Africa-Press – Guinee Bissau. Le président ghanéen Nana Akufo-Addo a résumé, hier, la situation du continent en une seule phrase. « La résurgence des coups d’État dans notre région est un sujet de grave préoccupation. Cette évolution remet en cause le mode de vie démocratique qu’on a choisi. » Un coup d’œil sur la carte suffit pour le constater : quatre coups de force en 18 mois, deux au Mali, un en Guinée et le plus récent, il y a moins de 10 jours, au Burkina Faso. Et mardi, un autre pays de la région, la Guinée-Bissau, a été le théâtre d’une tentative de coup d’État, avorté. Et comme l’a constaté le président sénégalais Macky Sall, selon des propos rapportés par un de ses proches à l’AFP, « il nous faut réfléchir sur ces coups d’État, malgré les sanctions que nous prenons ». Présent au sommet, le représentant spécial de l’ONU en Afrique de l’Ouest et au Sahel (Unowas), Mahamat Saleh Annadif, « a souligné l’importance de coordonner davantage les efforts de la Cedeao, l’Union africaine et les Nations unies pour assurer une transition rapide » au Burkina.
Envoi de soldats sur place
Au point que la Cedeao a décidé de l’envoi d’une force pour stabiliser la Guinée-Bissau, où le président Umaro Sissoco Embalo, 49 ans, au pouvoir depuis 2020, a échappé cette semaine à une tentative de coup d’État qui a fait 11 morts. Le communiqué de la Cedeao, publié jeudi soir à l’issue d’un sommet de ses dirigeants à Accra, ne précise pas la date de déploiement de cette force ni sa composition. La Cedeao, en raison des « derniers développements » en Guinée-Bissau, « décide de l’envoi d’une force d’appui à la stabilisation du pays », indique le communiqué.
Le gouvernement a par ailleurs décrété deux jours de deuil national à compter de samedi. Le drapeau national sera mis en berne sur tous les édifices publics, les salles de spectacle seront fermées et les divertissements interdits, indique le décret. Le texte impute à des militaires la tentative avortée de coup d’État de mardi. Le palais du gouvernement, situé sur la route de l’aéroport, a été attaqué par des hommes armés pendant que le chef de l’État et les membres de son gouvernement y tenaient un conseil des ministres extraordinaire. Umaro Sissoco Embalo est sorti indemne du palais du gouvernement, théâtre d’échanges de tirs nourris pendant plusieurs heures. Onze personnes sont mortes dans cet assaut, selon le gouvernement. « Cet acte a été commis par un groupe de bandits qui voulaient prendre le pouvoir sous les ordres d’un autre groupe comme eux », a encore insisté, jeudi, devant la presse le dirigeant bissau-guinéen qui invitait les populations à vaquer à leurs occupations. « Les frontières aussi bien aériennes que terrestres ne sont pas fermées. Que chacun retourne dans son service, le calme étant revenu », a dit l’ancien général de brigade, étroitement gardé.
Le mystère subsiste sur les motivations des assaillants. Les spéculations vont d’une volonté d’éliminer un dirigeant qui troublerait les trafics prospères de cocaïne ou de bois aux vives tensions politiques entre président, Premier ministre et Parlement, en passant par l’effort du président pour imposer son autorité à une armée toute-puissante.
Maux complexes
La Cedeao avait déployé une force pour la stabilité et la sécurité en Guinée-Bissau (Ecomib) après le coup d’État d’avril 2012 qui avait renversé le Premier ministre Carlos Gomes Junior, entre les deux tours de la présidentielle, dont ce dernier était le favori. Cette force était chargée de protéger les chefs d’institution et les édifices publics. Formée de plus de 1 000 militaires, gendarmes et policiers sénégalais, togolais, burkinabè et nigérians, elle a quitté le pays en septembre 2020 à la fin de son mandat, après avoir permis de garantir la stabilité du pays pendant huit ans. La Guinée-Bissau, petite nation d’environ deux millions d’habitants, frontalière du Sénégal et de la Guinée, est abonnée aux coups de force. Depuis son indépendance du Portugal en 1974, elle a connu une kyrielle de coups d’État, militaires ou non, dont le dernier à avoir réussi remonte à 2012.
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