Un virus a radicalement transformé le cerveau de nos ancêtres

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Un virus a radicalement transformé le cerveau de nos ancêtres
Un virus a radicalement transformé le cerveau de nos ancêtres

Africa-Press – Mali. Et si un rétrovirus était responsable de l’architecture de notre cerveau ? Et même de celle de tous les vertébrés, amphibiens, poissons, reptiles et mammifères. C’est en tout cas l’opinion des chercheurs de l’Institut des sciences de Cambridge qui publient, dans la revue Cell, une étude sur la myéline, un tissu adipeux qui enveloppe les axones. Cette substance contribue à une conduction plus rapide des impulsions nerveuses et sert également de structure de soutien aux nerfs.

La myéline est apparue pour la première fois dans l’arbre de vie à peu près au même moment que les mâchoires (il y a 360 millions d’années) et son importance dans l’évolution des vertébrés est reconnue depuis longtemps, mais jusqu’à présent, on ne savait pas quels mécanismes moléculaires avaient déclenché son apparition.

Une ancienne infection

C’est en travaillant sur les réseaux de gènes mobilisés par les cellules productrices de myéline, les oligodendrocytes, que les scientifiques ont identifié une séquence génétique dérivée d’un rétrovirus et qui est indispensable pour la synthèse de la myéline. Elle a été baptisée RetroMyelin: “elle est essentielle dans l’expression de la protéine basique de la myéline et à d’autres gènes vitaux pour la myélinisation. L’ARN de RetroMyelin se lie à un facteur de transcription, SOX10, et facilite la transcription des gènes critiques de la myéline”, explique, à Sciences et Avenir, Tanay Ghosh, premier auteur de l’article.

Pour s’assurer de la fonction de RetroMyelin, la séquence a été inhibée expérimentalement dans les oligodendrocytes et les cellules progénitrices des oligodendrocytes (les cellules souches dont sont dérivés les oligodendrocytes) de rongeurs. Et ceux-ci n’ont plus été capables de produire de la myéline.

L’équipe a ensuite voulu savoir si RetroMyelin était présent chez d’autres espèces de vertébrés et a recherché des séquences similaires dans les génomes de vertébrés à mâchoires, de vertébrés sans mâchoires et de plusieurs espèces d’invertébrés. Ils ont identifié des séquences analogues dans toutes les autres classes de vertébrés à mâchoires (oiseaux, poissons, reptiles et amphibiens), mais ils n’ont pas identifié RetroMyelin chez les vertébrés sans mâchoire ainsi que chez les invertébrés.

Pas d’origine commune

Il fallait aussi déterminer si l’infection s’était produite une fois chez un ancêtre commun à tous les vertébrés à mâchoires ou si le rétrovirus avait infecté les différents groupes de façon indépendante. Pour répondre à ces questions, les scientifiques ont construit un arbre phylogénétique à partir de 22 espèces de vertébrés à mâchoires et ont comparé leurs séquences de RetroMyelin. L’analyse a révélé que les séquences de RetroMyelin étaient plus similaires au sein des espèces qu’entre différentes espèces, ce qui suggère qu’il y a eu plusieurs vagues d’infection au sein des vertébrés. “Il n’est toutefois pas possible de déterminer le moment où chaque branche a été infectée”, explique Tanay Ghosh.

Et pourquoi cette séquence est-elle absente chez les vertébrés sans mâchoires et les invertébrés ? Ont-ils échappé à ces vagues successives d’infections ? “C’est là aussi une question difficile: le destin des séquences rétrovirales dans le génome d’une espèce, qu’elles restent ou disparaissent, est déterminé par des forces naturelles, comme la façon dont les espèces s’adaptent au fil du temps. Chez certains animaux dépourvus de mâchoires et autres invertébrés, ces restes viraux auraient pu disparaître parce qu’ils n’étaient pas fermement établis. La raison exacte n’est pas encore connue”, explique le biologiste.

Avantage évolutif

“Nos résultats ouvrent une nouvelle voie de recherche pour explorer comment les rétrovirus sont plus généralement impliqués dans l’évolution”, souligne Tanay Ghosh. De fait, RetroMyelin a joué un rôle majeur dans l’architecture du cerveau et du corps des vertébrés à mâchoires: en accélérant les impulsions sans augmenter le diamètre des fibres nerveuses, la myéline a permis de former des cerveaux plus denses avec des nerfs plus proches. De plus, elle fournit aussi un soutien métabolique aux nerfs, ce qui signifie que les nerfs peuvent être plus longs et donc que les corps peuvent être plus grands. Enfin, l’augmentation de vitesse de conduction du signal nerveux a permis à ces vertébrés de réagir plus vite face aux menaces ou en poursuivant une proie, ce qui leur a procuré un indéniable avantage évolutif.

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