Pourquoi les oursins glissent-ils de leur rocher ?

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Pourquoi les oursins glissent-ils de leur rocher ?
Pourquoi les oursins glissent-ils de leur rocher ?

Africa-Press – São Tomé e Príncipe. C’est une question de vie ou de mort, déplore Andrew Moura. De nombreux oursins vivent dans des habitats où leur capacité à s’agripper aux rochers est vitale”. Une nouvelle étude révèle les conséquences des pluies torrentielles induites par le dérèglement climatique sur la mobilité des oursins. Ces résultats ont été publiés dans Journal of Experimental Biology.

Les conditions météorologiques extrêmes alternent entre vagues de chaleur et averses diluviennes. Ces répercussions directes du dérèglement climatique affectent les écosystèmes et entraînent parfois une modification dans la composition chimique des milieux. Les chercheurs de l’Université de Syracuse se sont interrogés sur les répercussions de ces pluies sur la biodiversité des littoraux, et en particulier sur la mobilité des oursins.

L’oursin, comment ça marche ?

Les oursins possèdent des centaines de piques extensibles, appelées pieds tubulaires. Elles leur permettent de se fixer à diverses surfaces et de s’y déplacer. A l’extrémité de la tige, un disque adhésif leur fournit une sorte de ventouse. “Les pieds tubulaires sont contrôlés par la pression de l’eau et les contractions musculaires, un peu comme lorsque vous pressez un ballon d’eau et qu’une autre partie se dilate en réponse”, illustre Andrew Moura pour Sciences et Avenir. Grâce à ce mécanisme, les oursins sont dotés d’une mobilité fine et d’une très bonne coordination au sein même de leurs pieds tubulaires. En premier lieu, le contrôle de la tige permet aux oursins de positionner leur disque adhésif près du substrat. Il sécrète ensuite une substance adhésive qui fixe solidement l’oursin à la surface du rocher. “Une fois agrippé à son substrat, l’oursin peut rester en place ou utiliser ses pieds tubulaires pour se déplacer en contractant la tige et en ‘roulant’ à la surface.” Pour se détacher, les disques adhésifs sécrètent une autre substance qui rompt le lien entre l’adhésif et le pied tubulaire.

“Les oursins glissent”

Lorsque de l’eau douce est déversée en grande quantité sur le littoral, la salinité diminue. Les chercheurs se sont demandé quels pouvaient être les effets de cette modification chimique sur les oursins. “Nous avons exposé des oursins à de l’eau de mer de salinité normale et à différents niveaux de faible salinité pendant 24 heures”, explique l’auteur de l’étude. Ils ont ensuite mesuré différents aspects liés à la performance du pied tubulaire des oursins : leur capacité à se fixer aux rochers par exemple, mais aussi à se déplacer et à se retourner. Résultat ? Toute sa mobilité diminue en réponse à une salinité de plus en plus faible. “En particulier, leur aptitude à se retourner et à se déplacer est affectée après de légères modifications de salinité. On remarque qu’ils parviennent encore à se fixer jusqu’à des salinités très faibles, mais finissent par glisser”, s’inquiète Andrew Moura.

Pourquoi ? L’expérience n’a pas permis d’identifier les mécanismes exacts qui sont responsables de la perte de mobilité et d’adhérence des oursins. Néanmoins, les chercheurs pensent que les ions contenus dans l’eau salée leur sont indispensables. L’ajout d’eau douce à l’eau salée dilue en effet la concentration d’ions tels que le sodium, le calcium et le magnésium, ce qui pourrait perturber le mouvement et la fixation des pieds tubulaires. “Les échinodermes, le groupe d’animaux qui comprend non seulement les oursins mais aussi les étoiles de mer et les concombres de mer, sont tous très sensibles aux variations de salinité. Chez l’oursin elle affecte la mobilité de ses pieds”

Des régulateurs essentiels

L’oursin n’est pas capable de réguler sa salinité, mais certains animaux le sont. “Il existe des espèces qui utilisent les ions présents dans l’eau salée à différentes fins, comme la construction de coquilles protectrices ou la transmission de signaux électriques”, indique le chercheur. La plupart des animaux marins (dont les poissons) ont la capacité de réguler ces différents ions pour s’adapter aux conditions changeantes de l’eau. Cependant, les oursins ne sont pas aussi efficaces dans ce domaine.

“S’ils ne sont pas capables de se fixer aux rochers, les oursins des littoraux sont soumis à des menaces considérables”, alerte Andrew Moura. Prédateurs, courants et vagues déferlantes peuvent en effet déloger les oursins et les blesser ou les tuer. Les facteurs de stress environnementaux induits par le changement climatique peuvent donc restreindre les écosystèmes qui conviennent aux oursins et modifier leur aire de répartition géographique en les amenant à se déplacer vers des habitats plus profonds.

“Ce serait catastrophique pour leurs écosystèmes actuels”, regrette le biologiste. Ces herbivores maintiennent un équilibre essentiel au sein des différents habitats qu’ils occupent. Sur les récifs coralliens, par exemple, ils contrôlent les populations d’algues, ce qui permet aux coraux de prospérer. A titre indicatif, ils sont responsables du pâturage d’environ 45% des algues dans ces écosystèmes. Dans l’objectif de maintenir cette biodiversité et d’assurer la survie des oursins, l’équipe de biologistes conduite par Andrew Moura souhaite continuer d’étudier l’impact du changement climatique sur ces derniers et ses conséquences pour les écosystèmes littoraux.

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