Affaire Boeing 777: des EnquêTeurs du FBI À Madagascar

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Affaire Boeing 777: des EnquêTeurs du FBI À Madagascar
Affaire Boeing 777: des EnquêTeurs du FBI À Madagascar

Mandimbisoa R.

Africa-Press – Madagascar. Le gouvernement l’assure haut et fort: la présence d’agents du FBI à Madagascar n’est en aucun cas une ingérence étrangère mais résulte d’une initiative souveraine. Dans l’affaire retentissante des cinq Boeing 777 immatriculés provisoirement à Madagascar et retrouvés en Iran, le Premier ministre Christian Ntsay insiste: « c’est Madagascar qui a sollicité l’expertise américaine pour faire toute la lumière sur un dossier à forte connotation géopolitique ». Une déclaration destinée à faire taire les doutes et les soupçons d’ingérence étrangère dans une affaire qui mêle aviation civile, réseaux transnationaux et faux documents.

Si le FBI est ici, c’est à notre demande en vue de faire des enquêtes, a déclaré Christian Ntsay lors de la cérémonie de prestation de serment des membres de la Commission malgache de l’informatique et des libertés (CMIL) hier. La venue des enquêteurs américains est motivé par la complexité de l’affaire, qui implique des ramifications internationales allant de la Chine à l’Iran, en passant par l’Indonésie et le Cambodge, selon le premier ministre.

L’affaire remonte à janvier 2025, lorsque cinq appareils Boeing 777 ont été immatriculés à Madagascar sous le régime d’immatriculation provisoire. Selon les documents officiels, ces avions devaient transiter par le Kenya pour maintenance. Pourtant, ils ont été identifiés quelques semaines plus tard à Téhéran, intégrés à la flotte de Mahan Air, une compagnie aérienne iranienne sous le coup de sanctions internationales, notamment américaines. Cette manœuvre a mis la Grande Île dans une position diplomatique délicate, alors que les autorités malgaches affirment avoir été dupées.

Selon les premières conclusions de l’enquête menée localement, les documents délivrés par l’Aviation Civile de Madagascar (ACM) auraient été falsifiés. Les certificats de navigabilité et les contrats d’immatriculation, initialement valables pour une courte durée, auraient été prolongés de manière illégale. Deux suspects principaux ont été arrêtés, un Malgache dénommé Heriniaina Rijasoa Andriamananarivo, et un ressortissant indien, Singh Khushwinder, tous deux accusés d’avoir manipulé les documents pour permettre à ces avions d’être utilisés à des fins non déclarées. Dans la foulée, Valéry Ramonjavelo, ministre des Transports au moment des faits, a été limogé.

La société impliquée dans cette opération, UDAAN Potentials Ltd, serait une entité écran, servant d’intermédiaire opaque entre les véritables opérateurs des aéronefs et les autorités d’immatriculation. Les services de renseignement internationaux soupçonnent un montage destiné à contourner les sanctions imposées à l’Iran, en utilisant l’immatriculation malgache comme couverture légale. L’affaire, qui mêle aviation, diplomatie et criminalité financière, pourrait impliquer des réseaux transnationaux opérant depuis l’Asie du Sud-Est.

Face à la gravité des faits, le gouvernement affirme avoir fait appel au FBI pour appuyer les investigations. Le choix de collaborer avec l’agence fédérale américaine ne tient pas seulement à sa réputation en matière d’enquêtes complexes, mais aussi à l’enjeu politique de l’affaire. Il s’agit pour Madagascar de démontrer sa volonté de transparence et sa fermeté dans la lutte contre toute tentative d’instrumentalisation du pays à des fins criminelles. « Cela nécessite des enquêtes approfondies et costaudes », a insisté Christian Ntsay, qui assure désormais l’intérim du ministère des Transports.

Ce recours à une puissance étrangère pour une enquête judiciaire est rare, voire inédit, dans l’histoire du pays. Il souligne l’ampleur du scandale, qui ébranle les plus hautes sphères de l’administration, mais surtout, il pose la question de la vulnérabilité des institutions nationales face à des réseaux internationaux bien organisés. Pour les observateurs, cette affaire pourrait bien marquer un tournant dans la politique de coopération judiciaire de Madagascar, souvent critiquée pour son manque de transparence et de rigueur.

Parallèlement à l’enquête judiciaire, les implications diplomatiques de cette affaire ne sont pas négligeables. Madagascar, qui cherche à consolider ses relations avec les États-Unis et à garantir son éligibilité à des programmes comme l’AGOA, se devait de prendre des mesures fortes. La présence du FBI sur le territoire malgache est donc aussi un signal adressé aux partenaires internationaux: la Grande Île entend assainir ses procédures et éviter à tout prix d’être perçue comme un maillon faible dans la lutte contre les trafics aériens et financiers.

Reste désormais à savoir jusqu’où ira cette enquête, et si des responsabilités plus haut placées pourraient être mises en cause. Une chose est certaine: l’affaire des Boeing 777 n’a pas fini de faire parler d’elle. Le gouvernement sous pression nationale et internationale, joue une partie délicate entre volonté de transparence, sauvegarde de sa souveraineté, et nécessité de rendre des comptes.

Source: Madagascar-Tribune.com

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