Des chercheurs ont « appris » à des oiseaux à migrer plus au nord : une solution de repeuplement ?

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Des chercheurs ont "appris" à des oiseaux à migrer plus au nord : une solution de repeuplement ?

Africa-Press – Niger. Les problématiques liées au dérèglement climatique sont multiples et impactent les oiseaux migrateurs. Ces derniers sont les premières victimes d’un printemps précoce qui les prive d’un accès suffisant à la nourriture durant la période de reproduction. Une équipe de biologistes suédois s’est lancée comme défi d’apprendre aux oiseaux à migrer plus au nord afin de préserver leurs populations, racontent-ils dans la revue Nature Ecology & Evolution.

Le nombre d’oiseaux migrateurs : un constat alarmant

En Suède, la saison printanière arrive bien plus tôt qu’il y a une dizaine d’années. Cela ne parait pas grand-chose de notre point de vue, mais les conséquences sont désastreuses sur les espèces migratrices. Pour rappel, les oiseaux ne migrent pas à cause du froid, mais pour des raisons d’alimentation : ils suivent les cycles naturels de leurs sources de nourriture (insectes, fruits, fleurs) et se dirigent naturellement aux endroits où ils sont les plus abondants. Les plus communs sont ceux qui passent la saison froide en Afrique et la saison estivale au nord.

Lorsque le printemps survient, les chenilles (pour les prendre en exemple) commencent à affluer hors des sols, signe de la fin de leur hibernation. Elles débutent alors leur croissance avant de terminer leur stade nymphal par la création d’une chrysalide. Dès ce moment, elles ne sont plus intéressantes pour leurs prédateurs. Mais que se passe-t-il pour les oiseaux d’Afrique ratant le début du printemps de Suède, car il est en avance ? La réponse est tragique : ils n’ont plus suffisamment de nourriture pour subvenir aux besoins de leurs oisillons car les insectes ne sont plus aussi appétissants qu’aux premiers jours.

Ces derniers sont donc pour la plupart affamés, et meurent avant même d’avoir pu sortir du nid. C’est une des raisons de la chute vertigineuse des populations des oiseaux dans le monde. « Le nombre de passereaux (un groupe de petits oiseaux regroupant les moineaux, rouge-gorge, gobemouches, etc., ndlr) migrateurs diminue de plus en plus dans toute l’Europe », informe dans un communiqué le biologiste Jan-Åke Nilsson, qui a participé à l’étude. En effet, le CNRS comptabilise depuis 2010 plus de 57% de perte d’oiseaux vivant dans les milieux agricoles, 18% pour ceux des milieux forestiers et 40% de diminution pour les oiseaux préférant le froid pour se reproduire.

Une expérience d’apprentissage

Fort de ces constatations, le professeur Nilsson, travaillant pour l’Université de Lund (Suède), émet une hypothèse : « Peut-être que les oiseaux migrateurs peuvent voler plus loin dans le nord jusqu’à ce qu’ils trouvent un endroit avec des chenilles appétissantes pour eux », confie-t-il dans le communiqué. C’est alors qu’une expérience étrange visant à démontrer son propos se met en place : un groupe de chercheurs attendent puis capturent des femelles gobemouches noirs (Ficedula hypoleuca) aux Pays-Bas récemment arrivées d’Afrique. Ces oiseaux de 13 cm de longueur sont des insectivores chevronnés, adorant les chenilles et toutes sortes de lépidoptères. Ils vivent principalement dans des milieux boisés pour chasser.

Ils les amènent ensuite de nuit dans une forêt de pin située à 600 kilomètres de là, dans la région de la Scanie, au sud de la Suède et les relâchent (ces oiseaux peuvent couvrir cette distance en seulement deux nuits). Ils ont choisi ce terrain particulier car les chenilles ne sortiront d’hibernation que deux semaines plus tard. Ce décalage naturel entre la Scanie et le reste de la Suède ou des Pays-Bas est peut-être la solution à la famine estivale des migrateurs. Le but ensuite est de voir comment les individus déplacés s’acclimatent et effectuer des comparaisons avec leurs congénères des autres régions.

Une lueur d’espoir

Les résultats sont sans appel : les gobemouches noirs se sont parfaitement adaptés à leur nouvelle résidence. Ils ont commencé la saison de reproduction dix jours plus tôt que les individus non transférés, ce qui leur a permis de disposer de ressources suffisantes pour élever une descendance en bonne santé. « Les oiseaux que nous avons emmenés des Pays-Bas jusqu’en Scanie se sont parfaitement synchronisés avec le rythme d’abondance de nourriture ! », s’exclame Jan-Åke Nilsson.

Mais le plus encourageant pour le futur est que les oisillons nés dans cette région y sont retournés l’année d’après. Ils ont donc bénéficié des mêmes avantages que leurs parents. Ils sont la preuve vivante que nous pouvons apprendre, de manière non-invasive, aux oiseaux migrateurs à voler plus loin vers le nord dans le but de préserver et même de sauver les populations. « C’est un espoir pour faire perdurer les espèces même si le printemps arrive plus tôt », conclut Jan-Åke Nilsson.

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