La drépanocytose en Afrique : les défis d’une meilleure prise en charge pour les millions de personnes atteintes

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La drépanocytose en Afrique : les défis d'une meilleure prise en charge pour les millions de personnes atteintes
La drépanocytose en Afrique : les défis d'une meilleure prise en charge pour les millions de personnes atteintes

Africa-Press – Guinee Bissau. La drépanocytose est une maladie dont souffrent des millions de personnes en Afrique. Cependant, des difficultés persistent en matière de soins.

“Je ressens des douleurs indescriptibles et impossibles à calmer, car j’ai une forme sévère de la maladie. Des douleurs qu’on ne peut décrire.”

Ce témoignage est celui de Maguèye Ndiaye, le président de l’Association sénégalaise de lutte contre la drépanocytose, une maladie génétique héréditaire qui affecte le sang.

“Je vis difficilement. C’est très difficile de vivre avec une drépanocytose au Sénégal. La prise en charge est inexistante. Des patients viennent de Ziguinchor pour se faire soigner à Dakar”, dit-il à BBC Afrique lors de notre émission Au Cœur de l’Actu.

Ndiaye déplore l’inexistence d’infrastructures adéquates pour la prise en charge de la maladie au Sénégal, la cherté des médicaments et l’absence de statistiques sur la maladie.

“Les études qui existent ne sont que des approximations. On parle d’un taux de prévalence de 8 à 10 % depuis très longtemps. Aucune étude de terrain n’a été menée pour indiquer le nombre de drépanocytaires qu’il y a dans le pays”, a-t-il dit.

Ces défis ne sont pas propres au Sénégal. Ils sont une réalité pour les patients à travers le continent.

“Il n’existe pas de sensibilisation comme cela se fait avec le paludisme”.

La drépanocytose est responsable de plus de 200 000 décès par an en Afrique, selon l’organisation Drep Afrique.

“Elle touche principalement l’Afrique. Mais ce n’est pas une maladie liée à la couleur de la peau. C’est une maladie génétique, qui touche tout le monde.

On oublie cette maladie parce qu’elle n’est pas contagieuse. Ce n’est pas une maladie comme … le sida”, dit Robert Hue, ancien parlementaire français et président de l’ONG Drep Afrique”.

“Et pourtant, elle tue beaucoup. Il y a en Afrique 15 millions de drépanocytaires, avec une forme sévère de la maladie et une mortalité très importante. Environ 200 000 personnes meurent de la drépanocytose chaque année en Afrique, plus que n’en tue le coronavirus. Et on parle beaucoup moins de cette maladie que du coronavirus”, a-t-il souligné.

Dans la région, la majorité des enfants atteints de la forme la plus grave de la maladie meurent avant l’âge de 5 ans, généralement à la suite d’une infection ou d’une perte de sang importante, selon l’Organisation mondiale de la Santé.

Le manque de compréhension de la maladie constitue un défi majeur sur le continent.

“On fait appel aux médecins pour des conseils pratiques … On déroule de temps en temps des campagnes de dépistage … Le taux de prévalence augmente, faute de sensibilisation. Il n’existe pas de sensibilisation comme cela se fait avec le paludisme”, constate Oulaï Philippe Mégane, président de l’association Drepanovie, qui milite en faveur d’une meilleure prise en charge des drépanocytaires vivant en Côte d’Ivoire.

Qu’est-ce que la drépanocytose?

La drépanocytose est une maladie grave qui dure toute la vie et qui touche principalement les personnes d’origine africaine ou antillaise, selon l’OMS.

Egalement appelée anémie falciforme, elle est caractérisée par une anomalie de l’hémoglobine, la principale protéine du globule rouge.

L’hémoglobine, on le sait, transporte l’oxygène des poumons vers les tissus. Elle participe à l’élimination du dioxyde de carbone.

Dans la drépanocytose, la forme ronde normale des globules rouges se transforme en croissant de lune, explique l’OMS.

Les globules rouges ronds peuvent se déplacer facilement dans les vaisseaux sanguins, mais les cellules de forme drépanocytaire s’interconnectent et peuvent provoquer des caillots sanguins.

Quels sont les symptômes courants de la drépanocytose ?

Ces caillots sanguins peuvent provoquer des douleurs extrêmes dans le dos, la poitrine, les mains et les pieds.

La perturbation de la circulation sanguine peut également causer des dommages aux os, aux muscles et aux organes.

Les personnes atteintes de drépanocytose se sentent souvent faibles, fatiguées et pâles, dit l’OMS.

Le blanc des yeux et la peau peuvent avoir une teinte jaunâtre.

Les personnes atteintes de cette maladie peuvent être enclines à l’anémie, des accidents vasculaires cérébraux, des défaillances d’organes et des complications qui peuvent entraîner une réduction de l’espérance de vie.

Qu’est-ce qui vous rend drépanocytaire ?

Pour être atteint de la drépanocytose, il faut hériter d’un gène particulier de ses deux parents.

Cependant, l’enfant de deux porteurs n’a que 25 % de chances de recevoir deux gènes caractéristiques et de développer la maladie, et 50 % de chances d’être porteur, selon le Centre américain de contrôle des maladies (CDC).

Il est possible d’être porteur du gène sans avoir la maladie, et la plupart des porteurs mènent une vie tout à fait normale et saine, dit l’OMS.

La maladie est diagnostiquée à l’aide d’une analyse de sang. Un test sanguin peut également indiquer si une personne est porteuse du gène.

Quel traitement existe-t-il ?

La drépanocytose est incurable bien que des traitements existent.

“On ne soigne pas la drépanocytose (…) Pour le moment, on ne sait pas la soigner. Mais il existe un médicament appelé hydroxyurée. C’est une vieille molécule qui soulage la souffrance (…) En Afrique, elle n’existe pas, elle coûte très cher”, dit M. Hue de l’ONG Drep Afrique.

En Guinée, la prise en charge est assurée par les services de pédiatrie et d’hématologie du pays, nous explique Mamady Diakité, médecin hématologue et maître-assistant à la faculté des sciences et techniques de la santé de l’Université de Conakry.

“La drépanocytose représente 5 à 6 % de nos hospitalisations et 11 à 12 % de nos consultations. Ce n’est donc pas une pathologie négligeable”, dit Dr Diakité.

“Des ONG interviennent dans cette prise en charge. Une structure qui s’appelle SOS Drépano-Guinée prend en charge aussi des patients (…) Mais le problème du coût se pose, parce qu’il s’agit d’une maladie chronique”, signale le médecin guinéen.

“Les patients naissent avec et vivent une bonne partie de leur vie avec une prise en charge qu’ils assurent seuls, ce qui engendre de gros soucis”, poursuit-il.

Il y a des choses qui peuvent être fait pour aider à gérer la maladie. L’OMS recommande :
– un apport élevé en liquides
– une alimentation saine
– supplément d’acide folique
– médicaments contre la douleur
– vaccination et antibiotiques pour la prévention et le traitement des infections

Former davantage de personnel médical

Les soins spécialisés et la mise à disposition de traitements abordables sont des défis à relever.

“On connaît mal la maladie (…) Cette maladie est l’une des plus douloureuses”, dit M. Hue, président de Drep Afrique.

Pour sa part, l’ONG cherche à réduire le coût de l’hydroxyurée, à défaut de pouvoir le rendre gratuit pour les enfants au moins.

Mais il est également nécessaire de former le personnel médical.

“C’est nécessaire d’avoir des centaines de médecins, d’infirmiers et de spécialistes formés au traitement de la drépanocytose en Afrique”, recommande-t-il.

“C’est cela qui nous pousse à créer un diplôme universitaire dédié au traitement de cette maladie, dans le cadre d’une coopération entre la France et l’Afrique”, explique-t-il.

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