Les chroniques de Ragidro : Exportateurs de Litchis VS Transparency International … Un affrontement salutaire ?

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Les chroniques de Ragidro : Exportateurs de Litchis VS Transparency International … Un affrontement salutaire ?
Les chroniques de Ragidro : Exportateurs de Litchis VS Transparency International … Un affrontement salutaire ?

Lalatiana Pitchboule

Africa-Press – Madagascar. Au delà de la polémique quant à l’affrontement judiciaire entre le Groupement des Exportateurs de Litchis (GEL) et Transparency International Initiative Madagascar (TI-IM), que certains doivent regretter d’avoir engagée ( y a pas idée de s’attaquer à TI et TI-IM et à ses dirigeants sur un sujet qui fonde leur ADN : la vérité et la transparence), il était intéressant de caractériser quelques éléments qui fondent le dossier.

Nous produisons globalement 100 000 tonnes de litchi par an dont 20% partent à l’export principalement vers l Europe. Ces 20 000 tonnes de litchi malgache, couvrent encore 80% du marché européen.

Les contraintes logistiques et les exigences des acheteurs européens en font un marché délicat à traiter : les bateaux frigorifiques sont affrétés à des dates précises par les importateurs ; le fruit est périssable et son traitement au soufre exige la plus grande prudence. Conséquence : la campagne de cueillette, de collecte, de transport, de soufrage est extrêmement courte ( 5 à 9 jours) et ne supporte pas de dépassement de délais… A ce jour, le Baltic Klipper et l’Atlantic Klipper, les deux cargos frigorifiques affrétés par les importateurs, doivent déjà naviguer vers les ports européens. Ils déchargeront leur cargaison de litchis soufrés malgaches, entre le 9 et le 12 décembre pour le plaisir des consommateurs des fêtes de Noël.

Dans cette chaine de valeur – producteurs / cueilleurs >> collecteurs / transporteurs >> exportateur [ GEL] >> importateur [Groupe de RUNGIS] >> distributeur [supermarchés] >> consommateur – le rapport entre le prix versé au producteur/cueilleur et le prix sur le marché européen peut être d’un rapport de 1 à 30. Les volumes financiers globaux ne sont pas faramineux, mais les marges dégagées sur le litchi semblent être l’une des plus intéressantes du secteur.

La logistique de transport complexe (affrètement des navires à date) que ne peuvent pas maîtriser les exportateurs, la brièveté de la saison et les contraintes marketing sur un marché extrêmement bref font que les exportateurs (nombreux et regroupés au sein du GEL) confient à un groupement d’importateurs/acheteurs (rares au sein du groupe de Rungis) le pouvoir de fixer les règles du marché : dates d’embarquement et de déchargement, prix … et de contrôler la quasi-totalité des importations européennes en provenance de Madagascar …

De l’autre côté, en amont de la chaine de valeur, cette campagne litchi pour l’exportation va mobiliser quelques 40 000 personnes (*) pour la cueillette, auxquels vont se rajouter les collecteurs/transporteurs (4 000 personnes) et les personnels des plans de soufrage, de transformation et de conditionnement (25 000 personnes)… Cette activité est essentielle en termes de revenus pour des populations qui, dans des zones enclavées, n’auront que peu l’occasion d’autres revenus au cours de l’année.

Sans tomber dans le procès d’intention, on peut aisément imaginer occasion de collusion ou de corruption quand il s’agit de gagner ou de consolider ce qui relève de l’attribution d’un quasi-monopole sur un produit aussi prisé.

Et le problème de la collusion et de la corruption c’est que ces actions faussent le jeu de la concurrence. Dans un marché parfait, la concurrence ferait que les producteurs bénéficient du meilleur prix à l’achat de leur produit … Et la concurrence ferait que le consommateur bénéficie du meilleur prix à l’achat. Dans un marché faussé, on peut largement craindre que l’entente collusive se fasse au détriment de l’intérêt du petit producteur et du consommateur …

Dans ce sens, il fallait que justice se fasse pour faire la lumière sur la réalité des faits incriminés. La prise en compte du signalement de TI-IM et son traitement dans un environnement judiciaire parfait aurait dû fixer les faits de diffamation et dénonciation calomnieuse. Dans un monde parfait, oui … Où le défendeur, de bonne foi, aurait accepté l’enquête et la confrontation .. Au lieu de se défendre de manière dilatoire en attaquant pour calomnie.

Mais cette affaire pose, aux yeux du public et aux yeux de la communauté internationale, un questionnement crucial sur la liberté et l’objectivité de l’appareil judiciaire malagasy : privilégier la plainte du GEL sans prendre en compte la primauté de l’action de TI-IM était pour le moins douteux… Le tollé soulevé ici peut faire l’objet d’une réaction salutaire.

(*) Mais arguer de la mise en péril de 300 000 familles par le signalement de TI IM relève quelque peu de la manipulation grossière. D’autant que les faits incriminés concernant la période 2010-2021, la campagne litchi 2022 et les accords conclus depuis entre importateurs français et le GEL ne devraient donc pas faire l’objet d’une quelconque remise en cause.

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