La Chine montre ses muscles en Afrique devant l’hésitation de Joe Biden

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La Chine montre ses muscles en Afrique devant l’hésitation de Joe Biden
La Chine montre ses muscles en Afrique devant l’hésitation de Joe Biden

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – São Tomé e Príncipe. Quand les Chinois se tracent un objectif en tête, ils le réalisent à leur convenance sans difficultés, car les Chinois pensent avant tout aux 1,4 milliards de citoyens qui constituent leur population.

C’est d’ailleurs pourquoi les investissements destinés au continent africain, dont en premier lieu les ventes d’armes chinoises, la formation militaire et les investissements dans des projets d’infrastructure en Afrique, ont donné un nouvel élan à la présence croissante de Pékin sur le continent.

Selon une nouvelle analyse réalisée par une société connue pour ses publications mondiales en armement, près de 70% des 54 pays de l’Afrique possèdent des véhicules militaires blindés chinois, et près de 20 % de tous les véhicules militaires circulant en Afrique sont de fabrication chinoise. Cette étude montre également de fortes augmentations au cours des deux dernières décennies des ventes d’équipements militaires chinois à l’Afrique, par rapport au vendeur traditionnel du continent, la Russie.

La Tanzanie, le Nigéria, le Soudan, le Cameroun, le Zimbabwe, la Zambie, le Gabon, l’Algérie, la Namibie, le Ghana et l’Éthiopie sont considérés parmi les plus grands importateurs d’équipements blindés chinois, selon l’étude, il y a environ 50% du stock militaire en Tanzanie d’origine chinoise, tandis que l’équipement fourni par les États-Unis ne dépasse guère les 11%.

Par ailleurs, l’équipement de l’ère soviétique, en grande partie ancien, représente quant à lui environ 32 % du stock global, qui comprend des véhicules blindés, des chars et des avions.

« La tendance est clairement à la hausse, et ce que la diplomatie des ventes d’armes donne à la Chine a une influence et un pouvoir beaucoup plus grands sur ces pays africains », a déclaré un analyste au Wall Street Journal.

D’énormes investissements chinois dans les infrastructures

Un rapport établi par le Pacte international sur le développement durable (IIDD), indique que la Chine a investi 2,96 milliards de dollars en Afrique durant l’année dernière, soit une hausse de 9,5 % par rapport à 2019. La Chine a également continué à investir massivement en Afrique tout au long de la pandémie de COVID-19. Cependant, certains pays africains suspendent ou contrôlent minutieusement les contrats avec les entreprises chinoises.

Toujours d’après la même source, la Chine a établi 25 zones de coopération économique et commerciale dans 16 pays africains, et a continué à investir massivement sur tout le continent même au moment de la pandémie. Les régions africaines enregistrées auprès du ministère chinois du Commerce ont également attiré 623 entreprises avec un investissement total de 735 milliards de dollars américains à fin 2020, selon le rapport annuel sur les relations économiques et commerciales entre la Chine et l’Afrique daté de 2021.

Ce gigantesque pays asiatique est le plus grand partenaire commercial de l’Afrique depuis 12 ans, bien que le commerce bilatéral ait diminué de 10,5 % pour atteindre 187 milliards de dollars en 2019. C’est également le quatrième investisseur sur le continent, selon le rapport de l’institut, qui fait apparaître que la Chine investit massivement dans le secteur des services en Afrique.

Le document indique également que les investissements dans des sous-secteurs tels que la recherche scientifique, les services technologiques, les transports, l’entreposage et les services postaux ont doublé en 2020. Cependant, le commerce des services entre les deux partenaires a chuté de 20 % l’an dernier pour atteindre 8,66 milliards de dollars seulement.

Quant au chiffre d’affaires des ventes de projets sous contrat pour les entreprises chinoises en Afrique, il aurait atteint 383,3 milliards de dollars en 2020, accusant une baisse de 16,7 % par rapport à 2019.

Il s’agirait ici de la cinquième baisse annuelle consécutive, selon le rapport, bien que la valeur des contrats nouvellement signés pour des projets africains ait augmenté de plus de 21 %, à 67,9 milliards de dollars, ce qui indique que les pays africains ont encore une forte demande d’infrastructures.

Le soft power chinois et le modèle américain

L’initiative chinoise Belt and Road

Il faut se mettre à l’évidence que les États-Unis considèrent la Chine comme un concurrent mondial dans les secteurs de l’économie et de la sécurité. Pékin étendant son influence dans le monde par divers moyens, y compris la soi-disant initiative « Belt and Road », une campagne mondiale pour investir dans les pays, en particulier dans les infrastructures.

Lina Benabdellah, professeure agrégée de politique à l’Université Wake Forest en Caroline du Nord, aux Etats-Unis, a déclaré au Wall Street Journal que l’Afrique pourrait trouver l’approche de la puissance douce de la Chine plus attrayante à certains égards que le modèle américain.

Elle a ajouté entre-autres que : « Les initiatives chinoises de soft power incluent des échanges de haut niveau lorsque les dirigeants africains se rendent en Chine pour mettre au point des réseaux militaires, et cela crée de la bonne volonté parmi de nombreuses personnes en Afrique, et là où il y a des bases chinoises, comme à Djibouti, les entreprises chinoises et d’autres installations essaient de faire partie de la communauté, offrant un avantage local ».

Elle a noté également que la base américaine à Djibouti est fermée aux résidents locaux, soulignant à ce sujet : « Je ne dirais pas que ces pays ont été cooptés par la Chine, le modèle chinois est beaucoup plus attractif, et les gens pensent qu’il y a un intérêt à mélanger ces accords commerciaux avec des accords de sécurité pour que tout le monde obtienne quelque chose ».

Pourquoi Joe Biden hésite quant à un « leadership américain en Afrique » ?

De l’autre côté, l’administration Biden a tenté de concentrer ses ressources militaires pour concurrencer la Chine en déplaçant des capacités telles que les chasseurs à réaction, les systèmes de défense aérienne et le personnel du Moyen-Orient afin qu’ils puissent être repositionnés en Asie.

Sauf que les responsables gouvernementaux estiment quant à eux que la concurrence avec la Chine signifie que les États-Unis devraient placer certaines de ces mêmes capacités ailleurs dans le monde, comme en Afrique, par exemple, à un moment où le Pentagone est aux prises avec sa position de longue date sur le continent, après que l’administration Trump ait tenté de retirer des troupes d’Afrique à la suite d’un « incident tragique au Niger », lorsque quatre soldats ont été tués dans une embuscade mortelle.

L’ancien secrétaire américain à la Défense Mark Esper, qui a servi sous l’ancien président Donald Trump de 2019 à 2020, a proposé de retirer les forces américaines d’Afrique, mais la décision n’a jamais été mise en œuvre.

Les intentions de la Chine et l’inquiétude des Américains

Alors même que les États-Unis se retirent d’Afrique, la Chine semble y renforcer sa présence militaire, tandis que les responsables du renseignement américain ont exprimé leur inquiétude quant aux intentions de la Chine d’établir sa « première présence militaire permanente » dans l’Atlantique, dans le petit pays d’Afrique centrale qu’est la Guinée équatoriale. Et en février dernier, une importante délégation américaine s’y est rendue pour aider à persuader de hauts responsables de ne pas autoriser Pékin à établir une base dans le pays.

Sur la côte est de l’Afrique, les responsables militaires américains s’inquiétaient de la présence d’une base chinoise à Djibouti près du camp Lemonnier, où les États-Unis mènent des opérations sensibles de drones et autres.

Dans ce contexte, les responsables du Pentagone avaient accusé des agents chinois d’utiliser des lasers contre des pilotes militaires américains là-bas.

On peut donc avouer que cette course à l’armement et à l’influence en Afrique, à laquelle participent la Chine et les Etats-Unis, tire ses profits du volume des intérêts économiques que peuvent en tirer des « poches » des africains, les deux pays concurrents.

NB : Nous vous proposons de lire notre précédent article sur le même sujet : Les Etats-Unis craignent la montée de la Chine en Afrique : Pourquoi ?

Pour plus d’informations et d’analyses sur la São Tomé e Príncipe, suivez Africa-Press

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