Africa-Press – Mali. Enfouies dans les paysages glacés du Nunavik, au nord du Québec, les roches de la ceinture de Nuvvuagittuq sont les plus anciennes jamais identifiées sur Terre. Âgées de plus de 4,16 milliards d’années, elles ont été datées par une équipe franco-canadienne qui a combiné analyses géochimiques, observations pétrologiques et deux méthodes indépendantes de datation isotopique. Leur étude, publiée dans la revue Science, conforte une hypothèse débattue depuis plus de quinze ans: ces roches sont les derniers témoins de l’Hadéen, la division la plus ancienne des temps géologiques.
Un trésor enfoui sous les basaltes
L’histoire commence en 2017, lorsque Christian Sole, alors étudiant à l’Université d’Ottawa, prélève plusieurs échantillons dans une zone isolée. Encadré par Jonathan O’Neil, professeur en géologie, le jeune chercheur s’intéresse aux roches volcaniques d’aspect mafique (riches en fer et magnésium) de la ceinture de Nuvvuagittuq. Ces roches avaient déjà fait parler d’elles dès 2008, quand Jonathan O’Neil et ses collègues avaient proposé un âge de 4,28 milliards d’années, sans que cette estimation fasse l’unanimité.
Cette fois, ce n’est pas la roche volcanique elle-même qui est datée, mais une intrusion magmatique venue la traverser plus tard. Or, celle-ci s’est révélée vieille de 4,16 milliards d’années. Ce qui implique que la roche encaissante est plus ancienne encore. Pour établir cette datation, l’équipe a mobilisé deux techniques de chronométrie isotopique basées sur le couple samarium-néodyme (Sm-Nd), un système souvent utilisé pour dater les roches anciennes. Les résultats obtenus dans deux laboratoires différents ont convergé sur le même âge. Un signal robuste, et qui fait, cette fois, consensus.
Une relique de la Terre primitive
À ce jour, aucune autre formation géologique sur Terre n’a livré d’âge aussi ancien. Les zircons de Jack Hills, en Australie, sont plus vieux (4,4 milliards d’années), mais ce sont des minéraux isolés retrouvés dans des roches plus jeunes. À Nuvvuagittuq, c’est toute une structure lithique qui date de cette époque. « Cette confirmation positionne la ceinture de Nuvvuagittuq comme le seul endroit sur Terre où l’on retrouve des roches formées pendant l’Hadéen », précise dans un communiqué Jonathan O’Neil.
Cela change la donne pour l’étude des premiers âges de notre planète. L’Hadéen reste une période mal connue, sans plaques tectoniques identifiées, où les premiers noyaux continentaux se seraient lentement consolidés. Étudier les roches de Nuvvuagittuq, et « comprendre ces roches, c’est remonter aux tout débuts de notre planète », résume le géologue. « Cela nous aide à mieux saisir comment les premiers continents se sont formés et à reconstituer l’environnement où la vie aurait pu émerger ».
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