Africa-Press – São Tomé e Príncipe. L’homme se fond d’abord dans la nature, dans la forêt, prend le temps d’observer, de sentir, il s’imprègne d’ambiances et de visions. Seulement après ces immersions – parfois de longues semaines s’écoulent – l’animal vient à lui, et alors il s’empare d’une feuille de papier. Pas n’importe lequel: un papier d’aquarelle en coton qui une fois mouillé devient flexible. A ce moment-là, grâce aux gestes minimalistes mais sûrs de l’artiste, qui par petites touches plie et replie, la transmutation opère. La feuille une fois séchée laisse apparaître les détails, le papier acquière les traits, les courbes, l’essence même d’un animal.
Photographier l’incarnation de papier sur le lieu de vie de l’animal
L’artiste dont on découvre ici l’ouvrage c’est Jonathan Rebouillat. Un naturaliste venu à l’origami après avoir rencontré il y a dix ans le vietnamien Giang Dinh, qui lui a transmis cette technique particulière, – magique ! affirme-t-il – maniée par une dizaine de créateurs au monde. Une fois revenu de ses observations sur le terrain, et l’origami réalisé, Jonathan Rebouillat est de retour sur les lieux où l’animal en chair et en os s’est manifesté et lui a permis de capter son âme, pour mettre en scène et en photographier l’incarnation de papier: une façon de refermer la boucle, selon ses propres mots.
« Traduire une émotion en un pliage »
Cet ouvrage n’est pas à proprement parler un manuel d’origami, ni juste un récit autobiographique d’expériences vécues dans la nature, ou un portfolio de photographies, et non plus un carnet de dessins naturalistes… Il est tout cela à la fois, un livre très personnel et saisissant, où se dévoile par touches successives l’univers de l’artiste, qui assouvit joyeusement son désir de partager une passion démesurée pour les animaux, les émotions des affuts et des rencontres, dans de poétiques récits à la première personne: « Une nuit de pleine lune. Dans la forêt. J’étais monté dans un arbre. Je ne bougeais plus depuis plusieurs heures. J’espérais observer un blaireau (…). Mais ce fut lui. Un léger bruissement de feuilles m’indiqua sa présence sous un grand pin. Le renard. Il ne m’avait pas vu.(…) Cet instant privilégié, en pleine nuit, fut un moment fondateur dans mon approche du monde sauvage. Traduire cette émotion en un pliage fut une joie profonde », raconte-t-il.
L’élan de Jonathan Rebouillat effacerait presque dans son tourbillon généreux la complexité d’une technique qu’il invite le lecteur à tester, en s’armant de détermination, de patience et de pinces à linge, tout en s’inspirant des jolies planches descriptives de son complice, l’illustrateur naturaliste Jean Chevallier.
Pour décrire son procédé, l’origamiste insiste: « Je vais chercher, dans un morceau de papier (…) le regard de l’aigle royal qui m’a transpercé. Mais rien ne garantit le succès de ma quête. Je ne peux pas coller, découper, ajouter de la matière (…). Avec mon morceau de papier, rien de tout cela: je ne peux que le plier (…). Même les couleurs sont imposées par ses deux faces: c’est par le pliage qu’elles doivent arriver aux bons endroits pour obtenir le résultat final. E d’autres termes, l’origami est métamorphose ». Dans ce condensé d’esthétique délicate et d’amour pour le vivant on reconnaîtra les qualités et les valeurs de Kobalann, la maison d’édition créé par le photographe animalier et réalisateur du film « La panthère des neiges », Vincent Munier. Laissez-vous tenter par ce cadeau précieux.
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