Le Paradoxe de L’obésité : Manger Trop Riche Diminue L’Envie de Nourriture Calorique, mais pas Sa Consommation

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Le Paradoxe de L’obésité : Manger Trop Riche Diminue L’Envie de Nourriture Calorique, mais pas Sa Consommation
Le Paradoxe de L’obésité : Manger Trop Riche Diminue L’Envie de Nourriture Calorique, mais pas Sa Consommation

Africa-Press – Madagascar. Saviez-vous qu’un régime alimentaire trop riche ou l’obésité diminuent fortement le plaisir que procure l’alimentation calorique ? Le responsable de cet apparent paradoxe est une protéine produite par certains neurones et nommée neurotensine, qui influe fortement sur le « circuit de la récompense » reposant sur la dopamine, révèlent de nouveaux travaux sur la souris publiés dans la revue Nature. Des résultats que les auteurs espèrent ultimement utiles pour le traitement de l’obésité et peut-être des troubles du comportement alimentaire.

Un régime alimentaire calorique diminue l’envie de manger calorique

Dans leur cage, les souris observées par les scientifiques choisissent systématiquement la nourriture riche en calories plutôt que la nourriture saine. Après 30 jours de ce régime, les souris devenues obèses sont placées en présence à la fois de nourriture faiblement et fortement calorique. Paradoxalement, les souris obèses ont montré beaucoup moins d’empressement à manger la nourriture calorique que les souris nourries sainement, qui l’ont immédiatement consommée. « Bien que ces souris aient systématiquement préféré la nourriture riche en graisses à la nourriture standard dans leur cage, elles ont paradoxalement manifesté une volonté réduite de consommer de manière opportuniste des aliments riches en calories lors d’un test d’alimentation, même lorsqu’aucun effort n’était nécessaire pour obtenir la nourriture », résument les chercheurs.

La neurotensine, qui active le circuit de la récompense, est affectée par le régime alimentaire

Pour expliquer ce comportement, les scientifiques ont utilisé l’optogénétique, qui permet de contrôler l’activation de neurones génétiquement modifiés au moyen d’une fibre optique implantée dans le cerveau de la souris. Ils pouvaient ainsi stimuler et inhiber à volonté les neurones du noyau accumbens latéral (NAcLat), une région cérébrale qui fait partie du striatum ventral et joue un rôle essentiel dans la récompense et la motivation, et qui influence une autre zone du cerveau appelée aire tegmentale ventrale où est produite la dopamine. Stimuler ce circuit de la récompense augmentait chez des souris nourries sainement le désir de manger des aliments caloriques, mais n’avait aucun effet sur les souris habituées à manger trop riche. Le lien manquant, c’est une protéine produite par le NAcLat appelée neurotensine et déjà connue depuis plusieurs décennies.

« Les neurones producteurs de neurotensine se projettent dans l’aire tegmentale ventrale, où ils influencent les neurones dopaminergiques et modulent la sensibilité à la récompense », explique à Sciences et Avenir Stephan Lammel, neuroscientifique qui a dirigé ces travaux. Autrement dit, la neurotensine produite par les neurones du NAcLat augmente la production de dopamine dans l’aire voisine, l’aire tegmentale ventrale (ATV), entraînant l’envie et la motivation de manger des aliments caloriques. Mais chez les souris qui mangent déjà très riche, la production de neurotensine chute, et le circuit de la récompense tourne au ralenti.

Il était déjà connu chez le rongeur comme chez l’humain qu’un régime alimentaire chronique riche en graisses ou l’obésité peuvent affaiblir la signalisation de la dopamine, sans que l’on sache comment. « Notre étude identifie la neurotensine comme l’un des principaux médiateurs de cette perturbation et établit un lien mécanique entre l’alimentation, l’altération de la fonction dopaminergique et la réduction de l’alimentation motivée par la récompense », explique Stephan Lammel.

Lorsque l’habitude prend le relai du plaisir

Manger riche diminuerait donc l’envie de manger riche… Sans pour autant que les souris changent de régime, puisque même peu motivées elles continuent à choisir une nourriture calorique lorsqu’elles ont le choix. « C’est paradoxal et initialement contre-intuitif », confirme Stephan Lammel. Son explication est très simple: les rongeurs comme les humains ne mangent pas seulement par plaisir, mais aussi par habitude. « Le plaisir et l’habitude sont des systèmes différents dans le cerveau. Même lorsque le plaisir est réduit, les habitudes peuvent perdurer, en particulier pour les aliments riches en calories qui ont été renforcés au fil du temps », détaille-t-il. Alors qu’au fil du temps les régimes riches en graisses réduisent l’impact agréable de la nourriture, les souris persistent donc à consommer de la nourriture riche en graisses par habitude.

Mieux encore, lorsque les niveaux de neurotensine étaient restaurés par manipulation génétique, les souris obèses perdaient rapidement du poids, avaient une meilleure mobilité, moins d’anxiété et montraient à nouveau du plaisir à manger. « Rétablir le plaisir de manger semble aider à recalibrer le comportement, ce qui conduit à une consommation plus équilibrée et à de meilleurs résultats en termes de poids. C’est comme si l’on remettait le ‘cadran du plaisir’ sur un réglage sain », explique Stephan Lammel.

Restaurer la neurotensine pour traiter l’obésité

Les chercheurs ont tout lieu de penser que ces résultats sont aussi pertinents chez l’humain que chez la souris. « Le circuit NAcLat-ATV est conservé chez les mammifères, et des études d’imagerie antérieures chez l’homme ont montré une réduction de l’activité cérébrale liée à la récompense chez les personnes souffrant d’obésité lorsqu’elles regardent ou consomment des aliments appétissants », appuie le neuroscientifique.

Il espère que la restauration de la signalisation de la neurotensine dans ce circuit cérébral pourrait constituer une nouvelle approche pour traiter l’obésité, non pas en supprimant l’appétit, mais en recalibrant le système de récompense afin de rétablir une alimentation équilibrée et axée sur le plaisir. « Cette approche pourrait compléter les thérapies existantes, comme les agonistes du GLP-1, et s’attaquer aux aspects de l’obésité liés à la dévalorisation de la récompense et à l’alimentation émotionnelle », conclut-il, anticipant que ce traitement pourrait probablement s’avérer utile pour les troubles du comportement alimentaire (TCA).

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