Africa-Press – Niger. L’urbanisation au Niger est caractérisée par une croissance rapide et non maîtrisée, surtout dans ses grandes villes. Cette dynamique provoque une expansion désordonnée des périphéries, un manque d’infrastructures et un étalement urbain non planifié, générateur d’inégalités et vulnérabilités. Depuis avril 2025, le ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat, le Colonel Abdoul Kadri Amadou Daouda, a lancé des réformes pour répondre à ces défis conformément à la lettre de mission assignée au ministère et aux directives du Président de la République, le Général d’Armée Abdourahamane Tiani.
Monsieur le ministre, le 2ème anniversaire de l’avènement du Conseil National pour la Sauvegarde la Patrie (CNSP) coïncite avec vos 100 jours à la tête du Ministère de l’Urbanisme et du Logement. Quelles sont les principales actions qu’on peut retenir de ces 100 jours?
Plusieurs mesures de planification urbaine durable ont été lancées, dont le schéma directeur d’aménagement de la ville de Niamey (aujourd’hui obsolète), le plan urbain de Birni N’ Gaouré et d’autres projets de plans urbains sont en cours dont notamment pour la ville de Gaya et une nouvelle campagne pour 15 000 parcelles viabilisées à Bangoula au profit des fonctionnaires.
Justement l’accès à un logement décent démeure une véritable gageure pour la majorité des Nigériens. Qu’est-ce qui est fait dans ce sens en vue de faciliter l’accès au logement décent pour tous?
Dès notre prise de fonction, nous avons diligenté une inspection des différents chantiers en cours. Ces visites ont porté notamment sur les 882 logements destinés à la Garde Nationale du Niger, les 15 000 parcelles de Bangoula, les 155 logements de la cité Diaspora Niamey ainsi que les 1000 logements de la cité de la Refondation de Sorey, dans le but d’évaluer l’état d’avancement et surtout le respect de la qualité des travaux réalisés.
En perspective, d’autres projets de logements sociaux sont prévus pour les fonctionnaires et les Forces de défense et de sécurité dans différentes villes du pays. Il est également envisagé d’étendre cette offre aux non-fonctionnaires.
Ces initiatives visent à améliorer les conditions de vie de la population nigérienne, notamment en facilitant l’accès au logement et en promouvant une urbanisation encadrée. Tout est mis en œuvre pour mener à bien ces projets rapidement, tout en veillant à leur durabilité, à l’équité dans les attributions et à leur utilité pour tous.
Des comités de suivi ont été créés pour assurer la transparence des grands projets. Le ministre a aussi lancé un programme de formation destiné à préparer de jeunes professionnels à devenir les futurs leaders du secteur urbain. De même, des audits ont été menés de façon ponctuelle dans les directions régionales pour repérer les obstacles et proposer des solutions, renforçant ainsi la confiance des partenaires et la cohésion au sein du ministère.
Ces dernières années, une certaine pagaille règne dans la gestion du secteur foncier avec des lotissements anarchiques souvent frauduleux ou irréguliers. Quelles sont les mesures que vous avez prises pour y mettre de l’ordre?
Au cours de ces 100 premiers jours, le Ministère de l’Urbanisme et de l’Habitat du Niger a mis en marche une réforme du système cadastral et renforcé les mesures de lutte contre les fraudes foncières. Cette dynamique s’inscrit dans une vision de souveraineté foncière numérique et de gouvernance transparente. Dans ce cadre, un comité technique a été créé afin de mettre en place une base de données numériques et géoréférencées des domaines publics de l’État.
Le ministère, en partenariat avec l’Institut Géographique National du Niger (IGNN), a engagé un audit des lotissements effectués de 2004 à 2020, et déclenché également une approche d’appropriation de la numérisation des plans cadastraux, l’intégration des données géospatiales dans la planification urbaine, la création d’une base de données foncières centralisée, et l’utilisation de technologies avancées (télédétection, photogrammétrie, images satellites) pour cartographier le territoire national à travers l’acquisition d’appareils de calcul de triangulation.
Cette initiative vise à intégrer les données géospatiales dans la planification urbaine pour améliorer la compréhension des dynamiques territoriales et faciliter des décisions d’aménagement éclairées. La création d’une base de données foncières centralisées permet aussi un accès simplifié à l’information pour les citoyens et les décideurs, avec pour objectif de réduire la probabilité de litiges fonciers et de fraudes.
Associer ces technologies à une démarche participative garantit des projets urbains adaptés aux besoins de la population et respectueux des normes environnementales et du développement durable.
Par ailleurs, des inspections inopinées, des audits ciblés et la mise en place de comités de suivi ont permis d’améliorer les méthodologies de travail et de renforcer la transparence dans les différentes attributions. Le ministère a renforcé sa coopération avec la SONUCI afin de réguler les opérations de lotissement et de prévenir les ventes non autorisées d’espaces mais aussi pour pouvoir concrétiser des projets d’investissement.
Des mécanismes de suivi et d’évaluation veillent à l’efficacité des projets, notamment grâce à des consultations régulières avec les parties prenantes et l’adaptation des plans selon leurs besoins.
Pour mener les projets et programmes de logements décents et abordables, l’Etat a besoin d’investissements. Y-a-t-il des dispositions prises dans ce sens pour inciter les investisseurs privés notamment à s’engager dans le secteur de l’habitat?
Le Ministère de l’Urbanisme et de l’Habitat élabore actuellement un programme de formation et de renforcement des capacités à destination des agents et professionnels du secteur de l’urbanisme et de l’habitat. Cette initiative vise à garantir la maîtrise des compétences requises pour une mise en œuvre efficace des projets, dans le strict respect des normes internationales. La collaboration avec des partenaires nationaux et internationaux sera consolidée pour obtenir plus de financements et d’expertise technique nécessaires à la réalisation des projets du ministère.
Des partenariats avec le secteur privé ont été encouragés pour accroître les investissements dans l’urbanisme et l’habitat. Des mesures fiscales et administratives seront mises en place pour inciter les entreprises et les investisseurs à développer des projets innovants et durables. L’objectif est de soutenir l’économie locale et l’emploi tout en respectant les exigences de qualité et d’environnement dans les constructions.
En attendant l’accès au logement décent pour tous, les Nigériens se plaignent des coûts de loyer. Les locataires sont livrés aux desiderata des bailleurs. Que fait le ministère par rapport à ce volet pour améliorer la qualité de vie des citoyens?
Les projets urbains intégreront l’écologie, notamment par des mesures de verdissement, l’utilisation d’énergies renouvelables et une gestion durable des ressources. Ces mesures visent à limiter l’empreinte écologique et à améliorer la qualité de vie tout en protégeant l’environnement pour les générations futures.
Le ministère accorde également une priorité à la question des logements abordables et durables. Plusieurs initiatives sont en cours pour aider les personnes à faible revenu et les populations rurales. Ces projets ont pour objectif d’offrir des logements conformes aux normes de construction écologique et de soutenir la cohésion sociale.
Toutes ces décisions illustrent l’engagement du Gouvernement en faveur d’un urbanisme durable et résilient. La collaboration avec divers organismes permettra d’intégrer les meilleures pratiques, tandis que des formations continues aideront les professionnels à adopter de nouvelles technologies et normes environnementales.
À court terme, des réformes juridiques sont en cours concernant la tarification des loyers, les relations entre bailleurs et locataires, et la copropriété, afin d’améliorer la gestion du foncier au bénéfice de la population.
Monsieur le ministre, quelles sont les perspectives à court et moyen termes dans le secteur de l’habitat?
Dans le domaine des perspectives techniques, nous envisageons la création de pôles stratégiques et la réhabilitation de la corniche de Niamey. D’ores et déjà, des études de faisabilité sont en cours pour la réhabilitation de plusieurs zones urbaines, notamment la ville de Niamey. Le projet ambitieux inclut l’aménagement de pôles stratégiques tels que la réhabilitation de la corniche de Niamey. Ce projet vise à transformer la corniche en un espace moderne et fonctionnel, intégrant des espaces verts, des infrastructures de loisirs, et des installations culturelles, tout en respectant les normes écologiques et de durabilité.
Des projets de rénovation urbaine visent à revitaliser d’autres quartiers par l’amélioration des infrastructures, la modernisation des services publics et la création d’opportunités économiques, notamment via de meilleurs transports et le soutien à l’entrepreneuriat local.
Ces projets cherchent à renforcer l’attractivité et la résilience urbaines. Les services techniques travaillent avec des experts pour appliquer les meilleures pratiques et intégrer des innovations technologiques.
Ces initiatives reflètent une orientation des autorités nationales visant à modifier la politique urbaine et à proposer des logements pour l’ensemble des couches de la population nigérienne. En dépit des défis énormes et persistants, les initiatives entreprises au cours des cent premiers jours représentent une avancée dans ce processus.
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