Africa-Press – Madagascar. Au milieu d’une foule, vous voyez une personne en train de danser de manière pataude devant tout le monde. Et puis une autre personne se cogne en public à une porte vitrée avant qu’elle ne s’ouvre. Tout cela est très gênant à voir. On a à la fois un peu honte et un peu pitié pour ces gens et ce genre de réaction a des traductions très concrètes : on rougit, on bafouille, on transpire… Or, une équipe japonaise du département d’informatique de l’université de technologie de Toyohashi montre que cet embarras, lié à la notion d’empathie, peut être provoqué aussi bien par des comportements maladroits d’humains que par ceux de robots.
Leur travail a été publié dans Scientific Reports en septembre 2023 et s’appuie sur une expérience en réalité virtuelle menée avec 24 participants équipés de visiocasques HTC Vive. Les chercheurs ont imaginé et développé quatre scénarios types en vue subjective mettant en scène un avatar numérique. Ce dernier est ainsi vu par le participant dans une salle de classe, en train de danser en public, de marcher au milieu d’une foule ou encore de passer une porte vitrée d’un lieu public.
Quatre scénarios, deux variantes, deux avatars
Chaque scénario se dédouble en une version où il ne se passe rien de notable et une version où l’avatar se ridiculise (il se cogne à la porte, trébuche au milieu des gens, danse n’importe comment, s’assoupit en classe). Et ces huit versions donnent encore lieu, chacune, à deux variantes : dans un cas, l’avatar est un humain, dans l’autre, un robot humanoïde.
Les réactions des participants ont alors été mesurées de plusieurs manières. D’abord par questionnaire, à la suite de chaque visionnage, il leur a été demandé d’estimer leur niveau d’embarras sur une échelle de 7 points, allant de “extrêmement embarrassant” à “extrêmement fier”. Mais ils devaient aussi noter l’embarras que, selon eux, l’avatar devait selon eux éprouver. En clair, essayer de se mettre à sa place.
Pour compléter, durant l’expérience elle-même, des électrodes mesuraient la conductance cutanée, qui permet de suivre l’activité émotionnelle de la personne.
De l’embarras dans le virtuel au réel
Une deuxième expérience exploite exactement les mêmes séquences virtuelles mais sans mesure de l’activité cutanée et avec des questions permettant de savoir ce que le participant penserait et ressentirait si les situations virtuelles s’étaient déroulées sous ses yeux dans le monde réel (“dans quelle mesure pouvez-vous dire que vous vous êtes comporté et avez réagi comme si la situation avait eu lieu en vrai ?”, “dans quelle mesure avez-vous pensé la même chose que face à une situation réelle ?”…).
Les résultats sont assez nets. Les participants se sentent bel et bien gênés quand les avatars se ridiculisent en public, qu’il s’agisse d’humain ou de robots. Dans le cas de la première expérience où il faut noter le niveau d’embarras, celui-ci est globalement plus élevé quand l’avatar représente un humain, mais dans les deux cas, la gêne est là quand l’avatar se cogne dans une porte ou pique du nez en classe. Par contre, la deuxième expérience montre que parfois, en transposant les scènes virtuelles dans une situation réelle, les participants auraient ressenti ou pensé la même chose devant un humain ou un robot.
Quoi qu’il en soit, ce travail indique que des robots peuvent bel et bien susciter une gêne par leurs comportements, un phénomène à prendre en compte dans les situations où des gens devront interagir avec eux. Les chercheurs admettent néanmoins quelques bémols : la réalité virtuelle n’est pas le monde réel, physique ; les réactions peuvent être plus ou moins prononcées dans le deuxième cas que dans le premier.
Dans un autre registre, les situations jugés embarrassantes dans l’étude par les chercheurs ne le seraient peut-être pas dans une autre culture. “La familiarité avec les robots et les attitudes que l’on peut avoir envers eux varient avec les cultures, estime encore l’équipe. Or nos participants étaient en majorité japonais. Pour prolonger ce travail, il faut avoir une approche transculturelle.”
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