétique des cellules souches (pas encore programmées pour être des entérocytes) et des cellules déjà différenciées en entérocytes. Cette comparaison leur a permis de voir quels gènes étaient activés à chaque étape de cette différenciation cellulaire, et d’inférer quels étaient les protéines régulatrices de ce processus.

Ainsi, ils ont identifié trois maîtres régulateurs: les facteurs de transcription MYB et FOXA2, qui activent l’expression de plusieurs gènes, et l’enzyme HDAC2, qui régule l’expression génétique en modifiant les histones (les protéines autour desquelles est enroulé l’ADN, comme du fil autour d’une bobine) pour exposer ou cacher les gènes et ainsi permettre ou pas qu’ils soient lus et donc exprimés. Sans leur présence, les cellules souches ne pouvaient devenir des entérocytes, car ces trois protéines activent toute la cascade de signalisation nécessaire à la différenciation cellulaire. Leur importance a été confirmée en suite in vitro en bloquant l’expression de ces protéines dans des cellules du côlon humain.

Ces boutons de redémarrage sont impliqués dans le cancer

Ces maîtres régulateurs s’avèrent aussi impliqués dans la déprogrammation cellulaire caractéristique des cellules cancéreuses. En effet, des cellules de cancer colorectal revenaient à une programmation semblable à celle des cellules normales lorsque l’on bloquait l’expression de ces régulateurs. Grâce à cette reprogrammation, ces cellules ne se multipliaient plus autant, ce qui aurait comme conséquence le ralentissement de la progression d’un cancer.

Finalement, ce ralentissement a été confirmé in vivo, chez des souris qui ont reçu une greffe de cellules cancéreuses, avec ou sans ces régulateurs. Les tumeurs formées chez les souris où les régulateurs ont été bloqués étaient plus petites que ceux des souris avec les régulateurs. Il serait donc possible de traiter les cellules cancéreuses pour les reprogrammer et ainsi les transformer en cellules saines, sans avoir à les détruire. “Le fait que des cellules cancéreuses puissent être reconverties en cellules normales est un phénomène fascinant, affirme dans un communiqué Kwang-Hyun Cho, directeur de l’étude. Cette étude montre que ces réversions peuvent être induites systématiquement, montrant une nouvelle façon de traiter le cancer.”

Toutefois, les auteurs préviennent que cette méthode pourrait ne pas fonctionner pour tous les cancers, car les mutations génétiques accumulées dans les cellules cancéreuses pourraient perturber les voies de signalisation déclenchées par ces maîtres régulateurs, et donc rendre plus difficile leur reprogrammation. Davantage d’études sont donc nécessaires pour voir si cette réversion des cellules cancéreuses est réellement applicable à d’autres cancers et chez d’autres espèces, notamment l’humain. Mais si c’est confirmé, on pourrait être à l’aube d’une ère où on ne se bat plus contre le cancer, mais plutôt on essaye de le convaincre de revenir sur le droit chemin.

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