Thérapie Génique Restaure Audition Enfants Surdités

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Thérapie Génique Restaure Audition Enfants Surdités
Thérapie Génique Restaure Audition Enfants Surdités

Africa-Press – São Tomé e Príncipe. En France et en Chine, de bonnes nouvelles tombent concernant la thérapie génique pour restaurer l’audition. Elles concernent la neuropathie d’origine génétique DFNB9 qui représente environ 5% des cas de surdités à la naissance, selon la Fondation pour l’Audition.

Les premiers résultats de l’essai clinique, mené par l’institut Karolinska basé à Stockholm (Suède), l’industrie Otovia et plusieurs hôpitaux universitaires de Chine, ont été publiés le 2 juillet 2025 dans la revue Nature Medicine. Du côté français, le 1er juillet, Sensorion annonce dans un communiqué de presse les données préliminaires d’Audiogene, le premier essai clinique de la thérapie génique SENS-501, dirigé par l’Institut Pasteur et l’hôpital Necker-Enfants malades (Paris).

La surdité DFNB9 est une maladie génétique récessive rare due à une déficience en otoferline, essentielle à la transmission de l’information sonore au niveau des synapses dans l’oreille interne (voir le schéma ci-dessous). Elle est liée à une mutation du gène OTOF codant pour cette protéine. Selon le type de mutation, il y a soit une absence totale de production d’otoferline – c’est la majorité des cas observés –, soit une quantité insuffisante, soit une synthèse d’une otoferline non-fonctionnelle.

Comment fonctionne l’oreille? L’organe comporte trois parties: l’oreille externe capte les sons et les dirige vers le tympan, l’oreille moyenne amplifie ces vibrations grâce aux osselets, et l’oreille interne les convertit en signaux nerveux transmis au cerveau. Dans la cochlée, les cellules ciliées transforment les vibrations sonores en signaux électriques, puis elles transmettent ces signaux aux neurones auditifs grâce à des synapses. Dans ces cellules sensorielles, l’otoferline joue un rôle dans la libération des neurotransmetteurs au niveau des synapses.

L’objectif: restaurer une audition naturelle

À l’heure actuelle, la maladie est prise en charge avec des implants cochléaires qui « certes, fonctionnent très bien mais ne restaurent pas une audition naturelle, avec toute sa complexité et sa richesse, contrairement à la thérapie génique », nuance Natalie Loundon, directrice du Centre de Recherche en Audiologie Pédiatrique, oto-rhino-laryngologiste pédiatrique et chirurgienne de la tête et du cou à l’hôpital Necker-Enfants malades (AP-HP, Paris) qui participe à Audiogene. Elle ajoute: « D’un côté, la thérapie génique va agir sur 3 500 cellules interconnectées, qui s’autorégulent et discutent entre elles. De l’autre côté, l’implant cochléaire fonctionne avec 12 à 22 électrodes. Cela n’a rien à voir ! » La chercheuse explique que le défi ne concerne pas que l’oreille, mais tout un système neuro-auditif.

Les thérapies géniques développées par les différents laboratoires visent toutes à restaurer une audition complète pour des patients atteints de cette neuropathie. Dans le monde, cinq études parallèles sont en cours: deux aux Etats-Unis, deux en Chine, et une en France. Elles reposent sur les mêmes gènes candidats, mais les différences résident dans les protocoles d’injection, les vecteurs utilisés, les concentrations administrées et les âges à l’injection. La stratégie thérapeutique reste la même: elle consiste à faire pénétrer un gène médicament, pour induire la synthèse d’une otoferline fonctionnelle dans l’oreille interne du patient.

Concrètement, les patients sont opérés. Pour atteindre l’oreille interne, la première possibilité est de « passer par le conduit auditif externe (voir schéma ci-dessus, ndlr). On soulève le tympan, on se place dans la zone qui émerge du fond de l’oreille moyenne et on plante une aiguille très fine au niveau de la fenêtre ronde. C’est à ce niveau-là, au contact de l’oreille interne, que l’on injecte le traitement », décrit Natalie Loundon.

L’autre méthode consiste à « faire une petite incision derrière l’oreille et ouvrir la mastoïde (donc le sinus de l’oreille qui est une cavité). C’est comme quand on place un implant cochléaire, sauf qu’on ne met pas d’implant. Cette voie postérieure permet d’avoir une bonne vision sur la fenêtre ronde pour injecter. » Certains protocoles ajoutent une deuxième ouverture au niveau de la fenêtre ovale et des canaux semi-circulaires. La chirurgienne souligne la complexité du geste, d’autant plus sur les très jeunes enfants. Patience, précision et minutie sont requises pour éviter la création d’hyperpressions qui risqueraient d’abîmer l’organe et donc l’audition.

Une fille de sept ans a quasiment retrouvé une audition complète après sa thérapie génique

L’équipe chinoise a administré une thérapie génique sur dix patients atteints de surdité DFNB9, âgés de 18 mois à 24 ans au moment de l’injection. « Des études de plus petite envergure menées en Chine ont déjà montré des résultats positifs chez les enfants, mais c’est la première fois que la méthode est également testée chez les adolescents et les adultes », contextualise Maoli Duan, auteur de l’étude publiée dans la revue Nature Medicine, et chercheur aux départements d’oto-rhino-laryngologie de l’université de médecine de Wenzhou (Chine) et à l’institut Karolinska (Suède). « Nous allons maintenant suivre ces patients pour évaluer la durabilité de la thérapie. »

Tous les patients ont vu leur audition s’améliorer moins d’un an après le traitement. En moyenne, le volume des sons perceptibles est passé de 106 décibels (dB, l’équivalent du niveau sonore dans un concert de rock) à 52 dB (volume sonore dans un restaurant paisible). Par exemple, un mois après le traitement, le patient 9, qui était le seul participant adulte de l’étude, ne reconnaissait par les mots d’une conversation, mais pouvait identifier correctement le nombre de mots prononcés ou de claquements de mains. Dans le meilleur scénario, le patient 4, une fille de 7 ans traitée au niveau de son oreille droite (elle est implantée cochléaire à gauche), a presque retrouvé une audition normale (passant d’un volume sonore détectable de 101 dB à 25 dB en deux mois). Elle a pu tenir une conversation avec sa mère, quatre mois après l’injection, sans activer l’implant cochléaire de son oreille gauche, ni lire sur les lèvres.

Quelques effets secondaires ont été observés, principalement des réactions immunitaires. Cette réponse s’explique par le fait que le gène médicament est transporté dans une enveloppe virale. Bien que le virus vecteur provoque peu de formation d’anticorps, l’injection de ce corps étranger déclenche les défenses de l’organisme.

Audiogene: les résultats préliminaires de l’essai clinique français sont très positifs

Audiogene, l’essai clinique mené par une biotech française Sensorion, est centré sur les plus jeunes enfants. L’hypothèse sous-jacente, renforcée par les premières communications, est que la thérapie est d’autant plus efficace que les enfants sont plus jeunes.

Cet effet d’âge s’explique d’abord parce que la plasticité cérébrale est maximale pendant les premières années de vie, ce qui rend le cerveau particulièrement apte à développer des fonctions complexes comme le langage ou l’audition lorsque ces fonctions sont stimulées de manière précoce. « Après l’heure, ce n’est plus l’heure », illustre Natalie Loundon. « Si un implant cochléaire est installé à six ans de vie chez un enfant qui n’a jamais entendu, il ne parlera pas et ne reconnaitra pas la parole non plus », poursuit la chirurgienne. « L’enfant va éventuellement entendre du bruit, mais ne saura discriminer des mots. Son cerveau n’aura plus la capacité d’acquérir l’expérience et l’expertise pour analyser les différents modules très complexes de la parole. »

Par ailleurs, comme l’affirme la docteure, « plus les enfants sont âgées, plus ils ont des risques d’avoir des anticorps naturels ciblés contre les vecteurs utilisés », ce qui peut entraver l’efficacité de la thérapie génique. Bien que l’injection soit faite localement dans l’oreille interne, limitant initialement la présence d’anticorps à cet endroit, cette réponse immunitaire potentielle reste une raison supplémentaire d’intervenir chez des enfants très jeunes pour optimiser les chances de succès.

« Nous sommes en train de finaliser nos analyses, nous partagerons nos résultats complets en fin d’année », signale la docteure. Les données préliminaires publiées le 1er juillet confirment que, sur l’ensemble des patients traités, le médicament et la procédure chirurgicale associée sont bien tolérés. Tous les nourrissons participant à l’étude sont âgés de 6 à 31 mois, très sourds, atteints de DFNB9, ne portant aucun implant cochléaire au moment de l’injection.

Dans la première cohorte, une amélioration de l’audition a été observée chez un patient, âgé de 11 mois au moment de l’injection. Dans le communiqué de Sensorion, il est indiqué que « le recrutement de la Cohorte 2, qui reçoit une dose plus élevée de SENS-501, est sur le point d’être complété et la Société prévoit de communiquer de nouveaux éléments lorsque des données (…) seront suffisamment exploitables ».

Des bonnes nouvelles qui se limitent, pour l’instant, à la surdité DFNB9

À l’heure actuelle, la neuropathie DFNB9 est la seule candidate à un traitement par thérapie génique et l’accès à ce médicament est restreint aux patients ciblés par les essais cliniques. Natalie Loundon alerte que « les résultats prometteurs pour DFNB9 ont renforcé les recherches sur les autres surdités d’origine génétique, mais pour le moment il reste encore du travail avant d’espérer ouvrir les thérapies à d’autres gènes candidats ».

L’oto-rhino-laryngologiste pédiatrique insiste ensuite sur l’importance du dépistage précoce des surdités en général et des neuropathies en particulier. Si l’on veut étendre les injections à d’autres causes de surdité chez les nourrissons, « il faut repérer leur surdité très tôt et connaître leur cause ». Certains tests auditifs de dépistage ne permettent pas de détecter les neuropathies: « il faut compléter les otoémissions acoustiques (tests qui détectent les pathologies internes à la cochlée, ndlr) par des potentiels évoqués auditifs (qui explorent l’ensemble de la fonction auditive, ndlr). »

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