Un minuscule animal marin à l’origine de nos neurones ?

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Un minuscule animal marin à l’origine de nos neurones ?
Un minuscule animal marin à l’origine de nos neurones ?

Africa-Press – Madagascar. Un petit organisme marin de la famille des placozoaires possède des propriétés cellulaires étonnantes. En effet, des chercheurs ont découvert dans cet animal, de la taille d’un grain de sable et de l’apparence d’un pancake, des cellules se comportant comme des neurones. Leurs travaux sont publiés dans la revue Cell.

Un minuscule organisme, pionnier des animaux sur Terre

Les placozoaires font partie des premiers animaux à avoir peuplé la Terre. Ils sont apparus aux alentours des 800 millions d’années, et sont toujours présents dans nos océans. Dans la classification du vivant (taxonomie), ils sont rangés aux côtés de grands groupes tels que les cnidaires (méduses et hydres), les spongiaires (éponges), les bilatériens (les animaux les plus récents dans l’histoire de l’évolution, allant des étoiles de mer, aux requins, en passant par les oiseaux et les mammifères).

Ces mini-organismes , qui vivent à la surface des rochers, dans des eaux tropicales et subtropicales, sont d’une apparente simplicité. Ils n’ont ni bouche, ni cœur, ni système digestif. Pourtant, ils bougent à l’aide de cils afin de chasser les algues brunes et certains micro-organismes. Récemment, avec l’essor des techniques d’analyses moléculaires, les chercheurs ont découvert plusieurs types cellulaires dont une permettant la “planification” des actions.

Des cellules particulières, précurseurs des neurones

Les scientifiques ont créé, à l’aide de quatre espèces de placozoaires, une carte des différents types cellulaires composant l’organisme. Le résultat est édifiant. En plus de trouver des cellules somatiques “lambda”, caractéristiques de ce type d’êtres vivants, ils ont découvert une catégorie de cellules sécrétrices : les cellules peptidergiques. Derrière ce nom compliqué se cache en réalité une capacité de communication inter-cellulaire ressemblant aux neurones. En effet, une cellule peptidergique sécrète des peptides (protéines à courtes chaines d’acides aminés) capables de déclencher, une fois pris en charge par des récepteurs spécifiques, des actions telles que le mouvement ou la nutrition de l’animal.

A la suite de cette découverte, les chercheurs ont voulu comprendre le fonctionnement de ces groupes de cellules et leurs manières de communiquer. Après avoir fait des analyses cellule par cellule et croisé les résultats entre les différentes espèces, ils ont trouvé que les neuf principaux types cellulaires déjà connus se multipliaient et se divisaient pour assurer la pérennité de l’organisme. Cet équilibre cellulaire est maintenu par des cellules dites “entre-deux” qui peuvent changer de caractéristiques (par exemple, une cellule permettant le déplacement peut changer de conformation moléculaire pour devenir une cellule aidant à la digestion). Ce phénomène n’est pas rare dans le règne animal et se retrouve chez les spongiaires par exemple.

Premièrement, elles semblent venir d’une lignée précurseure (lignée initiale de qui part toutes les transformations cellulaires pour aboutir aux cellules différenciées), qui par ses signatures moléculaires uniques, ressemble fortement à la neurogénèse observée chez les cnidaires ou les bilatériens. Ensuite, un nombre important de gènes est nécessaire pour créer la partie sécrétrice de la cellule (partie qui possède des vésicules contenant les peptides à relâcher). Malgré tout, elle est loin de ressembler à un neurone car il lui manque des parties importantes comme le corps post-synaptique ou encore la capacité de gérer les signaux électriques. Enfin, d’après des analyses menées à l’aide du deep learning, les cellules communiquent à l’aide d’un processus moléculaire : les GPCr (en anglais “G-Protein Coupled receptor”). Ces protéines permettent, une fois le signal primaire reçu (ici ce sont les peptides évoqués plus haut), de déclencher une cascade de réponses chimiques à l’intérieur de la cellule, se terminant par une action générale de l’organisme (par exemple, le mouvement ciliaire, qui est une flexion répétée des cils, semblable à un balayage et qui permet de bouger). “C’est comme regarder une des fondations de l’évolution des neurones”, déclare dans un communiqué Sebastián R. Najle, l’un des co-auteurs de l’article.

Un remaniement de l’arbre phylogénétique ?

Cette découverte renvoie à la question de la place des placozoaires dans l’arbre de vie. D’abord considéré comme proche des spongiaires, les nouvelles évidences prônent pour une affiliation avec le taxon des cnidaires, voire même celui des bilatériens. Les chercheurs ont réussi à mettre en lumière un des premiers blocs à la base de l’histoire de la formation du système nerveux. Au cours de l’évolution, des nouveaux modules se sont greffés à ce bloc primitif, tel que l’apparition des axones, des dendrites, des capacités de traitements des signaux électriques et ioniques. Ainsi, nous obtenons les neurones modernes. De plus, les placozoaires possèdent ces cellules peptidergiques, et ce phénomène est unique dans les branches ancestrales de l’arbre (non présentes chez les spongiaires ou encore les cténophores). La question des convergences évolutives se pose, tant le chemin parcouru par le système nerveux semble complexe et ramifié.

“Les placozoaires n’ont pas de neurones, pourtant nous avons trouvé des similarités moléculaires étonnantes avec nos cellules neurales. Les cténophores ont un réseau neural à la fois très différent et similaire au nôtre. Les neurones ont-ils évolué une fois puis ensuite divergé, ou alors ont-ils évolué plusieurs fois en parallèle ? Proviennent-ils d’une mosaïque dont chaque pièce provient d’une origine différente ? Ce sont des questions qui méritent qu’on s’y intéresse”, conclut dans un communiqué le docteur Xavier Grau-Bové, co-auteur de la publication.

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