Maladie de Charcot : découverte d’une nouvelle piste de traitement

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Maladie de Charcot : découverte d’une nouvelle piste de traitement
Maladie de Charcot : découverte d’une nouvelle piste de traitement

Africa-Press – São Tomé e Príncipe. Il y a six ans, presque jour pour jour, le célèbre astrophysicien Stephen Hawking décédait des suites d’une sclérose latérale amyotrophique (SLA) ou maladie de Charcot. Un syndrome qui touche actuellement près de 8000 français. Si la SLA demeure un défi pour les scientifiques, c’est notamment qu’aucun marqueur spécifique de la maladie n’a encore été identifié. C’est-à-dire que son diagnostic résulte de l’élimination d’autres pathologies aux symptômes similaires. Cela prend donc beaucoup de temps, “généralement un à deux ans après le début des symptômes, retardant d’autant la mise en place de mesures thérapeutiques et réduisant les chances d’inclusion dans des essais cliniques à un stade précoce”, éclairent les auteurs d’une nouvelle étude portant sur l’être humain et la souris.

Avec son équipe, Caroline Rouaux, chercheuse à l’Inserm, a découvert un moyen de raccourcir ces délais: recourir à l’électroencéphalographie, une technique peu coûteuse et bien connue des cliniciens, qui permet d’enregistrer les ondes de notre cerveau. En étudiant l’activité cérébrale, les auteurs ont mis en évidence une “signature” précise qui pourrait être spécifique de la maladie de Charcot.

Mais ce n’est pas tout. Les chercheurs ont également identifié les mécanismes à l’origine de cette singularité et réussi à rétablir des ondes normales chez les souris atteintes de SLA. Des avancées fondamentales qui pourraient, à terme, bénéficier aux patients au travers d’un diagnostic rapide et d’un potentiel traitement. Leurs résultats ont été publiés dans la revue Science Translational Medicine.

Comment se manifeste la maladie de Charcot ?

La SLA se déclare le plus souvent entre 50 et 70 ans. Au début de la maladie les symptômes sont hétérogènes, ce qui complique le diagnostic. A mesure que le syndrome évolue, on observe un dysfonctionnement moteur qui aboutit à la paralysie par groupe de muscles: des membres jusqu’au visage. “A terme, les patients ne peuvent plus respirer seuls”, explique Emmeline Lagrange à Sciences et Avenir.

Un cauchemar que dépeint Mark Lee Hunter, dans le livre Pour Sophie et tous les autres, Enquêtes pour le droit de choisir sa mort, co-écrit avec Angèle Delbecq et Jean-Louis Touraine. Dans cet ouvrage, les auteurs démêlent notamment les stratégies des opposants à l’aide active à mourir. La maladie de Charcot est au cœur de ce combat car elle est à l’origine d’une souffrance extrême, à la fois physique et psychologique pour le patient qui reste conscient de ces troubles.

A quoi est-elle due ? Ce syndrome affecte les motoneurones: ce sont les cellules nerveuses à l’origine du mouvement. Il existe deux motoneurones: le premier part du cerveau et s’arrête à la moelle et le second prend le relai jusqu’aux muscles. Cette maladie neurodégénérative atteint l’un des deux motoneurones en premier, mais aboutit à un dysfonctionnement des deux neurones moteurs, conduisant à la paralysie complète. Certains patients ont d’abord un déficit moteur au niveau de la main ou de la jambe: c’est le motoneurone entre la moelle et les muscles qui est touché.

Dans d’autres cas, les malades ont une atteinte dite “bulbaire”: le dysfonctionnement vient du premier motoneurone, ce qui engendre des difficultés à déglutir ou à parler. “On ne peut être certains que le diagnostic est celui de la SLA, que lorsque les deux motoneurones sont atteints”, précise la neurologue. “Tant qu’un seul des deux n’est touché, on peut espérer un diagnostic différentiel”.

Un déséquilibre entre les ondes cérébrales

L’un des principaux enjeux de la maladie de Charcot est d’identifier un marqueur spécifique de ce syndrome afin d’accélérer ce diagnostic. Et c’est justement ce qu’a révélé l’équipe de Caroline Rouaux, grâce à l’électroencéphalographie. Les chercheurs ont placé des électrodes à la surface du crâne de patients et de souris atteints de la SLA afin d’observer leur activité cérébrale, sous forme d’ondes.

Résultat: ils ont mis en évidence une particularité électrique qui semble être propre à la maladie de Charcot: un déséquilibre entre deux ondes. “Ce phénomène n’est pas une surprise et avait déjà été décrit avec d’autres méthodes d’investigation, mais ces dernières sont très peu utilisées car elles sont difficiles à mettre en œuvre et ne fonctionnent qu’en tout début de maladie. L’électroencéphalographie, au contraire, est très peu invasive, très peu coûteuse, et peut s’utiliser à différents moments de la maladie”, explique Caroline Rouaux.

Mais quelle est donc cette singularité que décrivent les chercheurs ? Il existe différents types d’ondes cérébrales, d’amplitudes et de fréquences différentes. Deux d’entre elles nous intéressent particulièrement: “thêta”, et “gamma”. La première “reflète l’activité des neurones excitateurs, qui transmettent des messages stimulant les neurones”. Tandis que la seconde “reflète l’activité des neurones inhibiteurs, qui bloquent la transmission des messages nerveux”, résument les auteurs. C’est l’interaction entre ces deux ondes qui est atypique chez les patients atteints de la maladie de Charcot.

En effet, l’analyse des électroencéphalogrammes de tous les sujets testés indique un déséquilibre entre les deux types d’ondes, en faveur d’une plus grande activité des neurones excitateurs (ondes thêta): on parle d’hyperexcitabilité corticale. A mesure que la maladie évolue et que les symptômes progressent, ce déséquilibre se creuse. Plus étonnant encore: il est détectable avant même l’apparition des premiers troubles moteurs.

“Si ces premiers résultats se confirmaient, l’électroencéphalographie pourrait dans le futur servir d’outil pour les patients déjà diagnostiqués afin d’évaluer par exemple la réponse à un traitement médicamenteux, voire même d’outil diagnostic en cas de symptomatologie évocatrice de la maladie”, se réjouissent les chercheurs.

Une cible thérapeutique ?

Avec son équipe, Caroline Rouaux a pu identifier le mécanisme à l’origine de l’hyperexcitabilité observée. Les auteurs ont notamment constaté le déficit en une molécule capable de modifier l’activité neuronale, un neuromodulateur appelé noradrénaline. Celle-ci “était présente en plus faible quantité dans les cerveaux des patients et souris atteints de SLA et par rapport à des cerveaux sains”, soulignent-ils.

Après avoir vérifié le rôle de la noradrénaline dans l’hyperexcitabilité corticale, les chercheurs ont administré, aux souris atteintes, des molécules stimulant l’action de la noradrénaline. Comme ils l’espéraient, leur activité cérébrale a été restaurée, et s’avérait équivalente à celle de souris saines. “Cette découverte pourrait marquer l’ouverture d’une nouvelle piste thérapeutique dans la SLA sous réserve que l’hyperexcitabilité corticale soit bien associée à la progression de la maladie. En effet, à ce jour, nous observons dans notre étude une association entre les deux mais aucun lien de cause à effet n’est encore établi. C’est ce que nous allons vérifier dans les prochains mois”, conclut Caroline Rouaux.

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