Quelles suites après la dénonciaton de l’accord militaire entre Niamey et Washington?

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Quelles suites après la dénonciaton de l'accord militaire entre Niamey et Washington?
Quelles suites après la dénonciaton de l'accord militaire entre Niamey et Washington?

Africa-Press – Niger. Leur relation s’était dégradée, mais la rupture semble désormais consommée entre le Niger et les États-Unis. Niamey a dénoncé, samedi 16 mars, l’accord de coopération militaire avec Washington, qui dispose d’environ un millier de soldats dans le pays, ainsi que d’une importante base de drones à Agadez. Une coopération « injuste », « ne répondant pas aux attentes », et avec une présence américaine « illégale » a jugé la junte qui a reçu des soutiens.

Sans surprise, le Front patriotique pour la souveraineté (FPS), une coalition soutenant les militaires, a salué « une décision courageuse ». Selon l’organisation, les accords donnaient des « prérogatives excessives aux forces étrangères ». Le FPS va plus loin et demande des poursuites judiciaires pour haute trahison contre les auteurs des accords, signés en 2012, sous la présidence de Mahamadou Issoufou.

C’est une bonne nouvelle pour la souveraineté de notre pays. Notre gouvernement a compris qu’aucun pays ne peut assurer la sécurité d’un autre pays. Chaque pays doit assurer sa propre sécurité. Tout le monde a besoin de partenaires, mais il faut que les partenariats soient gagnant-gagnant, pas gagnant-perdant

Guilhem Fabry Hamid Amadou N’gadé dénonce lui une décision « d’orgueil, d’ingratitude, d’irresponsabilité et d’incompétence ». Selon le conseiller communication de l’ancien président Mohamed Bazoum, la coopération américaine a, au contraire, « été déterminante ». Il cite la création d’unités logistiques, l’apport d’équipements militaires, la formation de forces spéciales, la construction de la base d’Agadez, d’un centre de renseignements moderne, etc. Pour lui, la junte mène ses soldats « à l’abattoir ».

Le Niger devient « un théâtre de confrontations entre puissances rivales »

Pour Moussa Tchangari, la fin de cette coopération « n’est pas vraiment une surprise », mais elle est arrivée « plus vite qu’on pouvait le prévoir ». « C’est une décision qui va tendre davantage les relations entre le Niger et les pays occidentaux de façon générale. On devient un théâtre de confrontations entre des puissances rivales. D’un côté, vous avez la Russie qui s’intéresse, et vous avez les puissances occidentales qui se font mettre dehors », explique le secrétaire-général de l’association nigérienne Alternatives Espaces Citoyens à Guilhem Fabry pour RFI.

Selon l’historien Arthur Banga, il y a désormais un sérieux risque de voir les Américains quitter le Niger, ouvrant ainsi la porte aux Russes et à leurs paramilitaires du groupe Wagner. D’autant que la coopération avec Moscou s’est renforcée, avec des déplacements d’officiels en Russie et à Niamey ces derniers mois.

L’idée, pour le Niger, n’est pas un isolement diplomatique mais un changement de partenaire stratégique en s’orientant vers la Russie qui, elle aussi, via Wagner, tente de reprendre pied dans cette partie du monde. Elle réussit plutôt bien jusqu’à présent.

Sébastien Németh Selon un bon connaisseur, les Américains auraient demandé à la junte d’organiser une transition courte, l’idée étant qu’un retour rapide à l’ordre constitutionnel permettrait un départ des militaires et l’arrêt du rapprochement avec la Russie et l’Iran. Mais le CNSP ne l’aurait pas entendu de cette oreille. « La junte n’est pas prête à quitter le régime d’exception, ce qui contrarie Washington. Il faut s’attendre à ce que la situation se durcisse », a estimé Arthur Banga.

Les raisons pour lesquelles Washington voulaient préserver son ancrage au Niger

Les Américains comptent un millier de soldats et techniciens engagés dans la lutte anti-djihadiste au Niger. À Agadez, ils disposent d’une importante base de drones depuis laquelle sont opérés des vols de surveillance et de reconnaissance. Cette présence avait aussi pour but de contrebalancer l’influence russe dans la région, assure Michael Shurkin, analyste et directeur du programme 14 North Strategies, cabinet de conseil spécialisé sur l’Afrique. Il s’exprime au micro de Guilhem Fabry.

« C’est une claque pour les États-Unis. Depuis la chute des relations entre la France et le Niger, les États-Unis ont décidé de poursuivre une tentative de préserver les relations avec le Niger. D’abord pour sauver les bases militaires qui se trouvent au Niger, mais aussi pour empêcher les Nigériens de se jeter dans les bras de la Russie.

Pendant longtemps, (cette présence militaire) n’avait rien à voir avec la Russie. Ça a commencé pour garder un oeil sur la Libye. C’était la raison pour laquelle les Américains sont venus. Aussi, on a soutenu les actions françaises. Les Américains ont fourni beaucoup de renseignements aux Français.

Vu que le Mali a choisi la Russie comme partenaire de préférence, maintenant, les Américains sont aussi motivés par cette idée de contrecarrer les Russes. Et ça fait partie de la raison pour laquelle ils cherchaient à préserver les drones, en disant “vous n’aimez pas les Français, mais nous, nous ne sommes pas les Français, donc vous pouvez continuer de travailler avec nous” C’est ça, le pari des Américains. Mais cela n’a pas marché et ce n’est pas du tout étonnant, parce qu’en fin de compte, les Américains n’étaient jamais prêts à donner aux Nigériens ce qu’ils voulaient. C’est comme le Mali ; les Américains n’ont toujours fourni qu’une aide militaire très limitée. »

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