Africa-Press – Madagascar. Les résultats français des législatives européennes organisées hier ont produit au moins deux chocs: la victoire du Rassemblement national qui a dépassé la barre des 32%, avec pour conséquence la décision quitte ou double du Président Macron de dissoudre l’Assemblée nationale. Double, si les citoyens prennent finalement peur de la montée de l’extrême-droite et choisissent de redonner confiance à une majorité présidentielle. Quitte, si les législatives anticipées du 30 juin et 7 juillet aboutissent à une cohabitation avec le Rassemblement national (RN). La dynamique qui a été entamée depuis quelques mois de campagne électorale, et confirmée par les résultats hier, montre que la dernière option est plutôt plus que probable.
Quels sont les calculs politiques d’Emmanuel Macron ? Espère-t-il renverser cette dynamique favorable au RN dans les deux semaines à venir, ou bien est-il en train de développer une stratégie à long terme visant à empêcher l’arrivée de Marine le Pen à l’Élysée ? En effet, amener dès à présent le RN au pouvoir dans le cadre d’une cohabitation peut être l’occasion de donner la preuve aux Français que ce parti populiste n’a finalement pas l’envergure de diriger la France. En outre, l’option d’amener Bardella à Matignon peut créer des tensions d’ego entre le Président du RN et Marine le Pen sur le long chemin vers la prochaine présidentielle. On se souvient en effet de la répartition convenue des rôles lors de la cohabitation 1993-1995 entre Chirac et Balladur, avec la trahison de ce dernier, enhardi par les sondages d’opinion favorables. Si les calculs cachés de Macron sont d’amener le RN à Matignon en vue de l’affaiblir pour 2027, là encore ce sera quitte ou double, car ce parti aura quand même deux ans et demi d’opportunités de séduire encore plus, même si ce sont aussi des opportunités de dégâts.
Enfin, l’arrivée au parlement européen d’une vague populiste portée par plusieurs pays (France, mais aussi Allemagne, Pays-Bas et Autriche), et attachée aux valeurs de souveraineté et de nation, va certainement influer sur la politique extérieure de l’Union européenne, mais également sur ses futures orientations, à commencer par le domaine de l’immigration.
Perspectives malgaches…
À Madagascar, les citoyens français ont été un peu plus de 2000 à voter, et la liste du parti d’Emmanuel macron est arrivée en tête avec 22,5% des voix. On note toutefois que les listes d’extrême-droite menées par le RN et le parti Reconquête d’Eric Zemmour totalisent 26%. Les gauchistes de la France insoumise recueillent quant à eux 13%. Toutes les autres listes n’ont pas atteint 10%. Notons que tous ces chiffres sont provisoires.
Ces législatives européennes qui se déroulent à 10.000 kilomètres nous amènent finalement, et une fois encore, à faire le constat de ce qu’est une véritable démocratie, contrairement à la démocratie du werawera qui s’est encore une fois illustrée lors des récentes législatives à Madagascar. Premièrement, la campagne électorale a été un débat d’idées sur des thématiques qui sont importantes pour les Français. À Madagascar, les campagnes électorales se déroulent sur fond de concerts ainsi que de distribution de cuvettes et de jiron’akoho. Deuxièmement, la campagne électorale se déroule de façon libre et équitable, ce qui permet à l’opposition de remporter une élection. À Madagascar, le pouvoir en place traficote le système électoral pour maintenir un environnement qui le favorise dans les résultats. Troisièmement, Emmanuel Macron a eu le courage et l’humilité de prendre en compte l’opinion exprimée par les citoyens, et a agi en conséquence. À Madagascar, l’expression d’opinions contraires à la pensée unique souhaitée par le pouvoir est soit ignorée, soit réprimée. Les votes-sanctions ou les abstentions-sanctions sont dédramatisées, sous des prétextes divers de masturbation intellectuelle.
Il est vrai que quand on s’arrange systématiquement pour que les résultats électoraux donnent l’impression d’un pouvoir populaire, on peut se donner le luxe de faire fi de ce que pense réellement la population. Sur le plan de l’application d’une démocratie réelle et effective, au-delà de l’aspect folklorique et hypocrite de l’inauguration d’une Place qui lui est théoriquement consacrée, le citoyen français Andry Rajoelina serait plutôt avisé d’aller prendre des leçons chez son chef d’Etat.
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