Africa-Press – Guinee Bissau. Bouche-toi le nez, ça passera mieux », conseillons-nous aux enfants face à un médicament. Cette sagesse populaire vient de notre compréhension intuitive de l’importance de l’odorat dans la perception des saveurs. Une nouvelle étude démontre que ces deux sens sont encore plus entremêlés qu’on ne le pensait, puisqu’ils sont immédiatement traités ensemble par la zone du cerveau chargée de reconnaître les saveurs – et non codées séparément puis combinées plus tard, démontre une nouvelle étude publiée dans la revue Nature Communications.
« Nous savions déjà que les odeurs et les saveurs empruntent des voies parallèles, tant au niveau des sens eux-mêmes (le goût provenant des papilles gustatives dans la bouche et l’odorat provenant des récepteurs dans le nez) qu’au niveau du cerveau: le goût est traité dans l’insula, tandis que l’odorat est traité dans le cortex piriforme, éloignés l’un de l’autre. Traditionnellement, on pensait que ces deux sens n’étaient intégrés que beaucoup plus tard, dans le cortex orbitofrontal », résume auprès de Sciences et Avenir la chercheuse Putu Agus Khorisantono, première autrice de ces nouveaux travaux. Les résultats obtenus éclairent le fonctionnement de notre perception de saveurs sous un nouveau jour.
Des odeurs sans goût et des goûts sans odeur
A l’IRM fonctionnelle, qui permet de visualiser l’activation des régions cérébrales en temps réel, 25 personnes ont oralement expérimenté différents liquides qui avaient soit uniquement une odeur, soit uniquement un goût qu’ils devaient identifier. « Le goût sucré provenait d’une solution de saccharose, tandis que le goût salé provenait d’une solution de glutamate monosodique. Quant aux arômes, nous avons utilisé des solutions d’arômes aromatiques tels que la framboise, le sirop doré ou le bouillon de poulet », décrit Putu Agus Khorisantono.
Comme attendu, l’insula est activée par le goût… Mais pas seulement. La partie antérieure de l’insula est également activée par l’odorat seul, et d’une manière similaire à celle du goût correspondant. « Cela implique que le cortex ‘gustatif’ est en réalité une partie de l’insula, et que les autres parties intègrent les informations gustatives avec les odeurs », conclut la chercheuse.
Goût et odeur traités ensemble, très tôt
En clair, lorsqu’on mange, l’insula ne se contente pas de traiter le goût comme on le pensait auparavant, mais s’active également de la même manière à la perception des odeurs provenant des aliments dans la bouche. « Cela signifie que l’insula agit comme un centre d’intégration précoce et crucial, fusionnant ces signaux sensoriels distincts en une identité gustative unifiée, plutôt que de les traiter séparément et de les combiner beaucoup plus tard dans d’autres régions du cerveau », ajoute Putu Agus Khorisantono. En outre, les régions activées dans l’insula étaient différentes selon que le goût ou l’odeur était identifié comme sucré ou salé. « Nous avons pu différencier le sucré du salé dans toutes les parties de l’insula que nous avons testées », confirme la chercheuse.
Un mécanisme d’acquisition des préférences gustatives
Il est complexe de séparer les expériences sensorielles liées aux odeurs de celles liées au goût. Lorsque nous mangeons, les odeurs atteignent les récepteurs du nez par l’arrière de la bouche, c’est ce qu’on appelle l’odeur rétronasale. « La distance plus courte et la chaleur du corps rendent certaines odeurs plus perceptibles par voie rétronasale », explique Putu Agus Khorisantono. « C’est pourquoi parfois, un verre de vin peut ne pas avoir une odeur forte lorsqu’on le sent, mais avoir un arôme très prononcé lorsqu’on le boit. »
Si c’est important, c’est que les odeurs reçues par cette voie pourraient ensuite modeler le traitement par notre cerveau des odeurs dites « orthonasales », c’est-à-dire perçues uniquement par l’odorat. « Nous pensons que l’odeur rétronasale est importante car elle peut être le lien permettant d’apprendre de nouvelles préférences gustatives », anticipe la chercheuse. Les odeurs orthonasales, se basant sur ces préférences, seraient ensuite utilisées pour guider le comportement alimentaire. « Ce mécanisme d’intégration gustative de base a des implications directes sur l’acquisition des préférences gustatives et l’établissement des habitudes alimentaires », conclut Putu Agus Khorisantono.
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