Africa-Press – Madagascar. De la quête affirmée d’autonomie stratégique au « moment africain » dans la gouvernance mondiale, illustré notamment par l’organisation pour la première fois d’un sommet du G20 sur le continent, l’Afrique, portée par sa résilience et le renforcement de ses liens avec le Sud global, s’impose désormais comme un acteur central de l’agenda mondial du développement, estiment des experts africains.
Sur le plan politique et sécuritaire, cette aspiration à l’autonomie stratégique s’est traduite par une remise en cause accrue des présences militaires occidentales. En juillet, la France a remis aux autorités sénégalaises ses deux dernières installations militaires dans le pays, marquant ainsi la fin de sa présence militaire permanente en Afrique de l’Ouest et centrale.
Dans le même esprit, l’Union africaine a placé en février son sommet sous le thème « Justice pour les Africains et les personnes d’origine africaine à travers les réparations », traduisant une volonté croissante de promouvoir la justice réparatrice et la guérison raciale à travers le continent.
« L’Afrique est en train de s’éveiller et (estime) que les pays qui l’ont autrefois colonisée et qui pensent pouvoir continuer à opprimer ce continent doivent réévaluer leurs politiques », a noté James Arrey Abangma, professeur de sciences politiques à l’Université de Buéa au Cameroun.
Sur le plan économique, face aux risques liés à l’unilatéralisme et au protectionnisme, le continent mise de plus en plus sur la coopération Sud-Sud et cherche à dynamiser le commerce intra-africain à travers la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf).
La Chine est un moteur clé de la croissance du Sud global, souligne Dennis Munene, directeur exécutif du Centre Chine-Afrique de l’Institut africain de politique du Kenya. Le traitement progressif au tarif douanier zéro sur 100% des lignes tarifaires offert par la Chine en faveur d’une cinquantaine de pays africains, couvrant l’agriculture, les minerais, le textile et les produits manufacturés, favorise l’industrialisation du continent, stimule les échanges et contribue à corriger des déséquilibres commerciaux structurels, a-t-il ajouté.
Des avancées substantielles ont également été réalisées dans la construction de la ZLECAf, avec la ratification de l’accord par 47 pays, a rappelé Balew Demissie, consultant à l’Institut éthiopien d’études politiques. « Avec un marché regroupant environ 1,4 milliard de personnes et un PIB combiné d’environ 3.400 milliards de dollars, la ZLECAf vise à stimuler le commerce intra-africain en éliminant les barrières commerciales, en particulier pour les biens à forte valeur ajoutée ».
UN « MOMENT AFRICAIN » DANS LA GOUVERNANCE MONDIALE
M. Munene qualifie l’année 2025 d' »annus mirabilis » pour l’Afrique, évoquant l’organisation inaugurale d’un sommet des dirigeants du G20 sur le continent, en Afrique du Sud. « Cela illustre l’ascension de l’Afrique et sa revendication d’une place légitime à la table des décisions mondiales », estime-t-il.
Fin novembre, le sommet du G20 s’est tenu à Johannesburg, mettant l’accent sur l’agenda de développement du Sud global, en particulier des pays africains. En rupture avec la tradition, une déclaration des dirigeants a été adoptée dès la cérémonie d’ouverture, malgré le boycott des Etats-Unis.
Pour la première fois hôte d’un sommet du G20, le continent africain, aux côtés d’autres pays du Sud global, a joué un rôle central dans l’orientation des discussions, plaçant les priorités de développement, les perspectives propres et les solutions locales de l’Afrique au cœur des débats sur la réforme de la gouvernance mondiale.
Selon Hassan Khannenje, expert de l’Institut international d’études stratégiques The HORN au Kenya, « en 2025, le Sud global se contente plus de ‘s’élever’, il redéfinit les règles et les institutions », et « le récit du Sud global est passé de la demande d’assistance à la proposition de solutions ».
Portée par sa résilience et le renforcement de ses liens avec le Sud global, l’Afrique se trouve désormais au cœur de l’agenda mondial du développement. Avec une histoire commune marquée par la lutte contre l’oppression coloniale et la quête d’un développement indépendant, l’Afrique entend désormais peser davantage sur son propre avenir, conclut Humphrey Moshi, directeur du Centre d’études chinoises de l’Université de Dar es-Salam en Tanzanie.
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