Que se passerait-il si une comète fonçait sur la Terre ? « Un objet de 100 km condamnerait tous les organismes vivants ! »

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Que se passerait-il si une comète fonçait sur la Terre ? « Un objet de 100 km condamnerait tous les organismes vivants ! »
Que se passerait-il si une comète fonçait sur la Terre ? « Un objet de 100 km condamnerait tous les organismes vivants ! »

Africa-Press – Madagascar. Dans le prolongement de notre article consacré à l’étude de Jean-Marc Salotti sur le risque d’extinction de l’humanité par l’impact d’un objet géant, le chercheur nous explique pourquoi c’en serait fini de la vie sur Terre et pourquoi et comment l’espèce humaine devra coloniser Mars pour survivre !

Comme annoncé dans notre précédent article « L’extinction de l’humanité par l’impact d’un astéroïde géant est une hypothèse réaliste », Jean-Marc Salotti nous parle du devenir de l’Humanité en cas de collision de la Terre avec des astéroïdes géants ou des comètes à longue période.

Futura : cette étude sur le risque de collision avec des astéroïdes géants ou des comètes géantes à longue période est-elle inédite ?

Jean-Marc Salotti : À ma connaissance oui. J’avais déjà travaillé il y a 15 ans sur les risques de collision avec un astéroïde, mais pas spécifiquement sur les astéroïdes géants. J’ai cherché dans la littérature une réponse à la probabilité d’impact d’un astéroïde géant et je ne l’ai pas trouvée. J’ai donc creusé la question en lisant des dizaines d’articles, notamment sur la formation du Système solaire, sur l’origine des cratères lunaires, sur les différentes catégories d’astéroïdes géants, sur le nombre de comètes géantes présentes dans le nuage de Oort, etc. et j’ai aussi beaucoup discuté avec Sean Raymond qui a orienté mes recherches. Cette étude, Humanity extinction by asteroid impact, m’a pris près de deux ans.

Futura : Quelle est la fiabilité de votre estimation des risques ?

Jean-Marc Salotti : En dehors des incertitudes et des biais possibles qui pourraient conduire à une sous-estimation du risque, il pourrait exister d’autres biais qui pourraient modifier complètement les probabilités. Par exemple, de manière inattendue, le Système solaire pourrait entrer dans une zone galactique avec une forte densité de petits corps et la menace pourrait soudainement être augmentée de plusieurs ordres de grandeur. Les distributions de fréquence de taille actuelle des objets interstellaires suggèrent que la menace posée par de tels objets est très faible, mais comme les modèles sont basés sur des données très limitées, la meilleure réponse à l’évaluation du risque est que nous ne savons presque rien à ce sujet.

Futura : Vous êtes arrivé à la conclusion qu’il semble difficile et incertain de dévier un astéroïde géant de sa trajectoire de collision. L’espèce humaine est-elle vouée à disparaître à la suite d’un impact avec un corps céleste géant ?

Jean-Marc Salotti : Non. Je pense, et tout dépendra du délai d’avertissement, que l’espèce humaine pourrait survivre en s’installant sur Mars par exemple. Si le délai est suffisamment long (au moins un siècle) et si la survie sur Terre est compromise, la solution est en effet de s’installer sur une autre planète et d’atteindre une autonomie totale avant l’impact. De toute évidence, cette option ne concernera qu’un petit nombre d’individus et pour les autres, il faudra essayer de survivre dans des abris sur Terre.

Dévier un astéroïde géant qui menacerait la Terre semble difficile et incertain. © Mopic, Adobe Stock

Futura : Avec la chute d’un objet dix fois plus grand que l’astéroïde qui a provoqué l’extinction du Crétacé, les conséquences seront-elles encore plus catastrophiques ?

Jean-Marc Salotti : C’est sans commune mesure. On s’attend à des changements catastrophiques dans l’écosystème mondial. Si l’extinction du Cétacé a provoqué la disparition d’environ 75 % de toutes les formes de vie, un objet de 100 kilomètres condamnerait pratiquement tous les organismes vivants !

Futura : C’en serait fini de la vie sur Terre ?

Jean-Marc Salotti : Toutes les formes de vie à la surface et sous l’océan seraient tuées, à l’exception peut-être des extrémophiles dans des évents hydrothermaux profonds, s’ils ne sont pas tués par la chaleur ou l’acidification de leur milieu, et des bactéries profondément enfouies dans la croûte terrestre.

Futura : Vous parlez de changements catastrophiques dans l’écosystème mondial. Concrètement, à quoi s’attendre ?

Jean-Marc Salotti : Pour décrire les événements qui se produiraient, je me suis basé sur plusieurs études, dont le modèle de Collins, Melosh et Marcus (2005). Le premier effet serait un immense cratère, peut-être de plus de 1.100 kilomètres de diamètre. En moins d’une minute, une boule de feu irradierait et brûlerait presque tout jusqu’à 4.800 kilomètres autour du point d’impact. Le souffle de l’explosion causerait des destructions massives. Pendant ce temps, d’énormes quantités d’éjections seraient projetées dans l’atmosphère avant de retomber partout dans le monde entier, détruisant forêts, villes, provoquant des tsunamis et des tremblements de terre.

Selon une étude, avec des impacts énergétiques aussi élevés, une conséquence surprenante serait la fonte de la croûte terrestre située exactement aux antipodes de l’impact. Alors que toute vie serait tuée en quelques secondes jusqu’à quelques milliers de kilomètres autour du site d’impact, certaines formes de vie situées de l’autre côté de la Terre survivraient aux effets immédiats. Cependant, l’environnement deviendrait rapidement invivable avec une augmentation mondiale des températures allant jusqu’à plusieurs centaines de degrés Celsius en raison de plusieurs facteurs dont les boules de feu retombant sur Terre, les incendies, l’apparition de volcans dans le monde entier et un terrible effet de serre dû à l’accumulation durable de poussière dans toute l’atmosphère. De plus, la température dépassant les 100 °C, les océans se mettraient à bouillir et une couche de vapeur d’eau brûlante d’environ 100 bars envelopperait la planète.

Futura : Selon vous, le plus grand risque pour l’espèce humaine proviendrait des comètes à longue période plutôt que d’astéroïdes géants ? C’est très étonnant. Les astéroïdes sont pourtant plus nombreux !

Jean-Marc Salotti : Ce n’est pas contradictoire. Cette étude montre que le plus grand risque d’impact à long terme provient des NEO (Near-Earth Objects), qui se trouvent déjà dans le Système solaire intérieur ou qui entreront dans cette zone à l’avenir (par exemple, les Centaures). Mais, le délai d’avertissement serait suffisamment long pour laisser du temps à des humains de s’installer sur une autre planète. Le risque d’extinction serait ainsi beaucoup plus faible que la probabilité d’impact. Le plus grand risque d’extinction est donc associé aux comètes. Cela dit, pour les 100 prochaines années, la probabilité d’impact est faible, de l’ordre de 10-12, mais le délai d’avertissement est si court qu’il est douteux qu’une action puisse atténuer les conséquences.

Futura : Avec une comète géante, les chances de survie de l’espèce humaine sont-elles plutôt faibles, voire nulles ?

Jean-Marc Salotti : Il faut se rendre à l’évidence. Avec un délai d’avertissement aussi court, on ne peut pas partir sur Mars et on a très peu de temps pour se préparer. Pour que des humains survivent sur Terre à une telle catastrophe, ils devront vivre dans des abris, qu’ils soient souterrains, ou aquatiques, pendant plusieurs décennies. Or, et je l’explique dans mon étude, la survie dans ces abris n’est absolument pas garantie pour tout un tas de raisons, parfois en lien avec une ressource vitale comme l’énergie, l’eau ou la nourriture, parfois industrielle ou logistique si on n’est pas en mesure de maintenir ou remplacer un système défaillant, ou encore pour des raisons humaines, par exemple si l’organisation est inadaptée ou si les humains finissent par s’entretuer.

Concept de ville martienne envisagé par SpaceX. © SpaceX

Futura : Vous semblez assez convaincu que « plusieurs milliers » de personnes pourraient être envoyées sur Mars et avoir suffisamment de temps pour se préparer à la disparition de la Terre.

Jean-Marc Salotti : Je ne nie pas les problèmes mais je pense que malgré qu’il n’y ait aucune garantie que l’installation se déroule bien, les principaux problèmes auxquels seraient confrontés ces futurs colons surviendraient avant l’impact. Des solutions pourraient donc être trouvées et mises en œuvre également avant l’impact. Plus le délai d’avertissement sera long et plus il y aura de temps disponible aux humains pour s’adapter aux conditions martiennes et se préparer à vivre en autonomie complète. Je pense qu’il y a donc de bonnes chances qu’un tel projet réussisse.

VOIR AUSSI SpaceX : un document détaille la colonisation de Mars avec le Starship

Futura : Pourquoi Mars plutôt que la Lune, voire coloniser un astéroïde ?

Jean-Marc Salotti : La Lune est également une destination intéressante et certains tenteraient probablement de s’y établir. Cependant, Mars a pour elle d’être une planète proche de la Terre avec une plus grande variété de ressources utiles à une colonie. L’idée est d’exploiter l’énergie solaire, la glace d’eau, abondante dans le sous-sol martien, le dioxyde de carbone de l’atmosphère, des minerais comme l’hématite pour obtenir du fer par exemple, etc. et de s’appuyer sur l’agriculture en serre et une infrastructure industrielle qui permettrait de produire les outils et les objets nécessaires à la survie.

Futura : Aussi intéressante soit cette étude, je doute que les agences spatiales amorcent des programmes précurseurs de colonisation sur d’autres planètes, sauf à penser que ces derniers pourraient trouver une utilité sur Terre ou répondre à des besoins spécifiques aux programmes d’exploration actuels.

Jean-Marc Salotti : Effectivement, vous avez raison. Démarrer la colonisation tout de suite, c’est trop tôt. Il faut d’abord faire des allers-retours pour mieux comprendre les problématiques de survie dans l’environnement martien, identifier les difficultés, et maîtriser le voyage. Cependant, si aucun effort n’est fait pour s’installer sur d’autres planètes, la probabilité d’extinction augmente avec le temps. Par exemple, sans colonisation extraterrestre et uniquement pour la menace posée par les comètes géantes, pour le prochain million d’années, la probabilité d’extinction est supérieure à 10-8, ce qui est élevé compte tenu des conséquences possibles.

Futura : Quel regard portez-vous sur Elon Musk dont on sait qu’il a fondé SpaceX pour établir une colonie martienne pour préserver l’humanité qui dans un premier temps dépendrait de la Terre pour « survivre », puis au fil des années deviendrait autonome.

Jean-Marc Salotti : Je suis sans doute sur la même longueur d’onde que lui. C’est d’ailleurs aussi une des raisons pour lesquelles j’ai réalisé cette étude. Je voulais savoir à quel point il était important de coloniser Mars pour réduire le risque d’extinction de l’humanité. Cela dit, il n’y a pas que le risque lié aux objets célestes, la crise politique internationale fait également craindre le pire. Et il y a d’autres risques globaux mal compris, comme celui d’une intelligence artificielle qui finirait par détruire l’humanité.

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