Qui se Dresse DerrièRe les Critiques Fomentées Contre le Pouvoir de la Junte Militaire ?

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Qui se Dresse DerrièRe les Critiques Fomentées Contre le Pouvoir de la Junte Militaire ?
Qui se Dresse DerrièRe les Critiques Fomentées Contre le Pouvoir de la Junte Militaire ?

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – Niger. Une période critique serait vécue depuis quelques temps par le pouvoir militaire qui dirige le Niger, sous la présidence du général Abdourahamane Tiani, dont l’appel à sa démission a été évoqué lors des dernières manifestations ayant eu lieu dans la Capitale, Niamey.

C’est d’ailleurs la première fois qu’un tel appel a été constaté, accompagné de celui (répétitif) de la libération sans délai du président déchu, Mohamed Bazoum.

Le Niger semble bien traverser une période historique délicate, certes, marquée par des troubles politiques récurrents, sachant que le pays oscillerait entre un régime civil et un régime militaire qui, selon certains citoyens, n’aurait pas réussi jusqu’à présent à répondre aux aspirations du peuple.

Dans ce contexte, selon les observateurs proches des affaires africaines, le Niger, qui se trouverait aujourd’hui à la croisée des chemins, devrait donc se décider:

a) soit continuer à sombrer dans l’échec,

b) soit prendre l’initiative de construire un nouvel avenir politique prometteur.

Le chemin ne sera certainement pas facile, mais c’est la meilleure option si le pays veut sortir du cycle des crises et avancer vers la stabilité et le véritable développement.

Il importe de rappeler que l’armée avait promis d’apporter sécurité et stabilité, mais l’expérience passée aurait montré que les régimes militaires finissent souvent par consolider leur emprise sur le pouvoir, plutôt que de le transmettre à un véritable régime civil.

Aujourd’hui, nous assistons à un resserrement des libertés, à une détérioration des relations internationales et à un isolement croissant qui menace l’avenir du pays, probablement sur le continent africain aussi.

• Quant la Conférence sur la reconstitution de l’État du Niger recommande une période de transition de 5 ans et la dissolution des partis

La Conférence nationale baptisée par les autorités nigériennes d’« Assises nationales pour le rétablissement de l’Etat », organisée du 15 au 20 février 2025, s’était conclue par plusieurs recommandations, dont les plus importantes à retenir sont:

1. le passage à une période de transition de 5 ans « renouvelable »,

2. la possibilité aux responsables de l’autorité de transition de participer aux élections,

3. la dissolution des partis politiques.

Cette conférence, qui s’est étalée sur six jours, avait comme ordre du jour de base l’établissement des lois fondamentales, et l’élaboration d’une feuille de route de l’autorité de transition dirigée par le général Abdourahamane Tijani, l’ancien commandant de la garde présidentielle qui avait pris le pouvoir après le renversement du président Mohamed Bazoum, le 27 avril 2023.

Dans ce contexte, le président du Comité national de supervision du Congrès national du Niger, Mamoudou Harouna Djingarey, a présenté le calendrier quinquennal en affirmant que « les partis politiques seront dissous, avec une nouvelle charte permettant l’existence de deux à cinq partis politiques ».

• Une large participation comptant 716 personnalités issues de divers segments de la société nigérienne

Les représentants de divers segments de la société nigérienne qui ont pris part à cette conférence nationale, comptaient parmi eux des érudits religieux, des chefs tribaux, des représentants de départements gouvernementaux de diverses régions, ainsi que des représentants d’institutions de la société civile, des chefs de l’armée et des membres du conseil militaire installé après le renversement du président déchu.

Ont également pris part à cette conférence, d’anciens ministres et 3 anciens présidents du Niger encore en vie, à l’exception du président Bazoum, toujours en prison avec son épouse.

• Tout se joue autour d’une prolongation de la phase de transition

Les participants à la conférence ont approuvé une recommandation selon laquelle la phase de transition au Niger serait d’une durée de 5 ans, renouvelable « parce que nous voulons d’abord améliorer la situation sécuritaire et organiser des élections, et cela n’est pas possible au vu de la détérioration de la situation sécuritaire », a déclaré Mme Mariama Bayard Gamati, vice-présidente de la conférence.

« Si la situation sécuritaire ne s’améliore pas dans les cinq ans, la période de transition sera renouvelée, car rien ne peut être accompli à la lumière de la propagation du terrorisme », a-t-elle ajouté.

Quant aux grandes lignes de la phase de transition, cinq axes stratégiques ont été évoqués comme suite:

1. L’axe « Paix, sécurité, réconciliation nationale, et concorde sociale »,

2. L’axe « Rétablissement de la situation politique et des institutions »,

3. L’axe « Economie et développement durable »,

4. L’axe « Géopolitique et environnement international »,

5. L’axe « Justice et droits de l’homme ».

Pour rappel, à la suite du coup d’État de 2023, le conseil militaire au pouvoir avait proposé auparavant un calendrier de trois ans pour une transition vers un régime civil, sauf que la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avait rejeté la proposition.

• Une 3ème voie pour placer les intérêts du Niger au premier plan ?

Le Niger n’a pas besoin de recycler les échecs entre des gouvernements civils « qualifiés d’inefficaces » et des coups d’État militaires soupçonnés d’« opportunisme ». Ce qu’il faut, c’est un nouveau projet national mené par de véritables hommes d’État, loin des intérêts étroits.

Il faut établir un système démocratique fort qui ne soit pas détourné par une élite politique « corrompue » ou par des forces militaires aspirant au pouvoir, mais qui soit plutôt fondé sur une véritable participation populaire, une gouvernance transparente et des institutions capables de répondre aux aspirations des citoyens.

La première étape dans cette direction serait de libérer les prisonniers politiques, de lever les restrictions imposées aux partis politiques et d’ouvrir la voie à un véritable dialogue auquel chacun peut participer sans exclusion ni intimidation, mettant ainsi un frein à la colère des populations qui expriment des critiques à l’encontre du régime militaire de Tiani.

• Retour sur des critiques motivées par plusieurs facteurs, notamment:

1. Manque de légitimité démocratique

Les Nigériens attachés à la démocratie et à l’État de droit expriment leur mécontentement face à cette prise de pouvoir non constitutionnelle, du fait que la junte a renversé le président élu Mohamed Bazoum, suscitant des inquiétudes quant à la légitimité du nouveau régime.

A ce propos, il importe de noter que les conditions de sa détention ainsi que son sort futur font l’objet de préoccupations internationales, sachant que les organisations de défense des droits de l’homme et plusieurs gouvernements étrangers ne cessent d’appeler à sa libération et au rétablissement de l’ordre constitutionnel.

Par ailleurs, des communiqués internes ont proposé de « gracier les auteurs du coup d’État du 26 juillet 2023 », alors qu’aucune demande n’a été faite pour libérer l’ancien président, en détention depuis le coup d’État.

La junte au pouvoir a montré peu de signes de compromis, et les négociations pour une résolution politique semblent toujours au point mort, quant à la communauté internationale, y compris la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), elle continue d’exercer des pressions, mais sans résultats concrets pour l’instant.

2. Situation économique et sociale

Le Niger, déjà confronté à des défis économiques et sécuritaires, voit sa situation se détériorer sous les sanctions internationales imposées après le coup d’État survenu en 2023. Les populations critiquent la junte pour son incapacité à améliorer les conditions de vie et à relancer l’économie.

3. Gestion de la sécurité

Tout le monde sait que le Niger fait face à des menaces terroristes dans la région du Sahel, et de facto, certains citoyens doutent de la capacité de la junte à assurer la sécurité du pays, craignant une aggravation de la situation sécuritaire.

4. Restrictions des libertés

Il faut dire que depuis le coup d’État, des restrictions sur les libertés publiques et la répression des voix dissidentes ont été constatées, et les médias ainsi que la Société civile n’ont pas manqué de dénoncer ces mesures restrictives, qui limitent l’espace démocratique.

5. Des relations internationales tendues

La junte a pris des décisions controversées, comme le retrait de l’accord militaire avec l’Union européenne et le rapprochement avec des pays comme la Russie. Ces choix ont contribué à la division au sein de la population nigérienne, certains y voyant une perte de soutien international crucial pour le développement du pays.

• La question qui se pose par « tout un chacun »: Abdourahamane Tiani conservera-t-il son pouvoir au Niger ?

Cela dépend de plusieurs facteurs, notamment de la situation politique interne, du soutien qu’il reçoit de la part des forces armées et de la population, ainsi que des pressions internationales.

A noter que depuis la prise de pouvoir par le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) en juillet 2023, Tiani, en tant que chef de cette junte militaire, a dirigé le pays dans un contexte de tensions politiques et sociales. La légitimité de son pouvoir est contestée par certains acteurs nationaux et internationaux, dont la CEDEAO, qui a imposé des sanctions au Niger et menacé d’intervenir même militairement pour restaurer l’ordre constitutionnel, avant d’abandonner cette menace.

Cependant, Tiani bénéficie du soutien apparent d’une partie de l’armée et de certains segments de la population, notamment ceux qui critiquaient l’ancien président Mohamed Bazoum et son gouvernement. De plus, des pays comme le Mali et le Burkina Faso, également dirigés par des juntes militaires, ont exprimé leur solidarité avec le Niger, ce qui pourrait renforcer la position d’Abdourahamane Tiani.

Néanmoins, les défis ne manquent pas et se succèdent d’un jour à l’autre pour Niamey.

• Tiani entre défis et audace

1. Pénurie de carburant:

Le Niger se trouve actuellement affecté par une sévère pénurie de carburant, ce qui a poussé le président Tiani à solliciter d’urgence l’aide du Nigeria, pays influent au sein de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, CEDEAO.

Ceci résulte directement d’un affrontement désastreux entre la junte au pouvoir et les compagnies pétrolières chinoises, qui dominent depuis longtemps le secteur pétrolier nigérien.

Certes, la crise actuelle ne s’est pas produite du jour au lendemain, c’est la première fois que le Niger sous la gouvernance de Tiani se trouve dans une telle situation et se trouve également obligé de solliciter l’aide d’un pays membre de la CEDEAO (dont il ne fait plus partie).

Pour faire face à ce « handicap », le Niger a donc cherché des solutions pour atténuer les impacts économiques et sociaux de cette crise énergétique, et le Nigeria, en tant que principal producteur de pétrole en Afrique, semble avoir décidé de jouer un rôle clé en fournissant du carburant, ou en facilitant son acheminement vers le Niger, en répondant favorablement en approuvant la livraison immédiate de 300 camions-citernes vers Niamey.

Il s’agirait là d’une collaboration qui pourrait également renforcer les relations bilatérales entre les deux pays, même si les tensions régionales récentes au sein de la CEDEAO persistent.

2. Francophonie

A ce sujet, selon une information largement relayée par les médias, le Niger aurait rendu publique une note, datée de ce 18 mars 2025, annonçant de manière souveraine, son retrait de l’Organisation internationale de la Francophonie.

A noter que les autorités nigériennes n’ont donné aucune précision ni de détails sur les raisons spécifiques de ce retrait, sachant que l’information a été confirmée dans un document officiel adressé aux missions diplomatiques et consulaires du Niger à travers le monde.

A ce sujet, et par solidarité avec le Niger, le Burkina Faso a annoncé à son tour son retrait de l’Organisation Internationale de la Francophonie.

De même, le Mali, pays dirigé par une junte ayant rompu déjà avec la France, a annoncé son retrait de l’Organisation internationale de la francophonie, le mardi 18 mars, au lendemain d’une annonce similaire faite par ses voisins et alliés nigérien et burkinabé.

Conclusion

Pour conclure, on peut indiquer qu’à long terme, la stabilité du régime militaire dirigé par le président Tiani dépendra de sa capacité à gérer les défis économiques et sécuritaires du pays, ainsi qu’à naviguer dans les relations complexes avec les acteurs régionaux et internationaux.

Si des élections sont organisées et qu’une transition démocratique est mise en place, son rôle pourrait évoluer ou prendre fin.

En revanche, si la junte militaire maintient son emprise sur le pouvoir, Tiani pourrait continuer à diriger le pays pendant une période indéterminée, et en résumé, la pérennité du pouvoir d’Abdourahamane Tiani au Niger reste incertaine, mais dépendra largement des développements politiques et sécuritaires dans les mois et les proches années à venir.

Pour plus d’informations et d’analyses sur la Niger, suivez Africa-Press

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