Le “talon d’Achille” du cancer de la prostate ou comment affamer la cellule cancéreuse pour la tuer

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Le “talon d’Achille” du cancer de la prostate ou comment affamer la cellule cancéreuse pour la tuer
Le “talon d’Achille” du cancer de la prostate ou comment affamer la cellule cancéreuse pour la tuer

Africa-Press – Guinee Equatoriale. 000 cas par an en France, le cancer de la prostate est le cancer masculin le plus fréquent. Si la survie des hommes qui en sont atteints s’améliore, d’après le panorama 2024 de l’Institut national du cancer, les récidives et les stades avancés ne sont que peu sensibles aux traitements traditionnels. En cause: certaines mutations du gène TP53, célèbre dans la lutte contre les cancers. Il existe des thérapies qui permettent parfois de restaurer la fonction de ce gène dit “gardien du génome”. Mais l’efficacité de ces techniques dépend beaucoup du type de mutation qui affecte le gène. Autrement dit, toutes les mutations ne se valent pas et parfois il est très difficile de rétablir sa fonction.

Des chercheurs de l’Ecole de médecine de l’Indiana ont testé une nouvelle voie thérapeutique, et leurs résultats sont prometteurs. Mais sur quelle vulnérabilité cette nouvelle méthode repose-t-elle ? La survie des cellules de tumeur prostatique dépend des fournisseurs qui leur apportent les acides aminés (briques d’assemblage des protéines) dont elles ont besoin, et qu’elles ne peuvent pas produire. Le gène GCN2 est le chef d’orchestre de ces allers et venues vitales. Priver les cellules cancéreuses du gène GCN2, c’est un peu comme les assiéger: dépourvues des acides aminés essentiels à leur survie, elles meurent. Cette étude, menée par Kirk Staschke et Ronald Wek, a été publiée dans la prestigieuse revue Science.

TP53, “gardien du génome” (surtout chez les éléphants)

TP53. Derrière ce nom énigmatique, se cache un gène, et une protéine, d’une importance capitale. “Il s’agit d’un gène suppresseur de tumeur. Il est notamment responsable de l’intégrité du génome et du contrôle du cycle cellulaire”, éclaire Kirk Staschke, lors d’une interview pour Sciences et Avenir. Son surnom de “gardien du génome” n’a donc pas été choisi au hasard. Mais comment fonctionne-t-il ? Ce gène code pour une protéine, appelée p53. Celle-ci se lie à l’ADN et joue le rôle de sentinelle en détectant les dommages causés aux brins. Quand l’ADN est endommagé, elle émet des signaux pour initier une réparation et si celui-ci ne peut pas être réparé, p53 empêche la cellule de se diviser et lui donne l’ordre de se suicider (c’est l’apoptose). Un processus qui permet que l’erreur ne se multiplie pas au cours des divisions cellulaires.

TP53 est donc l’un des gènes les plus altérés dans les cancers. Dans plus de 50% des cancers, le gène est muté: la protéine p53 est défaillante, voire inexistante. Les cellules endommagées se multiplient donc de manière anarchique. Fait surprenant: les éléphants n’ont d’ailleurs pas ce problème. Si l’homme possède un seul gène TP53 (en deux “versions”, ou allèles), les éléphants, eux, en ont… 20 (soit 40 allèles) ! C’est pourquoi ils sont très peu atteints de cancers.

Plusieurs traitements contre le cancer reposent sur p53 pour induire la mort des cellules cancéreuses. De nombreuses études se concentrent donc sur la restauration de la fonction de la protéine. Mais cette prouesse n’est pas toujours possible.

Restaurer p53 VS attaquer le fournisseur

“Il est très difficile de cibler directement les protéines comme celle-ci”, déplore Ronald Wek, co-auteur de l’étude. C’est pourquoi les scientifiques ont cherché une vulnérabilité dans le métabolisme des tumeurs de la prostate. “Nos travaux montrent qu’inhiber le gène GCN2 pourrait être un moyen de traiter le cancer de la prostate à un stade avancé, quand la fonction de p53 est perdue”, ajoute-t-il. En effet, ce gène est essentiel à l’expression des transporteurs d’acides aminés, en particulier ceux qui importent les acides aminés depuis l’extérieur de la cellule, et que la cellule ne peut donc pas synthétiser elle-même.

“Les cellules tumorales ont des besoins accrus en acides aminés pour alimenter le métabolisme et la croissance de la tumeur et, dans le cas du cancer de la prostate, GCN2 est très actif pour retenir les nutriments nécessaires à la croissance de la tumeur”, indique Kirk Staschke. Les cellules cancéreuses dépendent donc des transporteurs, qui font pénétrer les acides aminés à l’intérieur de leur membrane. Mais à quoi servent ces acides aminés ? Qu’ils soient importés ou synthétisés, ils sont ensuite assemblés en protéines ou peuvent servir d’intermédiaires pour synthétiser d’autres molécules, tels que les purines, qui fournissent l’énergie aux cellules. L’équipe de Kirk Staschke tenait la vulnérabilité métabolique de ces tumeurs !

Grâce à une petite molécule, appelée GCN2iB, les chercheurs ont donc inhibé le gène dans des lignées cellulaires de tumeurs de la prostate chez l’homme, la souris et dans des organoïdes. Et leur hypothèse s’est confirmée: la perte de ce gène, des transporteurs d’acides aminés et donc des molécules telles que la purine, aboutit à la mort des cellules cancéreuses. “Les cellules déficientes en p53 ne sont pas capables de faire face au manque de purine”, se réjouit Ronald Wek. Ces résultats se sont d’ailleurs vérifiés lorsque les chercheurs ont inhibé le gène directement chez les souris.

“Nous espérons qu’avec ces nouveaux travaux, nous pourrons commencer à réfléchir à de nouvelles stratégies thérapeutiques pour cibler les tumeurs avancées de la prostate”, concluent les chercheurs. D’autres études soutiennent également l’idée qu’affamer les cellules cancéreuses en ciblant GCN2 pourrait constituer un traitement efficace. Il se pourrait donc que cette approche soit plus largement applicable, en tant que nouvelle stratégie de lutte contre les cancers.

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