Craintes et Tension Impliquant WAGNER sur les Frontières Malo-Mauritaniennes : Causes et Effets !

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Craintes et Tension Impliquant WAGNER sur les Frontières Malo-Mauritaniennes : Causes et Effets !
Craintes et Tension Impliquant WAGNER sur les Frontières Malo-Mauritaniennes : Causes et Effets !

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – Mali. Alors qu’on s’attendait à ce que les relations de voisinage entre le Mali et la Mauritanie allaient prendre une nouvelle tournure positive, notamment après l’annonce par la Mauritanie d’être un acteur essentiel dans l’Initiative du Royaume du Maroc visant à favoriser l’accès des pays du Sahel à l’Océan Atlantique, on constate malheureusement que ces relations viennent d’être entachées par de fortes tensions diplomatiques ces deniers jours.

En effet, les habitants de deux villages mauritaniens adjacents à la frontière malienne se sont réveillés sous le vrombissement de moteurs de voitures appartenant aux forces paramilitaires russes du group de sécurité russe privé « Wagner », qui sont entrées dans leurs villes à la recherche de jeunes maliens qu’elles poursuivaient jusque dans les zones résidentielles de la bande frontalière

Selon des informations publiées parallèlement par des médias maliens et mauritaniens, les jeunes hommes poursuivis sont liés à des groupes armés hostiles à Bamako et se livrent à des combats éclair avec eux, notamment dans les régions du nord proches de la Mauritanie, provoquant de violents affrontements et tirs sur le territoire malien.

• Réactions gouvernementales et diplomatiques

Dans ce contexte, le ministre du Pétrole, de l’Énergie et des Mines, porte-parole du gouvernement mauritanien, Nani Ould Chrougha, a déclaré que l’armée de son pays répliquera intensément contre toute « partie étrangère qui franchirait délibérément nos frontières ».

De son côté, le chef de la junte militaire malienne, le colonel Assimi Goïta, a rencontré le ministre mauritanien de la Défense, Hanana Ould Sidi, le samedi 20 avril 2024 à Bamako, sur fond de vives tensions diplomatiques entre les deux pays, comme l’ont annoncé systématiquement la Présidence malienne et le ministère mauritanien des Affaires étrangères, pour obtenir des éclaircissements.


Le ministre mauritanien de la Défense, Hanana Ould Sidi (à gauche)

Lors de cette rencontre, Ould Sidi a évoqué « les relations fraternelles et historiques qui unissent les deux pays, et a souligné que la préservation et le renforcement de ces liens distingués constituent une responsabilité collective ».

A noter qu’un jour avant, le vendredi, le ministère mauritanien des Affaires étrangères a convoqué l’ambassadeur du Mali à Nouakchott « pour l’informer de la protestation de son pays contre les attaques répétées contre des citoyens mauritaniens innocents et sans défense à l’intérieur du territoire malien ».

Le ministère mauritanien des A.E. a déclaré également dans un communiqué rendu public à l’occasion que: « Cette situation inacceptable perdure malgré les avertissements lancés par notre pays à l’occasion d’incidents similaires, fondés sur le principe du maintien de bon voisinage et de relations étroites entre les peuples mauritanien et malien et les intérêts communs entre les deux pays ».

• Accusations mauritaniennes

Il y a environ deux semaines, la Mauritanie a accusé l’armée malienne et ses alliés russes de poursuivre des militants à l’intérieur du territoire mauritanien, ce qui a poussé Bamako à envoyer une délégation de haut niveau à Nouakchott pour tenter de calmer le jeu.

Dans le même contexte, une source sécuritaire mauritanienne située à la frontière entre les deux pays, a affirmé qu’« Un certain nombre de nos citoyens civils ont été tués par l’armée malienne et des combattants du Groupe Wagner dans les camps mauritaniens à la frontière ».


Eléments wagnériens et maliens

Ladite source a déclaré également: « Nous avons envoyé des preuves à Bamako ».

• Mali – Mauritanie: 2 pays voisins du Sahel africain

La Mauritanie et le Mali sont reliés par une frontière terrestre de plus de 2 235 kilomètres, et sur cette distance des groupes de passeurs sont actifs entre les deux pays et le reste des pays du Sahel. Selon les experts en sécurité, l’une des raisons de la situation sécuritaire fragile fût d’abord le déclin du rôle français au Niger, notamment après le coup d’État qui a renversé un ami proche de Paris, Mohamed Bazoum.

Ceux qui suivent les affaires financières craignent que la région ne soit affectée par les répercussions de la sortie brutale des Français du Niger et de la faiblesse de la supervision américaine depuis la base militaire d’Agadez, sachant que les unités militaires américaines ont été appelées à quitter le territoire nigérien.

C’est ainsi que les escarmouches armées se sont multipliées, faisant des morts entre groupes anti-Bamako et citoyens mauritaniens dans le district d’Adal Bakro du gouvernorat du Hodh Ech Chargui, adjacent à la frontière malienne.

• Forte congestion humaine aux frontières Malo-mauritaniennes

Il est important de rappeler que ces dernières années ont été marquées par des embouteillages dangereux à la frontière mauritanienne-malienne, en particulier après le coup d’État perpétré au Mali. Les incidents survenus dans la bande frontalière, peuplée de villages qui se chevauchent socialement et ethniquement entre les deux pays, ont été variés, certains étant caractérisés par des violences et des effusions de sang entre les citoyens des deux pays.

A noter qu’en septembre 2023, la ville malienne de Léré, proche de la frontière avec la Mauritanie, composée de la ville de Léré et de 17 villages, a été témoin d’affrontements armés entre l’armée malienne et des éléments des mouvements armés de l’Azawad. Les affrontements ont fait des morts dans les deux camps, et une atmosphère d’anticipation a régné qui a affecté le flux des échanges commerciaux à la frontière mauritanienne-malienne.

Quatre ans plus tôt, les mêmes zones ont été le théâtre d’accrochages entre citoyens des deux pays à proximité du poste frontière de « Koki Zamal », débouché commercial de l’État enclavé du Mali, qui dépend du port maritime de Nouakchott pour importer l’essentiel de ses besoins commerciaux.

D’ailleurs, le passage frontalier de Koki Zamal, considéré comme étant le passage officiel entre la Mauritanie et Mali, a été interrompu ces derniers jours, à la lumière de l’émergence d’une crise frontalière entre les deux pays. Ceci a débuté il y a quelques jours après une incursion des forces maliennes et russes de Wagner à la frontière mauritanienne, où des civils mauritaniens ont été blessés.

• Retour sur l’incursion des unités paramilitaires de Wagner sur le territoire mauritanien

Il faut admettre qu’après chaque conflit qui éclate entre les citoyens des deux pays, les forces de sécurité mauritaniennes et maliennes tentent de contrôler la situation et ramener le calme dans la région.

Néanmoins, concernant l’actuel incident, selon le maire de la municipalité de la ville à laquelle appartient l’un des deux villages, Eid Allah Sidi Hanna « des éléments de Wagner avaient pris d’assaut la frontière mauritanienne, notamment les limites du village et se sont lancés à leur poursuite de deux jeunes maliens que les intrus croyaient avoir été abrités par les habitants, et les forces ont commencé à ouvrir le feu sur une maison du village ».

Concernant l’intervention de l’armée mauritanienne, le maire a déclaré ceci: « Notre armée, en un temps record, immédiatement après l’incident, a constaté que les membres des forces de Wagner s’étaient retirés ».

• Réaction d’un expert des Affaires africaines

L’expert des affaires africaines, Ismail Ould Sheikh Sidiya, estime qu’« Il ressort des incidents répétés aux points de contact entre le Mali et la Mauritanie que les persécutions sont fréquentes entre les forces maliennes et les anciens rebelles qui leur sont alliés et les mercenaires étrangers d’une part, et l’aile du Front de soutien à l’Islam et musulmans (JNIM) dirigé par Iyad Ag Ghali, représenté par le Front de la libération du Macina, menée par Ahmadou Koufa, l’adjoint de Iyad au sein de l’organisation, a créé un état d’anticipation et de prudence et a fait de nombreuses victimes civiles des deux côtés de la frontière. ».

L’interaction sociale entre les deux pays affecte la complexité de la scène sécuritaire à la frontière, comme l’a expliqué Sheikh Sidiya: « Compte tenu du chevauchement des terres et des habitants des régions des deux côtés de la frontière et de la difficulté de contrôler les mouvements et déplacements, je m’attends à ce que cette situation perdure à moins que les tirs entre Bamako et ses opposants armés ne cessent officiellement, et il est probable qu’il y ait de nouvelles vagues de migration vers l’intérieur de la Mauritanie, notamment dans la bande peuplée ».

Concernant la spécificité de cette région des pays du Sahel, le chercheur en affaires africaines confirme que la question est liée à « une guerre civile avec les acteurs internationaux, ainsi qu’à de fortes tensions ».

• Argumentations mauritaniennes

L’incident de l’entrée des membres de Wagner sur le territoire mauritanien, a relancé les discussions dans les milieux médiatiques sur les conséquences et le danger de la présence de ces unités paramilitaires privées russes dans un environnement volatile contesté par les défis du terrorisme et de la contrebande, ainsi que le déclin des États centraux dû à la montée en puissance des coups d’État dans les pays de la région du Sahel.

Dans un contexte lié à cette situation, un clip vidéo diffusé sur les réseaux sociaux en Mauritanie a impliqué le commandant du bataillon affecté aux frontières, notamment l’officier Mohammad Al-Mustafa Ould Haidah, s’adressant aux citoyens des villages frontaliers, leur disant qu’ils sont « capables de les sécuriser et qu’ils ne tarderont pas à les protéger ». »

L’officier a ajouté lors de sa conversation vidéo avec les habitants que « déplacer les forces militaires dans une direction spécifique sans connaître le nombre et l’équipement du côté opposé met en danger leur vie et celle des résidents locaux », ajoutant également que « cela nécessite des renseignements sur les engagements promis et la destination et prendre les mesures nécessaires.

Pour sa part, le ministre du Pétrole, de l’Énergie et des Mines et porte-parole du gouvernement mauritanien, Nani Ould Chrougha, a déclaré: « La Mauritanie n’a fermé les yeux sur aucun meurtre de citoyen à ses frontières et a pris toutes les mesures militaires et de sécurité pour protéger ses citoyens ».

Ould Achrouka, qui s’exprimait lors du commentaire hebdomadaire du gouvernement, a affirmé que « l’armée de son pays, en retour, rendra le coup double à toute partie étrangère qui entre délibérément dans nos frontières ».

• Quel sera le sort des relations entre les deux pays

Il n’échappe pas aux observateurs et experts des affaires africaines que le Mali et la Mauritanie entretiennent des relations amicales depuis les années 1960 et la plupart des habitants des provinces frontalières mauritaniennes dépendent du Mali pour leurs besoins, mais la période récente a vu l’imposition de mesures strictes aux passages frontaliers entre les deux pays, quant à la circulation des biens et des personnes.

Toutefois, s’il n’y a pas de facteur extérieur alimentant ce conflit, « les relations entre les deux pays reviendront le plus tôt possible à leur état antérieur », selon le journaliste mauritanien Ahmed Salem Ould Sidi Abdallah, qui a souligné entre-autres que « la première dimension est le conflit entre les grandes puissances dans la région et le penchant de chacun des deux pays vers un pôle différent »

Il a ajouté que « la deuxième dimension est plus subtile que la précédente, et est représentée par les deux pays tombant sous l’influence du rapprochement de chacun d’eux avec l’un des pays majeurs de la région, le Maroc et l’Algérie ».

Concernant la convocation de l’ambassadeur du Mali par le ministère mauritanien des Affaires étrangères, il semble que « La protestation de Nouakchott est un acte fondé sur les normes diplomatiques, en particulier dans les cas où des citoyens innocents sont attaqués et tués de sang-froid à plusieurs reprises par les forces armées, comme c’est fréquent ».

• Le mot de la fin

Nous pouvons affirmer que le Mali s’était empressé de tenter de réparer « l’erreur commise » par un groupe de ses soldats, soutenus ouvertement par des membres du groupe russe « Wagner », lorsqu’ils avaient pris d’assaut deux villages de l’Est de la Mauritanie et ouvert le feu au hasard, blessant plusieurs citoyens.

C’est d’ailleurs ce qui a poussé le président malien Assimi Goïta à anticiper en appelant au téléphone son homologue mauritanien, Mohammed Ould Cheikh El Ghazouani, tôt dans la matinée du jeudi 11 avril 2024, à l’occasion de la fête de l’Aïd al-Fitr, dans le but d’apaiser la tension entre les deux pays, tant les communications sont rares entre eux, sachant que la dernière date du dernier appel téléphonique entre les deux dirigeants remonte à avril de l’année dernière.

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