“L’énergie noire pourrait avoir évolué au fil du temps”, selon Michael Levi, directeur de la collaboration DESI

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“L’énergie noire pourrait avoir évolué au fil du temps”, selon Michael Levi, directeur de la collaboration DESI
“L’énergie noire pourrait avoir évolué au fil du temps”, selon Michael Levi, directeur de la collaboration DESI

Africa-Press – São Tomé e Príncipe. C’est un grand jour pour toute la communauté des cosmologistes lancés à l’assaut de l’énergie noire. Cette forme d’énergie mystérieuse, découverte en 1998, est à l’origine d’une force qui accélère l’expansion de l’Univers depuis environ 5 milliards d’années.

Comme nous l’annoncions en mars 2024, la collaboration DESI (“Dark Energy Spectroscopic Instrument”) révèle ce jeudi 4 avril 2024 ces premiers résultats portant sur “40 millions de galaxies et quasars (source de rayonnement intense et quasi ponctuelle associée à un trou noir supermassif au cœur d’une galaxie, ndlr) cartographiés entre 1 milliard et 12 milliards d’années-lumière de nous”, selon Nathalie Palanque-Delabrouille, porte-parole de la mission DESI.

L’annonce a été faite en simultané lors de deux conférences, l’une organisée par l’American Physical Society à Sacramento, aux États-Unis, et l’autre lors des rencontres de Moriond, en Italie, alors que plus d’une dizaine d’articles étaient mis en ligne sur la plateforme ArXiv.

Voir l’énergie noire se manifester

Inauguré le 17 mai 2021, l’instrument DESI scrute le cosmos depuis le site de Kitt Peak, en Arizona. Le plan focal (où se forme l’image de l’astre) de DESI est doté de 5000 fibres optiques capables d’obtenir presque autant de spectres (décomposition de la lumière en ses différentes composantes, ou “couleurs”) d’un coup.

“DESI a dressé la carte en 3D de 40 millions d’objets sur une large tranche temporelle, décrypte Nathalie Palanque Delabrouille. Or leur distribution n’est pas aléatoire. Les galaxies sont apparues là où initialement il y avait des surdensités de matière dans l’Univers primordial. La distance caractéristique entre ces surdensités n’a ensuite évolué que sous l’effet de l’expansion de l’Univers. La mesurer, c’est avoir accès à l’expansion, et à l’évolution de l’expansion. Plus elle va s’accroître, et plus nous “verrons” l’énergie noire se manifester.”

Cette première moisson de résultats portant sur une année d’observations est particulièrement enthousiasmante, si l’on en croit Michael Levi, directeur de DESI et chercheur au laboratoire de Berkeley (Californie). “Jusqu’à présent, nous constatons un accord avec notre meilleur modèle d’univers (modèle Lambda CDM ou modèle standard de la cosmologie qui prévoit l’existence de matière noire froide et d’énergie noire, ndlr), mais nous constatons également des différences potentiellement intéressantes qui pourraient indiquer que l’énergie noire évolue avec le temps. Cela pourra être confirmé ou non avec plus de données, nous sommes donc ravis de commencer bientôt à analyser notre ensemble de données sur trois ans”, déclare-t-il dans un communiqué.

Quintessence contre constante cosmologique

L’évolution dans le temps de l’énergie noire est précisément une information clé pour faire le tri parmi les différentes hypothèses sur sa nature, comme l’expliquait à Sciences et Avenir Francis Bernardeau, chercheur à l’Institut de physique théorique de Saclay (Essonne). “Tous ces instruments (qui étudient l’énergie noire, soit en plus de DESI le télescope spatial Euclid et le futur observatoire Vera Rubin, ndlr) ont un même objectif: étudier l’évolution de l’énergie noire au fil du temps, résume le chercheur. Car selon la théorie considérée, cette évolution ne sera pas la même. Dans le cas de la quintessence par exemple, l’énergie noire se dilue un peu au fil du temps… Son action dans le passé est donc renforcée. Tandis que si l’énergie noire est en réalité une propriété intrinsèque de l’espace-temps, une « constante cosmologique », alors elle ne se dilue pas.”

La théorie de la quintessence a été élaborée dès la découverte de l’énergie noire en 1998, notamment par les Américains Robert R. Caldwell et Paul J. Steinhardt. Elle expliquerait l’accélération de l’expansion de l’Univers par l’action d’un champ scalaire, dans le même esprit que l’inflation cosmique qui aurait formidablement dilaté l’Univers, environ 10^-35 secondes après le Big Bang.

La quintessence s’oppose à la constante cosmologique, imaginée puis reniée par Einstein dans sa théorie de la relativité générale. La caractéristique de cette constante cosmologique est d’exercer une pression négative sur la matière. Ce qui confère à l’espace une propension naturelle à s’étendre. Si les premiers résultats de DESI étaient confirmés, la constante cosmologique serait donc définitivement hors course pour expliquer l’accélération de l’expansion de l’Univers.

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