Africa-Press – Mali. La sous-secrétaire d’État américaine Victoria Nuland a achevé une mission au Sahel. Elle a notamment rencontré Assimi Goïta et Ibrahim Traoré, et tenté d’accroître l’influence américaine dans leurs pays.
C’est un tweet qui n’a pas manqué de surprendre. Publié le 21 octobre par Victoria Nuland, la sous-secrétaire d’État américaine chargée des Affaires politiques, il la montre tout sourire, faisant un « check » avec le Premier ministre malien, Abdoulaye Maïga. Une décontraction étonnante alors que les relations entre leurs deux pays sont pour le moins tendues. Mais symbolique de la tentative d’offensive diplomatique lancée par Washington au Sahel, alors que la Russie ne cesse d’accroître son influence dans la région.
Mali, Burkina Faso, Niger, Mauritanie : Victoria Nuland a effectué un voyage de quatre jours en Afrique de l’Ouest pour tenter de raffermir les liens avec les autorités de ces pays, dans une région qui a été secouée par des coups d’État au cours des deux dernières années.
« Nous avons échangé en particulier sur la stratégie américaine au Sahel », a déclaré la sous-secrétaire d’État, qui a dit souhaiter « apporter plus de cohérence aux efforts [américains] afin d’améliorer la sécurité et la gouvernance dans les pays qui ont connu des putschs » et les accompagner dans leur retour à un régime démocratique.
« Nous voulions nous assurer que nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour aider les populations du Sahel et renforcer leur confiance dans la capacité de leurs gouvernements à relever les défis auxquels ils sont confrontés, que ce soit sur le plan de la sécurité, de l’alimentation et du développement, de l’éducation, etc. » a-t-elle déclaré.
Inquiétude face à l’influence russe
Ce voyage a eu lieu alors que Washington ne cache pas sa préoccupation face à l’influence croissante de la Russie dans la région, notamment via le groupe Wagner. Allié de la junte d’Assimi Goïta, celui-ci a déployé des mercenaires au Mali pour participer à la lutte contre les jihadistes.
« Au Mali, nous étions là pour exprimer notre inquiétude face aux difficultés de la Minusma [la mission des Nations unies au Mali] à cause de la pression que le gouvernement et les forces de Wagner font peser sur elle », a déclaré Victoria Nuland. « Nous voulons aussi souligner le fait que, dans la région, le terrorisme est en hausse : nous sommes fermement convaincus que Wagner travaille pour lui-même et non pour le gouvernement ou pour la population du pays où il se trouve. » Elle a affirmé que les violences commises par les terroristes étaient en hausse de 30 % depuis six mois, ce qui contredit le discours officiel malien.
La sous-secrétaire d’État a également déclaré que les responsables américains avaient eu des « conversations très intenses » avec le Premier ministre, le lieutenant-colonel Abdoulaye Maïga, ajoutant que l’aide militaire américaine reste conditionnée au retour à un gouvernement civil. « Je répète ce que j’ai dit aux autorités du Mali, à savoir que le gouvernement intérimaire doit tenir son engagement à respecter le calendrier convenu, c’est-à-dire à organiser des élections en 2024 », a-t-elle précisé.
« Il y a un certain nombre de défis à relever, en grande partie liés à la sécurité. Et cela devient de plus en plus difficile alors que les forces de Wagner jouent un rôle de plus en plus important dans le pays et évincent les soldats de la paix de l’ONU », a affirmé Victoria Nuland. « Nous essayons tous d’aider la population, a-t-elle ajouté, mais nous sommes limités par les mauvais choix que la junte a faits en matière de sécurité. »
« Pas l’intention d’inviter Wagner »
La sous-secrétaire d’État américaine s’est également rendue au Burkina Faso, où elle a rencontré Ibrahim Traoré, auteur d’un putsch il y a moins d’un mois. Le jeune capitaine lui a assuré qu’il n’avait pas l’intention de travailler avec les mercenaires de Wagner, a-t-elle déclaré.
Et de préciser : « Nous avons eu l’occasion de discuter avec le président intérimaire Traoré et son équipe dirigeante, y compris avec son ministre de la Défense. Il a été sans équivoque en disant que seuls les Burkinabè défendront leur pays. Ils n’ont pas l’intention d’inviter Wagner sur leur territoire. »
« Les États-Unis tentent de combler le vide laissé par le départ de la France » et par la propagation du sentiment anti-français au Sahel, analyse Cameron Hudson, spécialiste de l’Afrique qui a travaillé au département d’État américain. Alors que depuis l’arrivée de Biden au pouvoir aux États-Unis, il y a deux ans, Washington tente de renforcer sa présence en Afrique, « la perte d’influence de la France permet de créer des opportunités pour les Russes, mais aussi pour les Américains », a-t-il ajouté.
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