Africa-Press – Mali. Au Mali, les autorités de transition ont annoncé, au soir du samedi 3 juillet, un remaniement ministériel. Aucun changement majeur parmi les poids lourds et les postes régaliens – le Premier ministre Choguel Maïga est maintenu – mais douze nouveaux venus malgré tout dans l’équipe gouvernementale. Un remaniement à lire dans le contexte du processus électoral en cours.
Ce remaniement survient deux semaines après le référendum constitutionnel dont les résultats très contestés n’ont pas encore été proclamés par la Cour constitutionnelle.
Cependant, pour le sociologue Brema Ely Dicko, spécialiste de la politique malienne à l’Université de Bamako, le remaniement acte le succès, aux yeux des autorités, de ce référendum : « Pour certains ministres, où il y a eu une confiance à renouveler, c’est une façon de remercier les acteurs qui ont contribué à la réussite du référendum auquel tenait le président de la transition. Le second élément important, c’est une façon de faire appel à des technocrates. Tous ceux qui ont été nommés sont des gens qui ont une certaine expertise dans le domaine pour lequel on leur aura confié une nouvelle mission. »
Après le référendum, les autorités maliennes de transition ont prévu d’organiser des élections communales – théoriquement le mois dernier, aucune nouvelle date n’a été communiquée – puis des législatives à l’automne et enfin la présidentielle, en février 2024.
Pour Brema Ely Dicko, le remaniement ministériel témoigne d’une volonté d’apaisement en vue de ces élections : « On a réduit le nombre de ministres M5 pour pouvoir faire la place à d’autres qui ne sont ni M5 ni tout à fait pro-militaires. »
Une volonté d’apaisement qui ne va pas non plus jusqu’à intégrer des personnalités de l’opposition : « Ces membres de l’opposition étaient tous contre le référendum. Les échéances électorales restent à venir. À mon avis, les négociations vont continuer pour faire en sorte qu’ils soient là lors des élections communales et présidentielles. »
Les ministres qui pèsent le plus – le colonel Sadio Camara à la Défense, le colonel Abdoulaye Maïga à l’Administration territoriale, ou Abdoulaye Diop aux Affaires étrangères – ont conservé leurs postes. Les spéculations allaient bon train concernant le Premier ministre Choguel Maïga mais il l’a conservé, lui aussi.
« Un acte de rupture », pour certains cadres de groupes armés
Du côté des groupes armés, tout le monde n’a pas la même lecture de ce remaniement.
Chez les ex-rebelles de la CMA, Mahmoud Ould Mohamed est débarqué – il était à l’Industrie -, Mossa Ag Attaher passe de la Jeunesse au portefeuille des Maliens établis à l’extérieur. En ce qui concerne la Plateforme, Harouna Toureh sort du gouvernement. Il était à la Communication, poste récupéré par Alhamdou Ah Ilyène, jusqu’ici aux Maliens de l’extérieur. Alhamdou Ag Ilyène n’est pas officiellement membre de la Plateforme mais c’est bien à l’initiative de cette mouvance des groupes signataires de l’accord de paix que ce proche du général Ag Gamou était entré dans le gouvernement de Transition.
Les représentants des groupes signataires passent donc de quatre à deux, avec un équilibre respecté entre les deux principales tendances.
Aucun des quatre ministres et ex-ministres directement concernés n’a souhaité s’exprimer.
« Les groupes n’ont pas été consultés, c’est un acte de rupture » considèrent plusieurs cadres des groupes signataires, de la CMA comme de la Plateforme, qui déplorent la dégradation consommée et continue des relations entre les autorités et les groupes signataires de l’accord de paix. Pour eux, la présence au gouvernement de Moussa Ag Attaher et d’Alamdou Ag Ilyène relève de l’« affichage ».
Un affichage malgré tout accepté par les groupes armés, afin de ne pas rompre avec les autorités et de préserver les chances de relancer l’accord de paix. « Ce remaniement ne me fait ni chaud ni froid », tempère d’ailleurs un autre important cadre, plus optimiste sur une reprise du dialogue entre Bamako et les groupes armés.
Sollicité par RFI, le ministère malien de la Réconciliation nationale, en charge des relations avec les groupes armés, n’a pas donné suite.
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